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Interview : Jean-Noël Fiard, Chef d'Établissement de l'École du Nord

Écrit parAnne-Lise Mtyle 07 Janvier 2025

Depuis son arrivée à la tête de l'École du Nord en août dernier, une école française établie à Maurice et homologuée par l'AEFE, Jean-Noël Fiard a apporté son expérience riche et diversifiée acquise en France et au Burkina Faso. A l'occasion des 50 ans de l'école, nous discutons avec lui des défis actuels et futurs de l'École du Nord, et de sa vision pour une éducation inclusive, bilingue et résolument tournée vers l'excellence.

Pouvez-vous nous parler de votre parcours avant de rejoindre l'École du Nord, notamment vos expériences en tant que proviseur au Burkina Faso et proviseur adjoint en France ?

Ces deux expériences se sont déroulées dans des univers très différents.
Tout d'abord, le premier établissement dans lequel j'ai été proviseur adjoint était une grande structure née de la fusion de plusieurs établissements, ce qui a conduit à la création d'un « Campus des Métiers ». Environ 2 500 élèves et 260 professeurs, avec des filières générales, technologiques et professionnelles, sur un terrain de 14 hectares. J'étais en charge de la filière « Tertiaire », du CAP au BTS, en passant par les classes de 2de à la Terminale dans divers parcours. J'y ai appris à m'organiser rapidement, à beaucoup communiquer et à faire face en toutes circonstances.

Au Burkina Faso, les enseignements étaient homologués jusqu'à la seconde à mon arrivée. Ma mission consistait à créer et homologuer la première et la terminale, et à initier et superviser le programme d'agrandissement des bâtiments dans le cadre de cette augmentation des effectifs. Cela m'a permis de toucher du doigt la complexité de la maîtrise d'œuvre, en lien avec différents intervenants, en plus de mes fonctions de proviseur.

Quels sont les principaux défis que vous avez identifiés depuis votre arrivée, et comment envisagez-vous de les surmonter ?

J'aime bien l'image du navire, que j'ai déjà utilisée pour communiquer avec mon équipe.
L'EDN est un magnifique navire, avec un très bel équipage, expérimenté et motivé. De nombreux passagers bénéficient déjà des services de ce navire, et beaucoup d'autres envisagent ou s'apprêtent à monter à bord.

Il s'agit maintenant de garantir une qualité de service constante, s'appuyant sur un équipage qui, bien que partiellement renouvelé chaque année, doit être en mesure de maintenir ce haut degré d'exigence.

Quelle est votre vision pour l'École du Nord, et quels sont les objectifs prioritaires que vous souhaitez atteindre dans les prochaines années ?

L'École du Nord doit être un modèle d'approche globale au service du développement et de l'éducation de nos enfants.
L'accueil doit être inclusif, l'enseignement de qualité, permettant à chaque élève d'atteindre son niveau d'excellence, et la vie scolaire doit garantir un environnement bienveillant et propice au développement psychosocial. Pour cela, il est nécessaire de mettre en place des structures pérennes qui stabiliseront le navire et de se demander chaque jour : « Comment faire mieux ? » dans chacun de ces domaines.

Heureusement, pour relever ces multiples défis, je peux compter sur une équipe de direction de grande qualité, un comité de gestion très professionnel, une amicale des parents extrêmement dynamique et le soutien de l'Agence pour l'enseignement français à l'étranger. Le succès de l'École du Nord repose sur la somme de toutes ces compétences et bonnes volontés pour relever les défis de demain.

Comment voyez-vous l'évolution de l'enseignement à l'École du Nord dans les cinq prochaines années, notamment en matière de digitalisation ?

La dimension numérique est déjà largement intégrée dans notre offre éducative.
Nous disposons de plusieurs salles informatiques, les enseignants sont formés aux pratiques numériques. Nos élèves passent leur certification Pix, axée sur leurs compétences numériques, et nous participons également à la Nuit du Code, un marathon informatique de 6 heures où nos élèves, de CM2 à la 3ème, codent un jeu en 6 heures. Les bulletins scolaires, absences, emplois du temps, menus de la cantine, etc., sont déjà disponibles en ligne pour permettre aux parents de suivre la scolarité de leurs enfants.

Aujourd'hui se pose la question de l'avenir et de l'intégration d'une technologie susceptible de transformer profondément les pratiques traditionnelles : l'intelligence artificielle. Elle pourrait être un levier formidable pour l'inclusivité et l'excellence, permettant à chacun de progresser à son rythme vers l'objectif fixé par l'enseignant. Cela nécessitera de revoir notre manière d'enseigner et de définir de nouveaux objectifs. Notre centre de formation AEFE a pris en charge ce dossier et propose cette année des sessions dédiées à ce sujet. L'EDN naviguera donc dans le domaine de l'IA.

Pouvez-vous partager avec nous un peu d'histoire sur la fondation de l'école et son évolution au fil des années ?

En 1973, un groupe de parents a fondé une école pour répondre aux besoins des familles du nord de l'île, qui devaient auparavant faire un long trajet jusqu'à Curepipe. Cette initiative de parents anglophones et francophones a donné naissance à l'École du Nord, inaugurée le 24 septembre 1974 avec une poignée d'élèves, et qui en compte aujourd'hui 1350. L'école a reçu son homologation du ministère français de l'Éducation en 1986, gage de son exercice conforme au curriculum français. Depuis cette date, l'établissement bénéficie d'un soutien financier de la France, qui représente plus du tiers de son budget et s'inscrit dans le réseau AEFE de presque 600 établissements dans le monde.

Quelles sont les valeurs fondamentales promues au sein de l'École du Nord au cours de ces 50 années d'existence ?

L'École du Nord promeut des valeurs de tolérance, de curiosité intellectuelle, d'ouverture sur le monde et d'esprit critique. Notre communauté se compose de plus de 20 nationalités, majoritairement mauricienne et française, ou le vivre ensemble se conjugue au quotidien.

Comment l'école a-t-elle réussi à s'adapter aux besoins changeants des familles expatriées au fil des décennies ?

L'école a évolué en ajoutant des classes de collège dans les années 80, puis en co-créant en 2002 le Lycée des Mascareignes pour offrir un enseignement complet aux élèves de la région. Récemment, nous avons alors concentré notre énergie sur le renforcement de la place du bilinguisme français-anglais en créant un parcours de section internationale britannique de la maternelle au collège, jusqu'à 10 heures d'enseignements en langue anglaise sur les 24 hebdomadaires. Cette stratégie ayant suscité l'intérêt de nouveaux publics non francophones, nous avons en parallèle développé des dispositifs de prise en charge spécifique, tel le parcours Frangipane, qui nous permet d'intégrer des élèves russes, américains ou sud-africains qui s'épanouissent dans le système scolaire français tout en valorisant leur haut niveau de langue anglaise. Inauguré en 2023, le Parcours Sportif Junior se distingue par son approche transversale et multisports et est conçu pour préparer nos jeunes athlètes à rejoindre le prestigieux parcours d'excellence sportive du Lycée des Mascareignes. 

Comment l'école intègre-t-elle la culture mauricienne dans son programme éducatif, tout en offrant une éducation internationale de qualité ?

Tout en suivant le programme français, l'École du Nord adapte ses supports aux réalités locales, comme en géographie ou en musique avec des chants créoles. L'AEFE encourage aussi l'intégration de la culture et de la langue du pays hôte, une approche qu'on retrouve dans nos évènements et services adaptés aux besoins alimentaires locaux. De nombreux événements notamment culturels mettent en avant nos racines mauriciennes avec la Grande Dictée, les fresques murales … et les sorties scolaires ancrent aussi la richesse du patrimoine de l'île. 

Pouvez-vous nous parler des réalisations les plus marquantes de l'École du Nord au cours de ces 50 dernières années ?

Notre réussite repose sur une croissance régulière sans rupture, portée par la qualité des enseignements et des services annexes comme la restauration et les activités. Parmi les réalisations marquantes : la construction d'un gymnase, la création du Lycée des Mascareignes en 2002 et l'extension récente de notre restauration scolaire. Aujourd'hui, nous avons franchi la barre des 1300 élèves pour cette rentrée scolaire, ce qui nous donne à penser de nouveaux chantiers pédagogiques et immobiliers pour les années à venir.

Quel message aimeriez-vous transmettre aux anciens élèves, au personnel, aux parents et à la communauté dans son ensemble pour marquer ce 50e anniversaire de l'école ?

Un mot : confiance. Confiance en notre modèle associatif sans but lucratif, qui incarne des valeurs de solidarité et de résilience, et en notre réseau AEFE. Notre école est sortie plus forte de la pandémie, avec des pratiques numériques enrichies et un engagement renouvelé envers la communauté éducative.

Ile Maurice
A propos de

Anne-Lise a étudié la psychologie pendant 4 ans au Royaume Uni avant de rentre à Maurice pour prendre de l'emploi comme journaliste. Après 3 ans dans la presse écrite, elle occupe désormais le poste de responsable éditorial à Expat.com.

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