D'où viens-tu, Samuel, et que fais-tu actuellement ?
Je suis Breton, graphiste et un peu photographe. J'ai travaillé pendant un an à Paris, dans la mode, après mes études de Design Graphique à Montaigu (Lycée Léonard de Vinci) et à Tours (Université François Rabelais). J'ai travaillé dans un groupe international en France avant de partir à Glasgow. Je suis actuellement en poste dans une entreprise locale. Je m'occupe de leur communication.
Qu'est-ce qui t'a attiré vers ce pays ?
J'avais besoin de quitter la France. Ça faisait longtemps que j'y pensais. Beaucoup de choses en France m'ont agacé, et si ce n'est pas mieux ailleurs, au moins ce n'est pas chez moi. Il devient alors plus facile de les oublier pour se concentrer sur les choses positives et sur mes passions. L'Écosse est un pays passionnant, avec une très forte identité culturelle, comme la Bretagne d'ailleurs. Les paysages sont magnifiques. Un vrai terrain de jeu pour un photographe.
Comment s'est passée ton installation à Glasgow ?
Plutôt bien. J'ai eu la chance d'avoir une colocataire qui vivait à Glasgow depuis un an déjà. C'est immensément plus simple quand quelqu'un vous guide à travers l'expatriation.
Depuis combien de temps t'y es-tu installé ?
Cela fait plus de trois ans que je vis à Glasgow. Je vis avec quelqu'un depuis plus de 6 mois.
Quelles étaient les procédures à suivre pour qu'un citoyen français s'expatrie en Écosse ?
En France, rien ! J'ai fermé tous mes comptes (EDF, Téléphone, Mutuelle etc.) et je suis parti. Par contre, une fois parti et un an passé, attention Français : vous n'avez plus le droit à rien ! Ni santé, ni aide, ni conseil... Vous revenez en France pour les vacances et vous avez autant de droits qu'un immigré de Saturne. Ça fait un peu peur.
Ici, la bureaucratie est bien différente, mais plus simple. Les indispensables parleront à tous les membres d'Expat Blog. Ce sont des questions fréquemment posées sur le forum : un Nino (National Insurance Number) qui est un numéro d'identification qui sert à beaucoup de choses (travail, santé...), un GP (General Practician) ou médecin généraliste, un compte bancaire (facile à obtenir sur Internet), et c'est tout. A partir de là, on peut chercher du travail, un appartement... Les mutuelles, c'est à oublier. Il faut payer 150£ par mois pour se permettre de souscrire à un service comme Bupa. Bienvenue dans un monde de médecine à deux vitesses. Un petit choc pour les Français.
As-tu éprouvé des difficultés à franchir ces étapes ?
Pas du tout. La paperasse est plutôt simple et expéditive ici, mais ce n'est pas toujours un bonus. Il faut par contre s'habituer à ne plus jamais aller chez le dentiste ou le médecin généraliste à moins de payer des soins privés très chers.
Quelles sont les particularités du marché de l'emploi ?
Le marché de l'emploi à Glasgow est tendu, surtout pour les métiers de la culture et de l'éducation. La culture générale n'est pas du tout une priorité ici. Les gens consomment ce qu'on leur fourre dans le cerveau. A une bien plus grosse mesure qu'en France. C'est là qu'on réalise la richesse de la France. Ce qui fait que ces métiers se font rares ici.
Paradoxalement, la Glasgow School of Arts est très pointue et réputée. Cela donne un marché du travail extrêmement concurrentiel. De l'aveu d'un recruteur, quand une offre est mise en ligne pour un poste de graphiste, par exemple, plusieurs centaines de personnes répondent dans la semaine.
Le Job center (équivalent du Pôle emploi) ne sert à rien en termes de débouchés. Ils sont dépassés par le nouvel ordre des choses et n'ont pour ainsi dire pas de conseils à donner. De plus, les lois ont changé. Après plus d'un an et demi d'emploi à plein temps, j'ai touché les "benefits" (allocations chômage) pendant 2 mois. Ça fait 200£ par mois. J'ai travaillé pendant 6 mois et j'y suis retourné. Mais depuis, les lois ayant changées, on m'a refusé les allocations. Pour les immigrés, si j'ai bien compris, il faudra désormais plusieurs années de salaire pour bénéficier des allocations. Dur...
Qu'est-ce qui t'as le plus surpris à ton arrivée à Glasgow ?
La gentillesse des Ecossais. Elle dépasse la légende. Les gens t'aident, te conseillent, te parlent, les gens sont aimables et adorent les Français.
La ville est dégueulasse. Les gens ne recyclent pas, jettent leur rebut sur le trottoir, en supposant que quelqu'un passera les prendre. Il y a par exemple un « dumping » systématique de matelas, de jouets cassés et encombrants devant chez moi. Et ce tas d'immondice reste souvent là pendant des mois.
En ce qui concerne la culture, tout est nivelé par le bas. Les musées sont donc en moyenne plutôt médiocres car adaptés en priorité aux enfants. Pour moi, le Kelvingrove Art and Gallery Museum en est un exemple parfait: aucune muséographie et un niveau d'exigence très bas.
As-tu eu des difficultés à rechercher un logement ?
Non, pas plus ici qu'ailleurs. A Paris, trouver un logement est très difficile avec des moyens restreints. Ici, c'est comme ailleurs. Il y a de tout.
Que penses-tu du mode de vie des Ecossais ?
La société ultra-consumériste dans laquelle ils vivent a fait d'eux des consommateurs de tout, même des sentiments humains. Les « Friends » ne sont des amis que pour la soirée. C'est comme si la culture anglo-saxonne ne comprenait pas l'utilité du lien amical. Les groupes de « Mates » se forment autour du travail ou des études. Mais si vous n'avez pas ce genre de connections avec les locaux, il devient difficile de tisser des relations durables avec eux.
Il ne faut pas perdre de vue que Glasgow est une ville très pauvre, et avec la pauvreté viennent d'autres soucis. Le East-end (le quartier le plus pauvre) est un quartier dangereux, ce n'est pas un mythe, et pour l'anecdote, l'espérance de vie dans ce quartier est de 54 ans. 62% de la population en est en surpoids et plus de 30% de jeunes le sont. Mais je tiens aussi à dire que leur mode de vie fait d'eux des gens formidables, ouverts et très sociables. La culture écossaise place certes le divertissement au centre de tout, mais cela a créé une ville « ville » et une population passionnante, cosmopolite et chaleureuse.
Qu'en est-il des spécialités culinaires locales et des habitudes alimentaires ? Quel est ton plat préféré ?
Le « haggis » je suppose, car il ne doit pas être loin d'être le seul. Il n'y a pas de « cuisine écossaise », si l'on ignore les fast-foods et le « Deep Fried Mars ». Cuisiner revient plus cher qu'acheter des plats préparés, et il est difficile de trouver du bon pain, des produits de bonne qualité à des prix abordables, ou du vin français sous la barre des 10£ la bouteille. Oui, c'est une remarque très française, mais si je peux m'adapter, je ne veux pas perdre le goût de la bonne cuisine.
Les habitudes alimentaires ici sont désastreuses. Je vis devant deux écoles. Les enfants mangent n'importe quoi à l'école (chips, frites, Hamburgers à 10h...) et les adultes ne sont pas mieux. Mais bon, assez de négatif ! A défaut de cuisiner écossais, il y de très bon restaurants, et pas forcément chers. Je n'ai donc pas de plat préféré, mais pas mal de bonnes adresses. En ce moment, je suis assez fan du Ox and Finch, un restaurant de tapas de très haute qualité, dont les prix sont très corrects.
Une idée reçue qui s'est avérée fausse ?
Je ne sais pas trop quelles sont les idées reçus de l'Écosse... Je me rappelle qu'il y a trois ans quand j'annonçais partir en Écosse, quelqu'un m'a dit « Mais, il y a des villes là-haut ? ». Glasgow a été l'une des premières villes européennes à recevoir la 4G, nous avons l'Internet à 100mb/s presque partout. La téléphonie mobile est très peu coûteuse et il y a le Wi-Fi partout. Pour les télécommunications, c'est un vrai petit paradis !
As-tu eu des difficultés d'adaptation à ton nouvel environnement ?
Oui. Comme je l'ai dit auparavant, j'ai beaucoup, beaucoup de mal à me faire des amis, des connections. Expat blog est formidable ! La solitude est une épreuve douloureuse dans un pays étranger aussi individualiste. Sinon, la culture du travail est très agréable. On te fait confiance. L'ambiance est souvent détendue, beaucoup plus qu'en France où je trouve la culture d'entreprise trop rigide et trop autoritaire.
Je vois souvent la France s'émouvoir de Free qui « bosse à l'américaine » ou d'autres entreprises qui travaillent différemment, de manière collaborative, ouverte et détendue. Il faudrait en effet qu'on réussisse à appréhender ces modèles d'entreprises.
A quoi ressemble ton quotidien à Glasgow ?
Métro-boulot-dodo ! Je travaille dans un cabinet d'ingénieurs. Donc, pour le travail c'est « Office Wear ». Ça change de la France. Travailler en costume est étonnant au début. Métro ou vélo quasiment tous les matins. Je finis à 17h, mais en novembre dernier, il faisait nuit à 16h. Une fois par semaine, je sors entre amis, quasiment tous des expatriés. C'est dommage, mais c'est comme ça.
Que fais-tu pendant ton temps libre ?
Je suis un enfant de la culture Geek ! Donc beaucoup de jeux vidéos, pas mal de cinéma grâce à ma carte illimitée, beaucoup de séries télé, de comics... Je collectionne aussi les vinyles. Mais je suis en grande partie ici pour le décor car je suis un peu photographe. Donc, je fais pas mal de randonnées, de balades... Éclaireur de France quand j'étais ado, c'est devenu un besoin pour moi cette nature.
Les paysages de l'Écosse sont magnifiques. Et tout au sommet de la beauté se trouve l'île de Skye.
Qu'est-ce qui te plait le plus à Glasgow ?
La nature n'est pas loin et elle est superbe. Mais à Glasgow et à Édimburgh, on peut découvrir des chefs d'œuvre d'architecture victorienne, géorgienne et edwardienne. Ce sont presque deux villes musées. D'autant plus que tout ça est brutalement mis à coté d'architectures contemporaines. C'est un contraste magnifique. Certains quartiers font penser à San Francisco, d'autres à Sydney.
Un évènement particulier que tu voudrais partager ?
Oui ! Allez à l'île de Skye (en voiture exclusivement) ! Ce sont littéralement les plus beaux paysages que j'ai vus de ma vie. J'ai hâte d'y retourner pour prendre des photos. Sinon, les championnats mondiaux de « Bagpipe ». Moi, c'est plutôt Johnny Cash, Minor Majority ou the Sea and Cake, mais écouter du Bagpipe en live est réellement impressionnant. Merci à Maël pour la découverte.
Quel est ton avis sur le coût de la vie à Glasgow et en Écosse en général ?
C'est cher. Le métro a un prix exorbitant si l'on considère le fait qu'il n'y ait qu'une seule ligne, ouverte de 7h à 23h et de 10h à 17h le dimanche. Le ticket est plus cher qu'à Paris. Les loyers dans la ville ou le West-end sont abordables. Mais la Council Tax fait mal. Entre 80 et 400£ en plus du loyer selon les quartiers et les immeubles.
Qu'est-ce qui te manque le plus par rapport à la France ?
Mes amis, mes trois frères, ma famille et la bonne bouffe !
Des conseils aux personnes qui souhaiteraient s'expatrier à Glasgow ?
Venez ! Glasgow est une ville passionnante et en pleine expansion. Les pubs et les cafés sont accueillants, la vie nocturne est fourmillante, les gens sont adorables et les paysages sont beaux ! La vie au quotidien est chère, mais je pense que pour des vacances, c'est une destination unique pour un prix somme toute assez modeste. Je me ferai une joie de vous la faire découvrir, comme je l'ai fait pour tant de gens avant vous.
Tes projets d'avenir ?
Pour l'instant, rester vivre ici. Pour la première fois en deux ans, j'ai un travail qui me semble stable, dans lequel j'ai peut-être un avenir. J'aimerais voir si je peux évoluer dans mon poste actuel. Quant à la suite, pour l'instant je n'envisage pas d'avoir des enfants en Écosse. Le niveau d'éducation est trop bas et la santé est risible. Pour ça, l'Écosse est assez décevante. Je rêve de partir au Canada... On verra !
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