Pourquoi as-tu choisi de partir au Togo?
J'ai choisi le Togo car j'ai déjà connu l'Afrique du Nord, le Maroc et la Tunisie. Je suis partie deux fois au Burkina Faso, j'ai voulu voir autre chose tout en restant dans un pays francophone, car mon anglais est limité. Et J'ai fait des recherches sur le Togo, j'ai constaté que c'était un pays en difficulté, tiraillé entre le Ghana d'un côté, et le Bénin de l'autre. Et puis, ce n'était pas loin du Burkina et en cas de problème, je savais que je pouvais compter sur mes amis burkinabés. Durant mon séjour de 6 mois au Togo, j'ai vécu dans 5 logements différents, mais toujours autour de Lomé. J'ai par contre visité tout le pays du Nord au Sud pour quelques missions mais aussi pour le tourisme.
Comment as-tu trouvé cette mission de volontariat?
J'ai tapé sur Internet "Mission de reboisement en Afrique francophone" et je suis tombée sur une association qui proposait cette mission.
Comment s'est passée ton installation?
J'ai connu des difficultés dès le début car la maison que j'avais trouvée à louer m'a échappé à 4 jours de mon arrivée. Le propriétaire a logé quelqu'un d'autre. Du coup, j'ai remué ciel et terre pour un plan de rechange. J'ai fini dans un hôtel miteux mais il était au bord de l'océan, pas trop cher et l'accueil chaleureux.
As-tu eu des difficultés d'adaptation (barrière de la langue, coutumes)?
Vu que je connaissais déjà un peu l'Afrique, je savais à quoi m'attendre au niveau du mode de vie: la façon d'économiser l'eau, d'aller la puiser au puits pour se laver ou préparer à manger, aller dans un coin bordé de cannisses pour aller aux toilettes, le marchandage... Mais heureusement qu'ils parlent français car dans certaines situations, on sent bien qu'il est capital d'être comprise!
Qu'est-ce qui t'a le plus surpris au Togo?
Spécifiquement au Togo, je ne pense pas avoir eu de surprises, mais à chaque fois que je vais en Afrique, c'est leur incroyable optimisme qui m'épate. Ce sont les gens parmi lesquels il y a le plus de problèmes qui sont les plus souriants.
Les Togolais sont-ils accueillants? Est-il facile de s'intégrer et de faire de nouvelles connaissances?
Oui les Togolais sont accueillants, ouverts et à l'écoute. On peut demander sa route à tout le monde, demander un renseignement facilement et surtout, ils seront très dévoués pour nous aider jusqu'à ce qu'on trouve.
Pour lier des vraies amitiés en revanche, je pense qu'il faut s'accorder beaucoup de temps car au départ, on ne sait pas trop sur quel pied danser. Est-il mon ami pour mon passeport ou mon argent ? Ou est-il mon ami pour ce que je suis réellement... Seul le temps peut y répondre.
Peux-tu partager avec nous un trait caractéristique du Togo qui te plaît particulièrement ainsi qu'un aspect négatif?
Je vais reprendre ce que j'ai dit plus haut mais la caractéristique qui me plaît le plus c'est leur optimisme démesuré.
L'aspect négatif, c'est que je ne pense pas qu'on puisse relâcher son attention lorsqu'on est dehors ou dans un groupe, pour les raisons évoquées ci-dessus : les gens qui m'entourent sont-ils là vraiment en ami ou attendent-ils de fouiller mes affaires quand j'ai le dos tourné?
Une idée reçue sur le Togo qui s'est avérée totalement fausse:
"Les africains sentent mauvais" ou "les africains sont fainéants". J'aimerai voir un blanc travailler au champ comme les africains le font toute la journée sous le soleil à 40 °C et 6 jours sur 7, sans RTT, sans congés, sans indemnités journalières en cas d'accident...
Qu'est-ce qui t'a le plus manqué par rapport à la France, ton pays d'origine?
Ah! Ça, c'est une surprise! J'ai écrit un livre relatant cette aventure de 6 mois au Togo et j'y raconte ces moments de manque... Bon, allez, je vous dévoile juste une chose. Je rêvais d'un pâté spécial de ma région qui s'appelle LOU GASCOUN!
A quoi ressemblait ton quotidien au Togo?
Mon quotidien n'était pas de tout repos, notamment celui durant la mission de reboisement de 150 arbres: debout 6h, quelqu'un allait chercher l'eau quand une autre personne allait chercher du charbon ardent pour aller plus vite. Lorsque le feu était lancé, on faisait chauffer l'eau pour le petit déj'. En attendant, on se préparait.
Après le petit déj', on partait au champ. On travaillait jusqu'à 11h30 car il fallait rentrer dans notre campement préparer le repas. Même chose que le matin, l'un allait chercher l'eau et l'autre le feu. Après le repas, on s'accordait une sieste jusqu'à 14h/14h15. On travaillait au champ jusqu'à 17h environ.
Avant que la nuit ne tombe (18h), on allait remplir chacun un seau d'eau pour la douche. La douche était à 400 m de notre habitation. J'ai réussi à négocier avec un togolais pour qu'il m'aide à porter mon seau car le poids est vite lourd. Vu qu'on tournait à tour de rôle pour la douche, les autres préparaient le repas avec toujours la contrainte d'aller chercher l'eau et le feu.
On mangeait et on ne tardait pas trop le soir. D'une part on était crevés, d'autre part, il n'y avait aucune lumière à part notre petite lampe à pétrole qu'on économisait. Le sommeil était rapide et lourd pour tout le monde!
Que faisais-tu pendant ton temps libre?
Lors de cette mission, le temps libre pouvait être entre midi et deux ou un peu le soir avec la lampe torche ou encore le week-end. Généralement, on essayait de trouver un thème pour parler de la France et de l'Afrique. Mais sinon, je bouquinais ou j'écrivais mon carnet de voyage.
Tu as choisi de raconter ton expérience dans un livre, "Togo or not to go (to help)" : pourquoi avoir choisi ce format pour partager ton expérience, et pourquoi cette envie de partager ce que tu as vécu?
Lorsque je suis partie, j'ai promis à celles et ceux que ça intéressaient que je leur donnerai de mes nouvelles. J'essayais de me connecter tous les 10 jours environ pour leur raconter mes aventures. Nombreux ont été mes amis qui me suggéraient d'écrire un livre de ce que je vivais. Ils disaient que ce livre pourrait être destiné à celles et ceux qui voudraient partir à leur tour au Togo, mais aussi pour celles et ceux qui ne peuvent pas se permettre de poser un congé sabbatique et tout plaquer comme je l'ai fait. Je leur ai donné du rêve et des rires à travers mes mails et j'ai décidé d'écouter mes amis. Ainsi, mon carnet de voyage est né. Il a été publié en octobre 2012.
Quels sont les thèmes abordés dans ton livre?
Il s'agit de mon quotidien, mon combat tous les jours contre les soucis de logement que j'ai pu connaître, mes rencontres, mes amitiés, mes missions, mes réussites et mes déceptions...
Quels conseils peux-tu donner à ceux qui veulent partir faire du volontariat au Togo?
Je peux dire qu'un voyage solidaire est un voyage qui se prépare. Il faut s'imprégner du pays dans lequel on va vivre (bouquiner le Petit Futé ou le Guide du Routard), il faut essayer de rencontrer des gens au préalable qui y sont allés pour comprendre comment ça peut se passer. Il faut être capable de s'ouvrir et de laisser tous les préjugés de côté.
Ne pas trop titiller les habitants avec la religion ou la politique qui sont des sujets sérieux, surtout dans le contexte actuel.
Savoir ce que l'on peut apporter d'utile en demandant à des gens qui y sont déjà allés ou en contactant une association qui a l'habitude. En effet, on peut croire que ce qui est utile pour nous l'est pour eux mais ce n'est pas le cas. Exemple : on sait qu'il faut apporter des stylos pour les écoliers, mais faut savoir que les feutres et tout ce qui est à base de gel ne sont pas recommandés à apporter car ils sèchent rapidement et sont vite jetés (n'ont pas de système de ramassage des ordures ou de traitement des déchets). Il faut savoir aussi que les écoliers n'ont pas le droit d'écrire avec des stylos noirs. Uniquement du bleu ou du vert. Tous ces petits détails paraissent légers mais pourtant sont utiles lorsqu'on procède à des récoltes de dons autour de nous.
J'espère que vous serez nombreux à vouloir tenter un voyage solidaire, et si vous voulez prendre contact avec moi pour des conseils ou des questions, n'hésitez pas.