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Jean-François à Saigon : « Mon leitmotiv a toujours été l'adaptation »

Publié le 15 Janvier 2014
En 2009, Jean-François décide de changer de vie : il quitte la France pour s'installer à Saigon. Il donne des cours de français et mène une vie équilibrée et épanouissante, profitant pleinement de sa première expérience d'expatriation.

Comment s'est passée ton installation?

Plutôt facile, car elle avait été longuement préparée et j'avais fait deux voyages de reconnaissance. J'ai d'abord été logé chez un couple d'amis franco-vietnamien. Ça m'a laissé le temps de chercher tranquillement un logement.

Quelles ont été les formalités que tu as du suivre pour pouvoir t'installer au Vietnam?

Je suis arrivé avec un visa touristique de trois mois. J'ai pu le faire renouveler plusieurs fois sans problème à l'époque (en 2010). Puis il a fallu trouver une solution plus pérenne. Après de longues recherches et tractations avec les relations de mes amis, j'ai pu obtenir un contrat de travail avec une société vietnamienne, qui m'a donné droit à un visa de trois ans. Je fais actuellement des démarches pour créer ma propre société. J'ai fait faire un permis de conduire (à partir du permis français). Je me suis également inscrit au Consulat de France.

As-tu eu des difficultés d'adaptation (barrière de la langue, coutumes)?

Des difficultés, non, mais il faut dire que j'étais bien préparé ! A la fois, parce que mes amis vietnamiens en France m'avaient bien briefé, et parce que je m'étais "conditionné" à devoir accepter et essayer de comprendre la culture vietnamienne, plutôt qu'à essayer d'importer ma culture. Ceci étant, tout n'est pas facile. Évidemment, il y a la barrière de la langue : mes relations "viêt-kiêu" m'ont été d'un grand secours. J'ai entrepris l'apprentissage du vietnamien, mais c'est un travail de (très) longue haleine. L'anglais est très pratiqué par la jeune génération et utilisable dans certaines situations, mais malheureusement, l'accent anglais des vietnamiens est assez souvent ... déroutant ! Le plus difficile finalement est d'accepter le comportement des Vietnamiens dans l'espace public. Pour faire court, disons que la politesse et le respect d'autrui, au sens occidental du terme, ne sont pas les valeurs les plus courantes ici.

Qu'est-ce qui t'a le plus surpris à Saigon?

En premier lieu, la façon de circuler. Ensuite, l'ambiance frénétique et grouillante de cette ville, où tout semble tourner autour de l'argent.

Les Vietnamiens sont-ils accueillants? Est-il facile de s'intégrer et de faire de nouvelles connaissances?

Au premier abord, les Vietnamiens sont en général très accueillants et très ouverts, presque toujours très souriants : c'est aussi un choc (positif !). S'intégrer n'est pas très difficile si on les accepte comme ils sont mais cette intégration reste un peu "de surface". Faire des nouvelles connaissances est assez facile quand on est "blanc", mais ce sont souvent des relations "intéressées" ou très superficielles, et peu stables dans la durée. Se faire des amis, au sens fort et occidental du terme, est beaucoup plus difficile.

Peux-tu partager avec nous un trait caractéristique de Saigon qui te plaît particulièrement ainsi qu'un aspect négatif?

Positif : l'ambiance jeune, cosmopolite et entreprenante. Négatif : la pollution et le bruit.

A quoi ressemble ton quotidien d'expatrié à Saigon?

Je mène une vie plutôt calme, essentiellement au contact des Vietnamiens. Je ne fréquente pas beaucoup le "milieu" expat. J'ai un réseau d'amis vietnamiens ou viet-kiêu français. Ils m'ont aidé à m'intégrer et à résoudre les difficultés quotidiennes et administratives.
Je suis en contact quotidiennement avec des Vietnamiens. J'ai beaucoup observé et cherché à comprendre leur culture et leur mentalité, que je pense bien connaître maintenant. Mon leitmotiv a toujours été l'adaptation, qui demande ouverture d'esprit, patience, modestie et même parfois abnégation ou renoncement à certaines valeurs qu'on croyait absolues ! Mais c'est le prix à payer pour être accepté et apprécier les qualités des vietnamiens, tout en supportant les désagréments et les différences, qu'il ne faut pas sous-estimer.
Je crois avoir trouvé un bon équilibre entre ma culture et les apports de la culture vietnamienne, sans angélisme et avec un réalisme toujours optimiste. Je suis en contact permanent avec ma famille et mes amis en France, grâce à Internet.

Est-ce qu'il y a des habitudes vietnamiennes que tu as adoptées depuis que tu vis à Saigon?

Oui : je porte un masque anti-pollution dès que je sors dans la rue ! Je porte des tongs quasi-ment en permanence et je me déchausse en entrant dans une maison. Je ne serre presque plus de mains et n'embrasse pratiquement jamais. Je mange avec des baguettes. Et je dis tout le temps "troi oi !" (disons pour les non-vietnamiens que c'est à la fois une sorte de point d'exclamation mis en mots ou un petit juron ; les Vietnamiens l'utilisent tout le temps).

Qu'est-ce qui te manque le plus par rapport à la France, ton pays d'origine?

La bonne éducation, la culture et la nature facilement accessible.

Quels conseils peux-tu donner à ceux qui veulent s'installer à Saigon?

Avoir des connaissances sur place. Sinon, c'est un vrai parcours du combattant (mais on peut aimer ça). Laisser en France sa "logique" occidentale et ses "principes" (dur, dur, on n'imagine pas à quel point). Réfléchir à deux fois (et même plus) avant de confier son argent ou de mettre ses biens au nom d'un Vietnamien ou d'une Vietnamienne (attention aux propositions de mariage...).

Après 4 ans au Vietnam, qu'est-ce que ton expérience à l'étranger a changé pour toi?

Je suis beaucoup plus tolérant aux différences culturelles et aux différences de valeurs. Et même si mes réponses précédentes font apparaître des "critiques", je me sens très bien ici et j'accepte sans problème les différents aspects de la culture de ce peuple très attachant.

Vietnam
Saigon

Commentaires

  • venissian
    venissianil y a 10 ans(Modifié)
    bonjour je suis comme toi resident au Vietnam depuis 9 ans deja (mais au centre au sud de HoiAn) au plaisir de te rencontrer ou de se telephoner
  • chris_ms
    chris_msil y a 10 ans(Modifié)
    Félicitations pour ton panorama plein d'appréciations pertinentes permettant de saisir en peu de mots les sous-jacents de la vie quotidienne à Saigon, aspects qui sont souvent tus par des "oiseaux de passage"". J'arrive à Saigon le 24 février et je recherche un(e) guide qui pourrait me proposer une visite Saigon et around de 1,2 ou 3 jours suivant programmes à convenir. A bientôt, Chris.
  • taureau
    taureauil y a 10 ans(Modifié)
    J'aime beaucoup! Merci :-)
  • tranus
    tranusil y a 10 ans(Modifié)
    Salut Jean-Francois, j'ai l'impression de vivre la même expérience que toi. Effectivement, très difficile de mettre ses valeurs de côté. Je tente de m'intégrer, oui, mais pas à tout prix. Si l'intégration viet veut que je passe devant tout le monde au lieu de faire la queue, que je frôle une vielle dame dans la rue avec mon scooter au lieu de m'arrêter ou de ralentir pour la laisser passer, que je ne dise pas merci aux commerçants ou restaurateurs, alors je préfère être considéré comme un personnage arrogant qui refuse de m'intégrer. "A Rome on fait comme les Romain"... ok... et "A Auschwitz on fait comme les Nazis?". Bref c'était mon petit coup de colère mais la vie au Vietnam est en général beaucoup plus agréable et je ne veux vraiment pas retourner en France. Ceci dit, pour le reste, je tente de m'intégrer au mieux :)
  • Ebonie
    Ebonieil y a 10 ans(Modifié)
    Expérience intéressante que je souhaite à plein de français qui n'ont jamais voyagé et qui restent coincés dans leurs certitudes et leurs préjugés. Bon séjour à vous donc !
  • thang zen
    thang zenil y a 10 ans(Modifié)
    Cher J François, Et bien c 'est comme çà Un proverbe Vnien dit " les futés ou les ignorants meurent , seul celui qui sait survit ... et toi tu survit car tu SAIS s adapter au minimum a circuler entre les essaims de velomoteurs et bientot les automobiles ...
  • hoankiem
    hoankiemil y a 10 ans(Modifié)
    Bonjour, Très très intéressant, très bien analysé, correspondant à peu près en tout à ce que j'ai pu vérifier.dans mes séjours courts, et maintenant à quatre cinquièmes de temps .... Evidemment, j'ai la chance d'avoir le traducteur instantané (ou presque car à Saigon... ce n'est plus de l'hanoïen..) et ça aide considérablement à éviter les impairs, les choses non compréhensives vues avec notre optique européenne...qu'il faut oublier dès que l'on peut.. - Ce m'a fait bien plaisir de vous lire : je vois que nous sommes passés par les mêmes surprises à l'origine (ôte toi de là que je passe lol) les mêmes méfiances : on a beau vivre avec eux, comme eux, ce ne sont pas les mêmes règles pour l'éducation.... pour l'argent ou les associations.... mais dans l'ensemble, une fois "formaté" à la vietnamienne, je trouve que le bénéfice est supérieur au passif. et que leur manière de vivre nous rend beaucoup plus ouverts et heureux par rapport aux autres, que quelque part, contrairement à une idée reçue, ils me semblent plus simples, plus famille, (même si ....:-(() le gros point noir pour moi, et ça me console de voir aussi encore un peu pour vous, c'est l'apprentissage de la langue : bien sur je baragouine.... mais que c'est difficile - .. je pense qu'il faut être né ici pour être capable d'avoir l'esprit qui va avec les tournures de cette langue - mais ce n'est que mon avis.... Quant à troi oi.... moi aussi je le dis relativement facilement, mais à la base je l'avais entendu traduit par "oh mon Dieu"... applicable en toutes circonstances de contrariété, petit souci, petit incident, mais pas comme petit juron.... Voiià, contente vraiment d'avoir lu votre blog...merci bonne continuation, ... et bientôt bon Têt du Cheval... - que l'année vous soit toujours favorable et agréable - Hoankiem

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