Pourquoi as-tu choisi de t'installer à Hanoï ?
J'ai d'une part toujours voulu visiter le Vietnam afin d'en apprendre plus sur une culture dont vient une partie de ma famille, mais que je connaissais finalement peu. Et j'ai d'autre part longtemps rêvé d'une expérience de plusieurs mois à l'étranger, afin de vivre l'expérience d'"expatriée". Jusqu'à maintenant je n'avais pu faire ni l'un ni l'autre.
Et puis l'occasion s'est présentée l'année dernière. Je ne pensais pas forcement combiner ces deux rêves ensemble, vivre plusieurs mois quelque part et visiter le Vietnam. Mais je suis très heureuse que cela se soit présenté ainsi, d'autant plus que mon grand-père, qui venait du Nord, a été le premier de ma famille vietnamienne à quitter le Vietnam pour venir en France. Comme je suis la première parmi les générations suivantes à y revenir pour y vivre, c'est comme si la boucle était bouclée...
Quelles ont été les formalités que tu as dû accomplir pour venir au Vietnam ?
En ce qui concerne le visa, c'est l'entreprise d'accueil qui a fait une demande, en joignant une copie de mon passeport. Quelques jours plus tard, je recevais une lettre d'invitation, à présenter à l'aéroport d'arrivée. J'ai pu y récupérer mon visa moyennant quelques dizaines de dollars.
J'ai également été soucieuse du volet santé qu'implique un tel séjour : vaccins et rappels, check-up chez divers spécialistes (ophtalmo, dentiste...), ainsi que l'adhésion à une assurance voyage conçue spécialement pour les étudiants comme moi qui font un séjour à l'étranger.
Le total des préparatifs a été un petit casse-tête, et je conseille à tous de faire des tas de listes pour s'en sortir sans trop de mal.
Comment s'est passée ton installation ?
J'ai eu la chance d'avoir été accueillie par une jeune française qui connaissait une de mes amies. Elle m'a beaucoup aidée à apprivoiser la ville et m'a hébergée les premiers jours. J'ai pendant ce temps cherché un autre logement. Malheureusement cette recherche a été plus longue et compliquée que prévue ; tout va très vite et il faut prendre des décisions rapidement. Pas facile lorsqu'on est indécise comme moi ! Les coups de malchance arrivent également dans ce type de démarche, et on peut voir un superbe logement vous passer sous le nez...
Comment as-tu trouvé un stage à Hanoï ? Des conseils à partager avec les autres membres ?
J'ai pu trouver un stage à Hanoï par le biais d'une rencontre avec une personne qui connaissait bien cette ville. Je lui ai parlé de mon souhait de faire une expérience à l'étranger, et elle m'a dirigée vers une entreprise qui recrutait des stagiaires de temps en temps. Un énorme coup de chance.
Je n'ai donc pas de conseils particuliers à donner, à part peut-être rester alerte et ouvert d'esprit sur les opportunités qui peuvent se présenter, quelles qu'elles soient...
As-tu eu des difficultés d'adaptation (barrière de la langue, coutumes) ?
J'ai toujours l'impression de mettre un peu les pieds dans le plat, et je pense qu'il est facile de faire des erreurs dans ses interactions sociales avec les Vietnamiens. Il est par exemple difficile de savoir saluer correctement ses interlocuteurs en vietnamien, étant donné la diversité des pronoms possibles, qui correspondent chacun a un statut hiérarchique différent.
Le fait que mon visage comporte des traits asiatiques accentue parfois ces complications car il arrive que des Vietnamiens attendent de moi que je parle leur langue ou que je connaisse leurs coutumes. Mais je ne me plains pas, les Caucasiens ont d'autres soucis (dont celui d'être toujours alpagué par des "Hello" dans la rue).
J'ai eu aussi pas mal d'hésitations sur le fait de savoir comment respecter au mieux les traditions du Têt, notamment sur la question des cadeaux et des étrennes.
Qu'est-ce qui t'a le plus surpris à Hanoï ?
Le tout premier contact sensoriel avec la ville. Celui-ci peut être perçu comme étant assez agressif, surtout dans le vieux quartier. Aucune photo ou vidéo sur Internet ne peut vraiment vous préparer à ça. On s'en prend plein la vue, les oreilles (les klaxons semblent fêter un mariage perpétuel), et même le nez (odeurs entêtantes d'essence que l'on ne voit sur aucune photo). Les mouvements sont entravés par la nécessité d'éviter les véhicules...
On ne comprend la "douceur de vivre" hanoïenne dont les Vietnamiens parlent qu'un peu plus tard, quand on est habitué et qu'on a pu explorer la ville.
Les Vietnamiens sont-ils accueillants ? Est-il facile de s'intégrer et de faire de nouvelles connaissances ?
En général, oui, les Vietnamiens ont vraiment le sens de l'hospitalité et peuvent se plier en quatre pour vous, alors même que vous ne parvenez pas à aligner deux phrases pour communiquer avec eux. Après, si on ne parle pas la langue, on ne peut faire vraiment connaissance qu'avec une certaine partie des Vietnamiens, c'est à dire ceux qui ont eu la chance d'apprendre l'anglais voire le français. Il y a donc nécessairement un biais social. Pour le moment je réussis à passer de bons moments avec des locaux qui sont très avenants. De la à parler d'amitié ou de relation plus profonde que de la camaraderie, seul le temps nous le dira.
Peux-tu partager avec nous un trait caractéristique de Hanoï qui te plaît particulièrement ainsi qu'un aspect négatif ?
J'aime l'aspect de la ville, ses arbres et ses nombreux lacs, et son côté préservé et un peu foutraque qui lui donnent beaucoup de charme. Malgré la folie de la circulation, on peut trouver beaucoup de plaisir à juste s'y promener.
Ce qui me plait moins au quotidien est le stress que l'on peut parfois ressentir en traversant des rues très denses en heure de pointe, ou quand on se fait arnaquer, en en ayant conscience, mais en ne pouvant rien y faire.
Une idée reçue sur le Vietnam qui s'est avérée totalement fausse :
L'image d'un pays où tout le monde porte des chapeaux coniques et des longs pantalons de soie comme dans le film «Indochine»... Le nouveau couvre-chef ici serait plutôt le casque (ou plutôt, casquette recouverte de plastique) de moto.
Qu'est-ce qui te manque le plus par rapport à la France, ton pays d'origine ?
C'est très banal, mais je dirais ma famille et mes amis. Fort heureusement, Internet et les appels vidéo sont très accessibles. C'est simple, je communique avec mes proches plus souvent d'ici que quand j'étais en France. Si j'étais partie il y a quelques années, lorsque ces technologies étaient moins répandues, cela aurait été beaucoup plus difficile pour moi.
A quoi ressemble ton quotidien à Hanoï ?
Je me lève assez tôt, ou en tout cas j'essaie. Je suis en stage, en centre-ville, à peu près entre 8h30 et 18h. Le midi, j'essaie de manger dehors pour pas trop cher et en profite pour me promener autour de mon lieu de stage et explorer. Le soir, je mange seule ou avec des amis, je skype, je blogue, je potasse mon vietnamien. Pour le week-end, je me renseigne sur Internet (hanoigrapevine, TNH, Hanoï Massive sur Facebook...) pour savoir ce que je peux faire. J'adore tester des restaurants que je ne connais pas, alors il y a de quoi faire ici.
Comme je ne me sens pas à l'aise pour conduire une moto, la plupart de mes déplacements sont conditionnés par leur coût en taxi ou moto-taxi. Je compte tester le bus dès mon futur emménagement.
Que fais-tu pendant ton temps libre ? Quelles sont les activités les plus populaires à Hanoï ?
J'ai vite compris que si on veut se faire des connaissances à Hanoï, il n'y a rien de mieux que d'évoluer dans deux domaines universels : la musique et la bouffe (deux choses que j'adore). J'ai été adoptée par un groupe de musique franco-vietnamien avec lequel je répète une fois par semaine, pour préparer un concert par mois. J'essaie de multiplier les moyens de jouer de la musique, en participant à des scènes ouvertes par exemple. Je compte aussi profiter des studios d'enregistrement qui sont ici beaucoup plus abordables qu'en France.
Ma deuxième activité est on ne peut plus banale : tester des restaurants, du plus chic au plus street, seule ou avec des amis. J'aime aussi tout simplement me promener (j'ai encore beaucoup à découvrir) et essayer de faire du shopping, malgré les difficultés de cette activité.
Le seul loisir vraiment populaire que j'ai testé à Hanoï, c'est le karaoké. Si vous voulez tester, prévoyez vos bouchons d'oreille, car ils ne lésinent pas sur les décibels !
Pourquoi as-tu créé ton blog, Le petit carnet de Daphné Xuan ?
C'était à la base pour garder contact avec mes proches sans devoir répéter à chaque fois, par des mails séparés, tout ce que je vivais sur place. Je l'écris de façon à ce que cela soit le plus immersif possible, pour vraiment donner une idée de ce que je vis.
Et puis au bout d'un moment, j'ai décidé d'ouvrir mon blog un peu plus vers l'extérieur, car je me suis dit que lorsque j'écumais des sites Internet sur les expériences d'expatriés à Hanoï avant de partir, j'aurais bien voulu voir plus de témoignages concrets, pas forcément les jolies photos que l'on voit partout. Si ce que j'écris peut permettre à de futurs expatriés grands angoissés comme je l'étais de mieux appréhender leur voyage, ou tout simplement de donner envie aux lecteurs de se rendre au Vietnam, alors tant mieux.
Quels conseils peux-tu donner à ceux qui veulent s'installer à Hanoï ?
Difficile à dire, après seulement un mois ici... Je dirais tout simplement ceci : venir en toute humilité, et accepter d'avoir l'air stupide. Il y aura des tas de situations dans lesquelles on se sentira vraiment bête, ou alors dans lesquelles on se rendra compte qu'on est un peu pris pour l'idiot du village. C'est une réalité dont il faut avoir conscience et qu'il faut accepter, et ceci est bien préférable à l'attitude qui consisterait à venir ici en conquérant.
Du coup : restez zen, gardez confiance en vous, ayez du recul et riez de ce qui vous arrive... C'est, je crois, la meilleure façon de goûter à la culture vietnamienne !