Vous vous lancez dans l'investissement immobilier à l'étranger, convaincu par la solidité du marché. Malgré la crise, investir dans la pierre reste effectivement une valeur sûre. Mais gare à bien respecter les règles en matière fiscale. Comment s'assurer de respecter les règles ?
Attention à « l'immobilier offshore »
On connaît les sociétés offshore, entreprises vitrines enregistrées dans un pays fiscalement avantageux, et dont le seul but est l'optimisation des revenus. Il faut ici distinguer l'optimisation fiscale de la fraude fiscale. L'optimisation fiscale consiste à diminuer les charges fiscales pesant sur une entreprise, pour lui permettre d'être plus performante et compétitive. Les particuliers sont aussi nombreux à y avoir recours. L'optimisation fiscale est un dispositif créé par l'État pour alléger les impôts. À l'opposé, la fraude fiscale est illégale. Elle consiste à mettre délibérément en place des actions pour illégales pour payer moins d'impôts, blanchir de l'argent, dissimuler des pratiques commerciales frauduleuses, etc.
L'immobilier offshore se calque sur les pratiques des sociétés offshore. Problème : on assiste depuis plusieurs années à une recrudescence de zones plus ou moins grises, avec un basculement vers l'illégalité. Dans son apport publié le 23 octobre, l'Observatoire européen de la fiscalité alerte sur cet immobilier offshore dont le but n'est plus l'optimisation fiscale, mais bien l'évasion fiscale.
Les biens immobiliers à l'étranger doivent être déclarés
Acheter à l'étranger pour échapper au fisc ? Certains y pensent. Mais la législation, partagée par la plupart des États, est formelle. Tout bien immobilier acquis doit être connu de l'administration fiscale. C'est vrai pour les logements acquis dans le pays de résidence. C'est aussi vrai pour ceux achetés à l'étranger. Certains États prévoient des impôts spécifiques, comme l'impôt sur la fortune, qu'il faudra payer. Si le propriétaire perçoit des loyers, il sera tenu de payer des impôts.
Les États peuvent échanger des informations fiscales
L'Observatoire européen de la fiscalité rappelle que l'immobilier échappe à « l'échange automatique d'informations bancaires adopté en 2017 par une centaine de pays ». Mais les choses s'accélèrent. En juin 2023, le Maroc lance un projet de loi sur l'échange automatique de renseignements financiers avec les pays de l'OCDE. Il faudra cependant du temps avant que le projet ne voie le jour. D'après la presse marocaine, l'État aurait repoussé à 2025 son intention d'échanger les données fiscales, immobilières et bancaires avec l'OCDE.
Mais d'autres États pratiquent l'échange d'information depuis longtemps. En 2014, les États-Unis ont lancé le Foreign Account Tax Compliance Act (FATCA), qui permet l'échange automatique d'informations financières. Il faut remonter à 2012 pour constater un intérêt croissant des États pour le partage de renseignements. L'affaire des Panama Papers (vaste scandale d'évasion fiscale d'envergure mondiale) a renforcé la coopération des États pour lutter contre la fraude fiscale. D'après Observatoire européen de la fiscalité, les échanges automatiques de données ont permis de diviser par 3 les évasions fiscales, en moins de 10 ans.
Ces dernières années, l'Union européenne (UE) est particulièrement active pour traquer les fraudeurs (fin du secret bancaire, liste noire des paradis fiscaux…). Elle a acté dès 2013 la fin du secret bancaire pour tous les États membres. Une décision également appliquée en Suisse. Mieux vaut donc agir en suivant les règles et déclarer tout achat fait à l'étranger.
Connaître la loi de son pays
On pense encore souvent qu'acheter un bien dans un paradis fiscal permettra de passer sous les radars. Cette idée fausse s'appuie sur l'idée que l'argent placé à l'étranger n'est pas imposable. Mais nombre de législations rappellent qu'un résident fiscal doit payer des impôts sur tous ses revenus : ceux de son pays de résidence fiscale, et ceux perçus à l'étranger. Il convient donc de se renseigner sur le droit applicable dans son pays avant de se lancer dans un projet d'investissement avec des idées fausses.
De même, il convient de se renseigner sur le droit du pays dans lequel on investit. A-t-il signé une convention fiscale avec le pays d'origine ? Tous les types de biens sont-ils achetables par les étrangers ? Existe-t-il des lois qui interdisent ou restreignent les achats ?
S'entourer de professionnels
La crise sanitaire a créé un nouvel appel d'air. Les offres prétendues alléchantes se sont répandues sur Internet. Elles promettent de juteux revenus grâce aux logements achetés à l'étranger. Logements qui, le cas échéant, pourraient devenir des résidences secondaires. L'acheteur n'a pas à se déplacer. Tout s'effectue en ligne. S'il existe des agences sérieuses ayant développé leur business en ligne, d'autres ont des pratiques plus discutables.
On conseille toujours de préférer les investissements immobiliers dans un secteur proche de chez soi, dans un secteur que l'on connaît, ou dans lequel on pourra se rendre. Car une visite physique vaut souvent mieux qu'un « room tour » virtuel. Dans quel quartier se situe votre bien ? Est-il près de la mer ? La zone de construction est-elle viable ? Se rendre sur place permet également de mieux apprécier la valeur du bien. Si le déplacement est impossible, la prudence sera double.
Autre conseil : s'entourer de professionnels, et dans le pays d'investissement, et dans son pays. Les lois sont complexes. Solliciter des professionnels de l'immobilier et du droit offre davantage de garanties. On est sûr de respecter les règles dans le pays d'investissement et dans son pays. On recommande toutefois d'éviter d'investir dans un État dont on ne comprend pas du tout la langue ou qu'on ne connaît pas du tout. Si les professionnels sont là pour conseiller l'acheteur, l'acheteur doit lui aussi être en mesure de se renseigner. S'il préfère déléguer sa gestion de patrimoine, l'acheteur peut se tourner vers une entreprise de gestion locative.