Les aspects juridiques de la succession pour les retraités expatriés

Père et fils
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Actualisé par Helena Delbecq le 18 juin, 2024

Être retraité à l'étranger est une perspective des plus réjouissantes : profiter d'un autre cadre de vie, se faire de nouveaux contacts, découvrir une autre culture, entre autres.

Il convient cependant d'envisager tous les aspects pratiques d'une expatriation, en particulier la question d'un éventuel décès à l'étranger. Que se passe-t-il dans ces cas-là ? Quelle règle s'applique en matière de succession ? Mieux vaut avoir les idées au clair afin de prendre toutes les dispositions qui s'imposent et vivre pleinement son séjour à l'étranger.

Qui est concerné par une succession internationale ?

Une succession internationale s'applique à une personne qui décède :

  • dans un pays différent de celui de sa nationalité ou de son lieu de résidence ;
  • ou qui laisse des biens dans un pays différent de celui de sa nationalité ou de sa résidence.

Par exemple : vous êtes citoyen français, mais vous vous installez en tant que retraité en Espagne. Votre nouveau pays de résidence est l'Espagne. Vous serez concerné par une succession internationale dans la mesure où vous êtes citoyen français.

Autre exemple : vous vivez en France et passez quelques mois tous les ans au Maroc où vous possédez des biens. Il s'agit également d'un cas de succession internationale.

Qu'est-ce que le règlement européen en matière de successions internationales ?

En tant que citoyen français expatrié dans un autre état de l'Union européenne (UE), c'est le règlement européen qui fait référence depuis 2015 pour traiter les situations de successions internationales.

Que dit le texte ?

Il convient tout d'abord de déterminer quelle est la dernière résidence habituelle du défunt au moment du décès.

En effet, au sein de l'UE, on applique en matière de succession la réglementation de l'état de dernière résidence du défunt.

Prenons le cas d'un Français qui vit 2 mois par an au Portugal et le reste de l'année en France. Si un décès a lieu au Portugal, on établira en principe la résidence habituelle du défunt en France et non au Portugal. Le défunt résidait en effet la majeure partie du temps en France. La succession sera donc traitée par la loi de l'état français.

Prenons maintenant l'exemple d'un Français décédé en Allemagne et installé toute l'année dans ce lieu de résidence. La succession sera alors traitée par la loi allemande.

En cas de résidence habituelle difficile à déterminer

Il est parfois difficile de définir le lieu de résidence habituelle d'une personne. Certains retraités par exemple vivent entre deux pays, passant à peu près la moitié de l'année dans chacun de ces deux lieux. Dès lors, comment déterminer le lieu habituel de résidence ?

Il convient alors d'examiner l'ensemble des circonstances de la vie du défunt afin de mettre à jour un lien plus étroit avec l'un des deux états concernés. Il s'agira par exemple de déterminer la régularité et la durée de la présence du défunt dans un lieu de résidence donné. Avait-il réalisé un investissement immobilier ? Où les caisses de retraite lui versaient-elles sa pension ? On pourra également prêter attention aux conditions et aux raisons de sa présence dans un état donné.

Si la situation n'est toujours pas claire, il faudra vraisemblablement recourir à des services juridiques compétents en la matière (avocats).

Précisons que la résidence se comprend au sens du lieu où demeurait le défunt et non du lieu de son domicile fiscal. En effet, un retraité peut être résident fiscal français tout en vivant la majorité de son temps ailleurs à l'étranger. Tout dépend de la nature des conventions fiscales signées entre la France et l'autre état concerné.

Que se passe-t-il dans un pays tiers à l'étranger, non soumis au règlement européen ?

Si le défunt expatrié résidait ailleurs, en dehors d'un état membre de l'UE, il conviendra de se référer aux principes, usages et conventions des législations d'États dont dépendait la personne concernée. Il faudra alors avoir recours aux règles de droit international privé.

Il existe aussi des accords internationaux ou bilatéraux entre états en matière de fiscalité et de succession notamment. Il conviendra alors de s'y référer pour savoir comment traiter la succession.

Autant dire que dans ce cadre, la question de la succession pour un héritier est rendue bien plus complexe que dans le cadre européen. Il faudra peut-être vous faire conseiller par un avocat.

Vous pouvez également prendre des dispositions pour que votre succession soit traitée par la loi française.

Est-il possible de choisir la loi applicable à la succession ?

Pour un Français résidant à l'étranger, il est possible de choisir la loi de sa nationalité s'il souhaite que celle-ci s'applique à la succession.

Par exemple : la succession d'un Français ayant sa résidence habituelle au Portugal devrait être traitée par le Portugal selon le règlement européen. Cependant, le défunt peut expressément désigner la loi française comme celle qu'il souhaite voir appliquer à sa succession.

Il convient pour ce faire de mentionner explicitement ce choix dans un testament.

Que se passe-t-il quand les biens sont répartis dans plusieurs pays ?

La situation n'est pas toujours simple même quand la résidence habituelle du défunt est clairement établie. En effet, si des biens sont répartis dans plusieurs états, en particulier des biens immobiliers, cela peut entraîner des complexités dans la gestion de la succession.

Prenons l'exemple d'une personne de nationalité française ayant sa résidence habituelle en Italie et décédée dans ce dernier pays. Admettons que le patrimoine de cette personne se compose de biens immobiliers en France et en Italie.

La loi italienne est applicable à la succession puisque la personne avait sa résidence habituelle dans le pays au moment du décès. Cependant, concernant les biens immobiliers, le notaire italien n'a compétence que pour les biens situés en Italie. Pour ceux en France, les héritiers devront traiter avec un notaire français qui reste le seul compétent en la matière.

Quelle est la fiscalité applicable à la succession internationale ?

Quel est le délai pour effectuer la déclaration de succession ?

En France, en dehors d'un cas de succession internationale, les héritiers ont 6 mois pour effectuer une déclaration de succession.

Dans le cas d'une succession internationale, les héritiers disposent de 12 mois à compter du décès.

Pour rappel : une déclaration de succession est à envoyer aux services fiscaux qui calculent si vous devez payer des impôts sur la succession. Vous êtes dispensé de cette déclaration de succession dans certains cas. Consultez sur ce point le site du service public.

Où est taxée la succession dans le cadre d'une succession internationale ?

Les successions sont taxées dans le pays où elles ont été réglées.

Ainsi, si vous avez hérité de votre parent français dont la résidence habituelle est située en Belgique, vous paierez les droits de succession à l'État belge, selon la loi en vigueur dans le pays.

Risque-t-on d'être imposé deux fois lors d'une succession internationale ?

Il convient de se référer aux textes et aux différentes dispositions des conventions fiscales entre la France et le pays où vous devez payer vos droits de succession.

Ces conventions prévoient des dispositions pour éviter que vous ne soyez doublement taxé en matière d'impôts sur les successions.

Si la France n'a pas signé de convention bilatérale avec le pays où vous avez dû vous acquitter d'un impôt sur les successions, vous risquez d'être doublement imposé.

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