N’ayons pas peur de nous rassembler !
Je n’ai pour ma part, pas hésité de rejoindre de nombreux bruxellois, rassemblés place de la Bourse, mardi 22 mars, soir, pour marquer notre solidarité. Se rassembler pour ne pas céder à la peur et prouver que le monde ne se réduit pas à un théâtre sur lequel certains fous de dieu confectionnent des bombes avant de succomber emportés par la mort. C’est aussi, au milieu de ces singularités jetés sur scène de la folie et de l’imbécillité, de la naïveté et de la barbarie, naïveté de gagner un pseudo-paradis en tuant un maximum d’innocents, barbarie d’un univers de feu et de sang : tant de sottise, si peu de noblesse, autant de cruauté, et la grandeur faisant tellement défaut ! Face à leur barbarie naturelle, il est urgent d’affirmer notre civilisation en créant des poches de résistance, en évitant de se faire la courroie de transmission de la négativité, en faisant savoir à autrui qu’il en va de même pour lui et qu’il peut lui aussi faire reculer les passions tristes ou l’immoralité…
Pourquoi participer à la minute de silence ?
J’entends dire d’ici de-là que ce qui est gênant, c’est que la minute de silence soit imposée. C’est pourtant l’occasion de faire un certain type d’expérience, comme la mise entre parenthèses du manque : c’est ce que j’appelle la plénitude. C’est le fait de ne plus rien désirer d’autre que ce qui est, le recueillement en l’occurrence. C’est faire l’expérience de la mise entre parenthèses du langage : le silence. Les mots ne sont plus 1à pour s’interposer entre le réel et nous. C’’est expérimenter la mise entre parenthèses de la dualité, de l’altérité, de la complexité. Ce que j’appelle la simplicité ou l’expérience de l’unité. Cette minute de silence nous fait sentir que nous sommes des êtres finis.
Le silence s’impose quand la rhétorique des mots semble perdue.
Le silence s’impose pour partager quelque chose, ne serait-ce que le chagrin.
Le silence s’impose pour entendre nos cœurs battre, et, dessous, l’absence de ces cœurs qui ne battront plus.
Le silence s’impose pour écouter la musique du spleen qui nous habite.
Le silence s’impose pour instaurer une pensée qui nous respecte tous, croyants ou incroyants.
Le silence s’impose pour créer entre nous une complicité, pour se sentir concerner, pour nous retrouver malgré tout dans un monde malheureux et blâmable de l’être.
Le silence s’impose pour constituer une même humanité.
Bref, la minute de silence, c’est le moment où le sort des autres m’importe plus que moi-même. Je deviens humain quand je m’abstrais de la considération de mon bien-être pour prendre le sort des victimes en considération et cette compassion doit s’exprimer indépendamment de ma nationalité, de ma culture, de ma communauté, de mon groupe d’appartenance. À côté de telles expériences, les activités prosaïques sont peu de chose !
Peut-on combattre, Daech avec des arguments, ou avec des bombes ?
Daech est un mouvement irrationnel. Daech est une idéologie haineuse, dont le choix relève du libre arbitre, et dont les partisans ont juré la destruction de l’Occident. Peut-on combattre, Daech avec des arguments, ou avec des bombes ? Je souhaiterais que les musulmans, les vrais, qui pratiquent en paix leur religion, et sont pris en otage par ceux qui ne savent parler que le langage de la mort violente, prennent leur distance avec ces barbares. Je sais que certains le font déjà, mais il faut toujours recommencer, nous n’avons pas le choix que de résister à cette lèpre. Je souhaiterais au fond, qu’ils soient nombreux à affirmer que le besoin d’une foi puissante n’est pas la preuve d’une foi puissante, c’est plutôt le contraire. Si mes frères musulmans font le constat que le problème du fanatisme et l’origine de sa violence, c’est son impiété. Alors, ils pourraient dire que les intégristes, ce sont d’abord les impies ! De toute évidence, l’’’état islamique’’, c’est la mort de dieu. En effet, pour Daech, l’islam tel que ces barbares le conçoivent, est une religion qui a besoin d’être secourue, c’est-à-dire de leur point de vue, une religion faible. On pourrait même dire, quand on analyse leurs faits, leurs revendications, que pour eux, Allah est un dieu impuissant, un dieu d’impuissance, qui a besoin d’un coup de main pour conquérir son pouvoir. Il est donc parfaitement clair que non seulement les intégristes dénaturent l’islam, mais méprisent l’islam. Dire que Dieu a besoin de soldats, c’est parler de Dieu comme si Dieu n’était qu’un homme, c’est insulter Dieu, en parlant de Lui, comme d’un seigneur vaniteux, qui n’aurait pas les moyens de ses ambitions. Celui qui massacre au nom de Dieu, n’agit pas au nom de Dieu, mais à sa place, il se substitut à Dieu. Les soldats de Daech sont des orgueilleux, ils célèbrent Dieu, tout en se prenant pour Lui, ce qui est contradictoire.
Bien cordialement,
Philia