Récit : 2024, ROAD TRIP EUROPÉEN POUR MES 80 ANS.
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Bonjour. Ces lignes ne sont pas un récit touristique ou gastronomique tel qu’on le conçoit communément. Ce ne seront qu’un regard serein sur les couleurs qui défilent, qu’une respiration des odeurs qui passent. Tout simplement les réflexions, les étonnements, les émotions de quelqu’un qui a beaucoup vu, entendu, lu, vécu…
- 1 - « Road trip » ? Qu’on me pardonne cet anglicisme, mais je l’ai choisi parce qu’il fait imaginer aussitôt une longue route pour l’aventure, le changement, la découverte… et qu’en effet ce fut bien ce qu’elle fut pendant deux mois : une longue boucle de 7.244 kilomètres. Espagne, France, Allemagne, Pays-Bas, Belgique, France, Espagne.
À présent, hasard d’un rapprochement familial, je vis au sud de l’Espagne, sur la Costa del Sol, d'où cet extrême sud de l’Europe comme départ.
Remontons dans le temps. Je rêvais d’aller au Québec afin de découvrir les immensités de l’Amérique du nord. Il y a une dizaine d’années, quand enfin les circonstances me permirent d’y songer réellement, je pris contact avec des organisateurs. Comme je l’avais vécu tant de fois, en pleine nature, en France dont je suis originaire, je souhaitais me déplacer seule : Aucun n’accepta la prise en charge de ce road trip solitaire.
J’ai alors envisagé d’étudier moi-même un parcours, les étapes locales, de louer une voiture appropriée et la fourniture du nécessaire.
Ce fut alors la découverte d’une interdiction qui sans doute avait motivé les échecs rencontrés : Aucune société de location de véhicules n’acceptait de louer à un conducteur principal âgé de plus de 65 ans !
J’ai proposé la fourniture d’un certificat médical, de prouver le récent renouvellement (obligatoire en Espagne) de mon permis de conduire, d’accepter une augmentation du contrat d’assurance. En vain.
Changer de destination ? Inutile ! Mêmes interdictions non seulement au Canada mais partout dans le monde. Je ne pourrais plus jamais louer de voiture ! Le choc fut terrible. C’était m’interdire désormais tout voyage lointain individuel comme j’aurais aimé l’envisager. Ma profonde déception fit place à la colère, puis à la rage. « Ah, je ne suis plus capable de conduire ? On va voir ! »
Puisqu’aller au-delà des océans m’était refusé, je resterai sur terre. Après tout, la diversité des paysages d’Europe pouvait bien rivaliser pour me satisfaire.
Voici la suite du projet, finalement concrétisé en 2024.
J’ai aimé annoncer que c’était pour marquer l’année de mes 80 ans, mais en réalité, à l’origine, le départ de ce grand voyage, préparé soigneusement pendant deux ans, était programmé pour mai 2020. Mais…Oh, non ! Covid !
Décidemment mes projets étaient bien contrariés !
Restrictions encore en 2021. En 2022, trop déçue, je n’y croyais plus. Puis en 2023, « Allez courage ! me suis-je dit. Établis un nouveau parcours pour l’année prochaine pendant que tu es encore en forme ! »
Ainsi fut fait. Plus facilement car j’avais les connaissances de l’étude précédente. Mais une route plus courte avec moins de pays en supprimant l’Italie, l’Autriche et la Tchéquie, soit un mois en moins sur les trois prévus plus tôt. Initialement, partant de l’extrême sud, j’avais un but marquant le sommet nord du parcours : Hambourg. Je souhaitais y visiter le « Miniatur Wunderland », extraordinaire exposition permanente de maquettes ferroviaires. Mais j’ai dû y renoncer pour ce second projet, faute de trouver un hébergement d’un prix abordable s’ajustant à mes dates de passage.
Comme compensation j’ai alors pensé m’offrir des fleurs. Ainsi les Pays-Bas devinrent ma nouvelle destination afin d’y admirer les immenses champs de tulipes près d’Amsterdam,
Inconvénient : leur floraison est précoce et brève, au plus tard début mai. J’ai dû calculer de partir tôt en avril pour me laisser le temps de flâner en chemin avant d’y parvenir, mais j’ai aussi croiser les doigts pour une météo favorable pendant le printemps à venir, saison qui, au fil des années, n’avait plus de réel que le nom.
Lors de mon premier projet routier, j’avais échangé ma petite voiture qui datait, contre une plus fiable, techniquement moderne, afin d’écarter de fâcheuses pannes. Encore récente, j’étais donc tranquille à ce sujet. Suprême sécurité, j’avais remplacé la roue de secours temporaire par une cinquième roue identique aux quatre autres, et ajouté gonfleur et cric électriques pour ménager mes éventuels efforts en toutes circonstances. Un jerrican d’essence, un extincteur (obligatoire), un gyrophare, etc., les complétaient : le top !
Je m’étais procuré les vignettes de circulation pour les pays traversés, tout en étudiant leurs réglementations. Mon parcours était bien étudié. Chacune de mes étapes, réservées, devaient m’offrir un confort sans luxe mais essentiel, sans oublier un parking assuré pour garer ma voiture sans m’exaspérer, ni surtout craindre pour la partie du contenu qui forcément resterait à l’intérieur.
Partir à l’aventure ne signifie pas se livrer au hasard. Les explorateurs, les vrais aventuriers savent combien il est indispensable de préparer son matériel, quel qu’il soit, selon les conditions supposées, pour affronter l’inconnu qui les attend.
Je conduis depuis bien des années, ayant de long en large parcouru la France. Je suis en bonne santé qu’un examen médical a confirmée, cette escapade est raisonnable. La solitude ? Elle est pour moi une amie de longue date qui m’a appris à assumer et résoudre les difficultés. Là encore, pas de problème.
Parlant parfois de ce projet, j’ai souri autant aux expressions inquiètes des personnes pessimistes qu’aux froncements de sourcils des critiqueurs ou qu’aux encouragements des enthousiastes. Oui, j’étais – je suis – une femme indépendante, et même originale plus qu’on ne peut l’imaginer… Depuis toujours, et pour toujours.
Á propos d’originalité…
Autrefois j’étais une grande marcheuse, une randonneuse estivale par monts et par vaux qui ne comptait pas les kilomètres. Mais avançant en âge, mes belles promenades sont devenues éprouvantes, difficilement supportées par mes articulations. Peu à peu, sans vraiment y réfléchir, j’ai délaissé les balades habituelles pour plutôt m’installer confortablement dans des endroits agréables et ombragés, me protégeant ici du brûlant soleil andalou pour lire, ou dessiner, ou parfois simplement rêvasser… Jusqu’au jour où je me suis révoltée contre cet engourdissement ».
S’il était vrai que mon installation en Espagne m’avait obligée pendant des mois à beaucoup d’efforts physiques pour accomplir de gros travaux, je m’étais assez reposée, non ? Je n’admettais pas, ou plus, de me laisser aller. J’aimais encore parcourir longuement les bords de mer et autres lieux plaisants de la nature, que j’avais à ma portée. Mais comment faire si marcher était désormais éprouvant ? Si quelques centaines de mètres et retour ne me suffisaient pas ?
L’idée d’une assistante, qui n’était pas alors encore bien connue, me traversa l’esprit : Pourquoi pas une patinette ! J’en avais remarquée auprès de bicyclettes auxquelles j’avais d’abord pensées mais que j’avais écartées pour une raison pratique.
En effet, j’habite dans un petit village de montagne, isolé et escarpé, aux alentours ravagés par la dantesque création millénaire de ces lieux dans l’alignement de la Sierra Nevada. Une voiture est indispensable pour descendre jusqu’aux villes côtières afin de s’approvisionner et vaquer aux diverses activités nécessaires. Or un vélo n’entrerait pas dans ma petite auto. Petite, parce que l’étroitesse de ma ruelle ne permet pas davantage. Moins encombrante, une patinette se plierait facilement, et en cas de chute… je tomberais de moins haut !
Quoi ? Ridicule, à soixante-dix printemps passés ? Pas du tout en habillant une silhouette encore acceptable tout en noir, comme le sont souvent les patineurs sur roulettes, et les cheveux bruns sous un casque et des lunettes n’attirant pas l’attention !
Ainsi déterminée, équipée de toutes les protections possibles, je me suis lancée sur un engin sans moteur pour un apprentissage. Les premières fois, pour des petits trajets, je fus plutôt tremblante. Puis je m’enhardis si bien que l’année suivante j’acquis un modèle à moteur. Ah, quelle liberté ! Quel plaisir ces découvertes de pistes tranquilles, de parcs d’agrément dont je n’avais pas soupçonné l’existence en circulant en voiture !
Conduire une auto m’est facile et j’ai acquis un équilibre satisfaisant sur deux roues. Ainsi doublement motorisée, au cours de mon grand voyage, pendant les petits séjours prévus pour visiter certains lieux plus longuement, je me débarrasserai des difficultés de stationnement en milieu urbain, la majeure de mes préoccupations. Soit en restant garée sur mon lieu de logement, soit en repérant les vastes parkings excentrés comme base, je circulerai ensuite sur mon petit engin ! Un modèle à batterie amovible, facile ainsi à charger discrètement en chambre, et dont j’ai un double de rechange dans mon sac à dos !
Ainsi, au printemps 2024, oubliant les forêts canadiennes, le « parler » franco-québécois, mes déceptions, sans rien espérer ni craindre en particulier, mon cœur est léger pour accomplir un long périple routier en solitaire, à 80 ans...
A suivre...
Bravo, mille fois bravo pour votre courage et pour votre écriture fluide, limpide et surtout correcte.
Récit - SUITE 2. Petit road trip européen...
- 2 - Kilomètre ZERO. C’est parti !
De l’est de Malaga jusqu’à la France, ma route sur la côte méditerranéenne se fera en trois étapes d’une nuit : CREVILLENTE, après Murcia en direction de Elche ; VINAROS au nord de Valencia ; MAÇANET de la SELVA, au nord de Barcelona.
Rien de remarquable, je connais déjà l’Espagne du sud.
Me voici en France.
En roulant sur les autoroutes, j’éprouve une troublante impression dont je ne saisis pas bien l’origine. Et puis… Oui ! je sais ! Ce qui me surprend sont les hauts remblais verdoyants des arbres ! Je connais ces voies que j’ai parcourues de nombreuses fois. C’était il y a… Non ! Au moins cinquante ans ! Eh oui, un demi-siècle… J’ai gardé en mémoire les images des tronçons alors nouvellement tracés, leurs abords nus à perte de vue, dus aux imposants chantiers, des plantations encore naines, et qui ne poussèrent que lentement pendant mes déplacements.
À présent les arbres sont adultes, élancés, leurs branchages se mêlant les uns aux autres forment un corridor impénétrable. Il n’y a plus d’horizon alentour, seul défile devant moi le ruban de la chaussée. Les bâtiments sanitaires des haltes qui se repéraient de loin, seuls dans le paysage, ont disparu derrière les feuillages, entourés de bosquets et de fleurs. Considérant tout cela, l’émotion me gagne.
Nature traîtresse que j’aime tant, par ta croissance tu viens de me faire sentir pour la première fois le poids du temps envolé…
Peu à peu la température baisse, la pluie n’est pas rare.
CASTELNAU-de-GUERS, après Béziers, est la première des cinq étapes françaises d’une nuit. En repartant, je devais faire un détour pour aller voir le Viaduc de Millau, mais je me suis trompée d’itinéraire. Je ne m’en aperçois que déjà très éloignée, alors tant pis.
PERONNAS, dans l’Ain. Mauvaise surprise. Le studio joliment décrit dans sa présentation est tristement misérable. C’est très désagréable mais je présageais d’éventuels risques pour les locations auprès de particuliers. En souhaitant qu’il n’y en ait pas d’autres, je dois m’en contenter pour une nuit. Ma voiture est mieux logée que moi, petite consolation.
VESOUL. La chambre était annoncée « mini » et elle l’est vraiment ! Mais très propre et gaiement décorée, j’oublie la nuit de la veille.
Sur le chemin vers l’étape de ESSEY-les-NANCY, à Wingen-sur-Moder je m’offre un peu de luxe. Je visite le musée LALIQUE et ses trésors cristallins. Flacons, vases, vaisselles, lustres, bijoux. Quelles beautés ! Et je craque… Puisque 2024 est l’année du Dragon et de mes quatre-vingt ans : « Au diable l’avarice ! » je m’offre un pendentif de ce signe chinois pour mon anniversaire.
(Je souhaitais illustrer de quelques photos, mais je n'ai pas trouvé le code à appliquer.)
Arrêtée à une station-service, je découvre des pompes automatiques. Aucun personnel. Carte bancaire pour débloquer, un système que je ne connais pas. Ah, et c'est écrit en très petit sur l’écran, il faut comprendre ! Finalement j’y parviens. Mais dans la soirée, en vérifiant mon compte, je crois être victime d’une escroquerie ! Le débit s’élève à 120 euros, bien davantage que ce que j’ai programmé sur la machine ! D’ailleurs le ticket le confirme. Rien à espérer auprès de la banque puisque j’ai accepté un paiement. J’enrage ! Mais puisque c’est une enseigne pétrolière bien connue, le soir je fais des recherches sur mon téléphone mobile et finis par trouver une page où poster un message de réclamation. Je n’y crois pas trop, mais qui sait ? Dès le lendemain je reçois une réponse ! Laquelle m'explique que la somme de 120 euros n’est qu’une garantie provisoire sur mon compte bancaire, et que seul le montant réel de l’achat sera débité ultérieurement. Effectivement, je le constate quelques jours plus tard. Je rencontrerai encore cette méthode de paiement au cours de mon voyage, mais ces fois-là avec moins d’inquiétude.
A suivre...
Récit - SUITE 3. Petit road trip européen...
Plus je monte vers le nord, plus les conditions atmosphériques se dégradent. Même si je suis habituée au privilège méditerranéen, la température basse me semble un froid excessif. Heureusement, j’ai emporté de quoi me couvrir de la tête aux pieds et je n’en souffre pas.
Sur les autoroutes, puisque je ne suis pas pressée et que je sais devoir rouler pendant longtemps, ma vitesse dépasse rarement les 100 km/h. Cette vitesse raisonnable m’a fait qualifier les autres automobilistes de « troupeau ». Comme ils roulent tous au maximum, et se retrouvent donc ensemble, un troupeau qui me rattrape me dépasse, puis s’éloigne, et je me retrouve seule, tranquille. Puis, derrière moi, un autre troupeau me rattrape, me dépasse à nouveau, et la route redevient déserte me permettant d’apprécier le paysage.
Et je souris lorsque plus tard je les retrouve tous à un ralentissement obligé !
Parmi d’autres observations, j’ai noté le comportement des poids lourds, si nombreux. Ils sont utiles et même nécessaires. Mais tous roulent à la vitesse maximum autorisée, 130 km/h en France, 120 km/h en Espagne et ailleurs. Il en résulte que lorsque devant moi l’un m’aveugle, il m’est difficile de le doubler sans dépasser largement les vitesses autorisées. Et souvent, horreur ! En déboitant je constate qu’ils sont plusieurs à se suivre de près, sans me laisser la possibilité de me rabattre afin de dégager la voie pour les voitures plus puissantes qui sont arrivées derrière moi (le troupeau), et qui s’énervent à grands coups de phare malgré mon accélération !
D’autre part, j’ai remarqué aussi que ces professionnels de la route ne se font pas de cadeaux entre eux. Combien en ai-je vus, des énormes, l’un essayant de doubler le précédent, et celui-ci alors accélérant jusqu’à ce que le prétendant renonce et reprenne sa place de suiveur. Et dans tous les pays ils se ressemblent sur ce point. Mais… Suis-je bête, c’est logique puisque ce sont sans doute les mêmes qui y circulent !
La frontière franco-allemande se rapproche. Bientôt, OETING sera ma dernière halte française. Mais avant, j’ai une visite très spéciale à faire.
Je veux aller au Musée de la MINE, une exposition permanente érigée à l’intérieur même de l’une des dernières mines de charbon qui furent en activité. Il y a quelques années, un collectionneur expert en lampes anciennes, notamment de mineurs, m’a communiqué sa passion. L’occasion de mon passage dans la région est trop belle pour ne pas aller en apprendre davantage sur un site authentique.
Et de fait, non seulement j’admire des lampes exposées selon leur évolution dans le temps, car le musée témoigne de toutes les époques, mais je découvre aussi des maquettes des ensembles souterrains, des objets et le matériel spécifique aux différents travailleurs des fonds : les ingénieurs, les charpentiers, travailleurs du bois pour étayer les galeries, les charrieurs des wagonnets mécaniques ou à chevaux. Je touche des outils que d’autres mains ont assombri de sueur. J’évolue dans les lieux de leur vie quotidienne, en surface. Dans les vastes salles où ils se changeaient, pour exemples, des habits de l'époque sont là-haut, perchés au bout de leur cordage avec les objets personnels de chacun placés dans un panier accroché à son cintre. Je parcours les salles aux centaines de petits casiers numérotés, où chacun rangeait sa lampe ou son capteur individuel de gaz, vital. Je m’accoude au comptoir de l’atelier de réparation laissé en l’état, qui paraît prêt pour le lendemain et je prends connaissance des panneaux abondamment illustrés qui racontent la vie de cette fourmilière.
Il y a plus encore à découvrir. Guidée par un ancien mineur, bavard en anecdotes souriantes et pleines d’intérêt (selon les commentaires de ceux qui remontent, enchantés), une visite des fonds est régulièrement organisée mais qui dure au moins trois heures. C’est trop long pour moi.
Bien qu’étrangère aux « Gueules noires », l’ambiance désormais éteinte d’un dur labeur sombre et courageux, et le silence des vastes bâtisses attenantes désertées me touchent. Sous une pluie battante qui lave mon émotion, je m’éloigne des lieux…
Kilomètre 2.995.
Je viens d’entrer en Allemagne sans vraiment m’en rendre compte, ce sont les inscriptions sur les panneaux routiers qui me l’ont confirmé.
On affirme qu’il n’y a pas de limitation de vitesse sur les autoroutes allemandes. C’est oublier les innombrables exceptions pour les travaux de toutes sortes, les approches des sorties, les fermetures de voie sans motif apparent ! Je l’ai constaté autant que j’ai constaté la mauvaise humeur des conducteurs dans ces moments-là, révélée par les petits écarts nerveux en vaines tentatives de dépassement.
Brrrr ! Quel froid ! Les informations annoncent la poursuite d’un printemps anormalement glacial sur presque toute l’Europe, c’est bien ma veine.
Ma traversée de l’Allemagne doit se faire en six jours. En distances courtes entre les trois étapes de deux nuits, pour apprécier les environs. J’ai résolument écarté les grandes villes. Je vais d’abord grimper sur les hauteurs dominant le Rhin, et dormir à LANGSCHEID, au sud de Koblenz.
Je m’en étais passé jusqu’à présent, mais avec les noms devenus indéchiffrables sur les panneaux, mon guide parlant et mon écran deviennent indispensables pour ne pas (trop) m’égarer. Des travaux, encore des travaux, pas signalés sur le GPS… Mais les détours me font voir des paysages reposants particulièrement fleuris de lilas. Malgré le mauvais temps, les abords des routes et des maisons sont colorés de plates-bandes ou de pots débordants de fleurs. Plus tard j’apprendrai que la loi oblige à entretenir de telles plantations, et que, sauf emplacements de stationnement, les terrains autour des maisons ne doivent pas rester nus ou couverts de gravier. Merci, c'est bien agréable.
Pour mes repas, je dois faire des provisions. Ici comme en Espagne, comme en France, le stationnement en ville est un cauchemar, tout comme la circulation dense, avec ses feux, ses sens uniques, ses détours pour travaux, d'autant plus éprouvants lorsqu’on ne comprend pas la langue. Aussi, tout au long de mes déplacements nordiques vais-je me résoudre à demander à mon petit écran le chemin des supermarchés. Facilité mais regrettable absence de singularité : les mêmes enseignes se retrouvent partout.
Une petite route monte, monte, n’en finit pas de monter entre d'étroites parois abruptes sur lesquelles curieusement s'accrochent des petits étages de vignes, mais enfin j’arrive. Jolie bourgade et toujours des lilas. Le grenier confortable d’une grande maison ancienne m’accueille et me garde au chaud pendant les deux jours parce que dehors souffle une véritable tempête ! J’entends les trombes d’eau cingler le toit au-dessus de ma tête mais la solide maison en a supportées d’autres. Sans inquiétude, c’est un repos bienvenu. Pas de télévision. L'occasion pour mettre à jour mon courrier un peu délaissé.
Le temps s’est calmé mais le froid persiste. Je redescends dans la vallée, longeant les méandres du Rhin. Sur son eau grise les chalands se déplacent lentement.
Les averses se succèdent. Avant de partir, j’ai bien fait de remplacer mes essuie-glace un peu durcis sous l’agression du soleil. Depuis des jours ils balaient sans relâche.
ELLENHAUSEN, au nord-est de Koblenz. Chambre agréable, qui en fait est le bas d’un duplex non terminé. Grande baie vitrée, hauteur de plafond d’un étage. Dans ce volume, quel froid ! Le petit radiateur est insuffisant. Le jour suivant, pendant une éclaircie je parcours à pied les environs de ce petit bourg paisible. Des près, des chevaux. Et encore des lilas mauves, ou blancs, qui penchent jusqu’à moi leurs grappes alourdies de la pluie récente. Je respire à plein poumons leur parfum. Je n’ai envie de rien d’autre.
Routine : 70 - 50 - 30 km/h puis plus lentement… et je passe un large et haut ralentisseur qui secoue l’auto et son occupante. Et un peu plus loin, je recommence. Au moindre hameau, et ils sont nombreux le long de la route, la même épreuve m’attend. Sachant les Allemands respectueux de l’exactitude, je suppose qu’à ce rythme, les résidents de la région doivent partir de bonne heure pour se rendre à leurs rendez-vous !
Kilomètre 3.102.
Voici les Pays-Bas, royaume de la bicyclette. Partout des pistes, sur lesquelles roulent parfois de curieux attelages. Devant ou derrière le vélo, s’encastrent des poussettes à capote dans lesquelles on aperçoit surtout des enfants, mais aussi des chiens ou des colis. Quelle chance ont les habitants de ce plat pays qui ne nécessite pas trop d’efforts pour pédaler ! Quant à moi, j’espère qu’un temps plus clément me permettra de vagabonder enfin en patinette, comme prévu. J’en ai très envie.
A suivre...
@Serena2006
Récit. SUITE 3.
Difficulté du Copier/Coller : J'ai oublié un paragraphe, lequel décrit la dernière étape allemande.
Il faut donc lire, après : ... Depuis des jours ils balaient sans relâche...
Me voici arrivée plus au nord, non loin de la frontière hollandaise.
TONIVORST. J’y découvre un logis surprenant : c’est un refuge souterrain moderne. Descente par un escalier abrité entre de hauts murs. Derrière la grille d’entrée du local, la partie qui m’est réservée est raide d’une modernité grise et blanche. Lumière artificielle. Le mobilier est spartiate mais de qualité. Un coin cuisine disposant du strict nécessaire est impeccable. Derrière un rideau mural qui le cache mais que je soulève : une imposante porte blindée à mécanisme, c’est sérieux !
Les trombes d’eau glaciale recommencent. Je souris en pensant que l’épaisseur des murs supporterait même une tornade ! Je ne manque de rien. Je vais rester là, sous la confortable couette blanche, à regarder la télévision, ayant découvert, ravie, que Netflix est installé. Quelques bons films, c’est parfait.
Le temps du lendemain me rend encore paresseuse jusqu’au soir, lorsque je sors estimer la température que la météo a annoncé meilleure. En effet, le ciel que je n’avais pas vu depuis quarante-huit heures est dégagé. Le départ du lendemain se fera au sec.
Kilomètre 3.102. - Voici les Pays-Bas...
Récit - SUITE 4. Petit road trip européen...
Bien qu’ayant fait toutes mes réservations de logements plusieurs mois à l’avance, pour les lieux qui m’intéressent ici - les champs hollandais de tulipes, j’ai déploré de nombreux hébergements déjà indisponibles. Il semble que mon intérêt pour les fleurs soit largement partagé ! Mais il est plus vraisemblable aussi que la brève floraison soit responsable de l’affluence à cette époque.
En traçant mon parcours, j’ai programmé le plus possible de routes secondaires. Même attentive à conduire, le paysage qui défile plus lentement permet d’être apprécié. Il est aisé de s’arrêter pour découvrir un endroit intéressant ou pittoresque, particulièrement beau dans la lumière de l’instant, qui serait resté ignoré sans un passage hors d’un grand axe. Et puis j’aime être entourée d’arbres pour de courtes détentes silencieuses, et les petites routes me laissent le choix.
En Espagne, beaucoup d’autoroutes sont gratuites ou d’un coût minime. En France, les coûts à mes premières sorties aux péages des autoroutes m’ont tant fait grogner que je les ai ensuite évitées comme la peste. L’Allemagne s’est montrée plus raisonnable. La gratuité en Hollande est appréciable, comme le sera celle plus tard - je l’ai lu, en Belgique.
Même si les plages ne sont pas mon intérêt, il m’a semblé qu’un emplacement proposé au bord de la Mer du Nord pourrait être agréable.
IJMUIDEN est donc ma première escale hollandaise. Petit mobil home dans un vaste terrain de camping aménagé comme un village de ces mêmes habitations. Petite contrariété à l’arrivée. Même pour déposer ses bagages, aucune voiture n’est autorisée à circuler à l’intérieur, il faut stationner à l’entrée. Et, vu sur une carte, mon home est tout au fond de l’allée centrale où s’élèvent ensuite des escaliers afin d’accéder à la terrasse où il est installé auprès d’autres. Or, pour un séjour de plusieurs jours, j’ai besoin de tout le contenu encombrant de ma voiture.
J’insiste, je m’énerve un peu, et dans cet état, mon anglais primaire se bloque, et mon français, mon espagnol sont incompris. Je me désespère, ne comprenant pas ce que l’on semble me répéter. Et voilà que l’on me tire par la manche en me conduisant près d’une grande carriole tirée à la main qu’on a placé près de ma voiture. Par gestes, on me fait comprendre qu’elle va servir à emporter mes bagages jusqu’à « chez moi ». Je suis gênée car je n’ai pas de valises. Mon chargement est un assortiment de sacs divers qui me permettent de choisir ce dont j’ai besoin lors de chaque arrêt sans avoir à tout déballer. J’hésite. Des gestes pointés vers le ciel me font comprendre de ne pas tarder car la pluie menace. Alors je m’exécute. Un homme grisonnant s’attelle…
Au pied des escaliers, ayant sans doute pitié de moi, il se charge de mes paquets, et par grappes, les monte jusqu’à l’intérieur. Ce déchargement, puis la visite des lieux à peine terminés, une averse s’abat. Je le vois redescendre le dos courbé sous la pluie, cela me désole.
Suivent deux jours de pluie et de grêle qui blanchit tout alentour ! La wifi fonctionne et sur mon petit portable les infos de la météo déversent des lamentations concernant ces perturbations sur une grande partie de l’Europe…
Le troisième jour, soleil ! Mais quel froid. Emmitouflée, je rejoins ma voiture, couverte de givre… pour le 1er mai !
Découvertes. D’abord hautes dunes que j’arpente puis panorama sur une mer qui borde de longues plages blanches de sable fin. Puis grand canal portuaire et ses péniches. Puis petites routes serpentant entre des canaux. Rideaux dentelés sur la moitié horizontale des vitres : maisonnettes dont l’accès est un ponton enjambant une eau parcourue de canards barbotant entre les plantes aquatiques. Petites cités lacustres alternant avec des ensembles bétonnés. Puis une ville, en m’éloignant davantage.
Partout des pistes cyclables avec leurs feux de circulation dont les jours suivants, en patinette, je vais découvrir l’usage grâce aux rires derrière moi de cyclistes s’amusant de mon ignorance. Au début, je suis patiemment restée derrière le petit feu rouge, sans comprendre ce qu’était le boitier inconnu à côté de moi. Il me faudra en effet apprendre sur quel bouton appuyer pour m’autoriser à avancer ou bien à changer de direction, ainsi qu'à reconnaître les panneaux spécifiques différents de la circulation automobile.
Enfin je pars pour la journée visiter le parc floral de KEUKENHOF, plus au sud. Je réserverai les jours suivants aux parcours entre les grands champs.
Mais à plusieurs kilomètres avant d’arriver aux parkings de l’exposition, je déchante. Canalisée par des panneaux et les injonctions de policiers, une longue file de voitures patiente. J’ai lu de nombreux commentaires sur le sujet. En premier, sur la saturation des parkings, et ensuite sur la limite des entrées autorisées afin de ne pas saturer les allées des parterres fleuris. Un ensemble d’inconvénients qui conduit à des échecs de visites.
Aussi, après un quart d’heure je renonce. Devant cette foule devant moi déjà en attente, j’ai peu de chance d’entrer dans ces conditions. Si le parc est décrit comme enchanteur, il ne m’est pas indispensable. Je souhaitais admirer des fleurs, je ne vais certainement pas manquer d’en voir ailleurs. Je quitte la file et m’éloigne.
Étudiant sur ma tablette ce qui est proposé dans la région, je choisis l’annonce d’une entreprise qui expose, et en prends la direction.
Quelle bonne idée ! Derrière un hangar entouré de hautes haies, où un matériel agricole très particulier est entreposé, attendant le regard curieux des amateurs de mécaniques, se cache une multitude de carrés colorés alignés au grand air : les échantillons d’une centaine d’espèces de tulipes ! C’est magnifique ! Et étonnant, tant les couleurs et surtout les formes sont variées. Difficile d’imaginer que ces fleurs sont de la même famille, tant elles sont dissemblables. Quel travail il a fallu, ici depuis cinq siècles, pour obtenir ces beautés. Toutes portent un nom que l’on peut lire dans un petit cadre.
N’ai-je pas entendu dire qu’il n’existe pas de tulipe noire ? C’est aujourd’hui une erreur. Il y en a, là, devant moi. D’abord dans un carré de fleurs de forme classique, aux pétales d’un noir pur, mais au pistil clair. Mais plus loin, je me penche au-dessus d’un carré de tulipes totalement noires. Et les créateurs n’en sont pas peu fiers ! En témoigne un écriteau qui raconte, en plusieurs langues, la difficulté d’y être parvenu.
En vérité, si à côté de leurs sœurs et cousines elles ne sont esthétiquement pas les plus belles, elles sont cependant dignes d’être remarquées.
Tout ce labeur justifie pourquoi les simples visiteurs ne peuvent pas acheter de bulbes. La culture des tulipes est une industrie. Toutes les fleurs présentées sont des créations certifiées et protégées. Les plus déçus peuvent juste se contenter de lys ou de dahlias.
Le lendemain, départ à la recherche des champs. Mais pour les plus souvent indiqués, il est déjà trop tard. Dans certains secteurs, la grêle a ravagé les cultures, dans d’autres, à cause du mauvais temps redouté, les tracteurs sont passés très tôt pour étêter les fleurs.
En effet, selon le choix des parcelles, ce sont des fleurs à bouquet, ou bien pour récolter des bulbes de première qualité. Pour ces derniers, une fois les fleurs à maturité, ce qui a permis la photosynthèse bénéfique à toute la plante, une faucheuse mécanique coupe les têtes gourmandes en suc ou sève, afin de permettre aux bulbes de forcir davantage.
Cependant j’ai pu trouver quelques champs épargnés. Et surtout, un peu égarée dans la nature, car le quadrillage de canaux infranchissables vous déportent parfois très loin, je suis tombée sur de grands champs de jacinthes mauves, et blanches. Un embaumement à en être ivre…
Et une belle fin pour ce séjour régional fleuri.
Les moulins de Hollande ? Jusqu’à présent je n’ai pu dénombrer qu’un grand nombre d’éoliennes ! Mais je me suis réservé pour la suite un logis là où ils sont encore en vedette.
A suivre…
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