Retraite en Thaïlande : témoignage d'un expatrié

Interviews d'expatriés
Publié le 08 septembre, 2016
Bernard Garnavault a passé l'essentiel de sa carrière en France. Amoureux de l'Afrique, il a un temps envisagé de passer sa retraite au Sénégal, mais a finalement opté pour la Thaïlande, qui possède de bonnes infrastructures et un patrimoine culturel riche. Témoignage.

Natif de la Champagne, toute ma carrière professionnelle s'est déroulée entre diverses régions françaises. Hormis une courte expatriation en République Centrafricaine et quelques années passées à Genève, l'idée d'aller m'établir loin de la France pour y vivre ma retraite ne m'avait jamais effleuré.

Ma compagne, amoureuse de l'Afrique subsaharienne, ce continent qu'elle ne connaissait qu'au travers de livres et de reportages télévisés, souhaitait vivement que nous allions nous y installer. L'idée ne me plaisait qu'à moitié, mais j'ai finalement prospecté un poste dans le secteur de l'informatique dans tout ce que l'Afrique subsaharienne compte de pays francophones, nos capacités linguistiques ne nous permettant pas d'envisager un départ vers un pays dont la langue nationale ne serait pas le français. Un contrat en poche, nous sommes partis au début des années 2000 pour Bangui, capitale de la République Centrafricaine. Bangui n'est pas une destination phare de l'expatriation. Pour preuve, la population est estimée entre 400.000 et 600.000 habitants, cette fluctuation étant liée aux tentatives de coups d'état, aux coups d'état, aux mutineries militaires, aux troubles ethniques et religieux internes au pays ou encore aux troubles politiques des pays voisins. Un pays parmi les plus pauvres de la planète et dont l'instabilité politique est chronique depuis son indépendance. Et bien que la capitale compte un nombre d'habitants important, le centre-ville est peu achalandé. On n'y trouve que l'essentiel, tous les produits arrivant par avion ce qui ne fait qu'en surenchérir le coût.

Pourtant, je me suis merveilleusement bien adapté à la vie dans ce pays. Lorsque je n'étais pas présent sur mon lieu de travail, je me sentais immédiatement en vacances, bien loin du stress quotidien de la France. J'ai appris à ne rien faire, à laisser couler le temps doucement, à me poser à la terrasse de l'hôtel qui domine le fleuve Oubangui et à regarder vivre les pêcheurs de même que les villageois sur la rive opposée, en République Démocratique du Congo. Le dimanche nous partions en direction du nord explorer de magnifiques pistes de latérite rouge avant de revenir déjeuner dans l'un des rares restaurants de la ville. Malgré tous les avatars du quotidien, le fait d'être souvent contrôlé au volant de son véhicule jusqu'à trois fois en vingt minutes par la police, la gendarmerie puis par l'armée, les ruptures d'approvisionnement en carburant qui peuvent durer deux mois, les tirs fréquents sur les regroupements de population, cette vie avait un charme indéniable.

La situation continuant de se dégrader, la société qui m'employait a dû procéder à mon licenciement. Ce qui était en fin de compte une excellente initiative puisque nous avons pris le vol hebdomadaire à destination de la France deux heures avant la tentative de coup d'état de mai 2001. Nous avons donc pu regagner sans encombre notre pays, ce qui ne fut pas le cas de ceux qui partirent après nous.

Le retour en France fut très difficile. Il nous a fallu se réhabituer à un rythme de vie que nous avions oublié. Malgré mon désir immense de retourner en Afrique, j'ai poursuivi ma carrière professionnelle en France jusqu'à ma retraite, en 2013. Alors que je prévoyais de m'installer au Sénégal, un voyage en Thaïlande m'a fait très rapidement changer d'avis. L'infrastructure routière, le patrimoine architectural tout autant militaire que bouddhiste, la présence d'un relief montagneux ont été des éléments déterminants. Ayant toujours eu une préférence pour la montagne après avoir longtemps vécu dans les Alpes, la "rose du nord" me semblait être le meilleur des choix.

Les perspectives d'avenir de ma compagne divergeaient très fortement des miennes, il n'était pas question pour elle de s'établir à demeure loin de la métropole. Cette divergence de vue a donc entraîné notre séparation et c'est le 11 septembre, avec un visa d'une validité de un an, que j'ai pris l'avion en direction de Chiang Mai, ville dans laquelle j'avais au préalable réservé un hébergement provisoire pour une durée de un mois.

Passé ce délai, j'ai loué une grande maison à quelques kilomètres au sud-ouest de la vieille ville, un endroit très calme et très agréable, face à la colline de Doï Kham. Ce séjour a été de courte durée puisque dans des circonstances dues au plus grand des hasards, il m'a été permis de rencontrer une femme de quelques années ma cadette. Son caractère très affable, son état d'esprit on ne peut plus agréable et son sourire ont fait que nous nous sommes rapidement mariés. Propriétaire de sa maison, j'ai donc quitté le logement que j'occupais en location pour venir m'installer avec elle.

Ce mariage, dans un premier temps en Thaïlande, a nécessité la traduction et la certification de nombre de documents. Le mariage a été validé à la mairie de la ville, nos témoins étant deux des employés de cette mairie choisis au hasard par la personne qui a rédigé l'acte de mariage. La transcription sur les registres de l'état civil français n'est ensuite qu'une formalité, formalité nécessitant toutefois quelques traductions supplémentaires. Outre la facilité d'obtention d'un visa pour ma femme lors de nos déplacements en France, ce mariage présente pour elle l'avantage de la pension de réversion qui lui permettra de vivre lorsque je ne serai plus là pour assurer le quotidien.

Ma femme ayant été employée à la réception de l'un des grands hôtels de la ville, a pu compléter par ce travail sa connaissance de la langue anglaise. Pour ma part, et bien que l'anglais m'ait été enseigné pendant toute ma scolarité, je ne suis pas apte aujourd'hui à entretenir une conversation dans cette langue. Il m'a donc semblé naturel de retourner à l'école pour prendre des cours de thaï, une langue tonale difficile à maîtriser, de surcroît lorsqu'un traumatisme auditif important nuit à la compréhension de ces tonalités. Je me suis astreint à suivre ces cours pendant une année et demie et si suivre une conversation m'est encore délicat, je peux toutefois me faire comprendre sur les marchés, dans la rue où lorsque je me rends à la banque.

Je ne regrette en aucun cas mon choix, tout autant sur le principe de l'expatriation que sur le pays de destination. La vie qui est la mienne ici est des plus agréable, le climat me convient tout à fait excepté peut être la saison des brûlis. Je me suis parfaitement adapté à la nourriture du pays qui m'a certainement permis de perdre les quelques kilos superflus que j'avais en arrivant ici. Les produits français, fromages, charcuteries et autres, ne me manquent absolument pas. La contrepartie de ce départ, car tout ne peut être positif, est l'éloignement de la France, de la famille, éloignement toutefois relatif car certaines applications informatiques permettent non seulement de se parler mais aussi de se voir.

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