Doris vient de Strasbourg. Après avoir passé cinq années à Saint-Barthélemy, elle a eu le coup de foudre pour la République dominicaine. Au cours de cette interview, elle partage ses impressions sur Las Terrenas, où elle vit depuis 2003, et son quotidien d'expatriée.
D'où viens-tu, Doris, et que fais-tu actuellement ?
Il y a longtemps, avant 1998, je vivais une vie de rêve à Strasbourg. Chroniqueuse pour le magazine Marie-Claire, j'avais monté un petit studio graphique qui fonctionnait très bien. Ici, je me suis occupée longtemps d'un site web avant de créer mon blog « En aparté ». J'y raconte mes coups de coeur, mes coups de gueule, les bons coins, les beautés de la merveilleuse nature qui nous entoure.
Comment t'es-tu retrouvée République dominicaine ?
Au départ, nous n'avons pas choisi la Republique dominicaine mais Saint-Barthélemy. Nous y avons vécu 5 ans avant de passer une semaine de vacances à Las Terrenas. Wouaou, c'était le coup de foudre ! 3 mois plus tard, nous avions vendu bateau, maison, autos et débarquions dans ce petit paradis. Pourquoi l'avoir choisi ? Mais parce que c'est tout ce dont on rêve depuis toujours. Douceur de vivre, beauté inouie des paysages, climat fantastique, le paradis, je vous dis !
Comment s'est passée ton installation ?
Peut-être parce que nous avons passé 5 années à St-Barth, l'installation s'est passée sans aucun heurt, toute en douceur. D'abord, location d'une jolie maison, puis achat d'un terrain et construction de la maison de nos rêves, toute simple et si agréable à vivre. Puis a commencé mon attachement pour les chiens de rues. A l'époque, ils pullulaient et l'on en trouvait partout, abandonnés. Après une année, j'en avais déja 3 ! Je vis à Las Terrenas depuis 2003, avec une petite escapade au Brésil qui a vite tourné court.
Qu'est-ce qui t'as attirée vers Las Terrenas ?
Las Terrenas, c'est un art de vivre, loin d'être à la portée de tout le monde. Tout n'y est pas rose. Il faut savoir faire la part des choses et ne retenir que le positif. Ce qui m'a plu, c'est le sentiment de liberté, la beauté fabuleuse de la moindre parcelle de la nature environnante et l'extrême gentillesse et joie de vivre des habitants.
Quelles sont les procédures à suivre pour qu'une citoyenne française s'expatrie en République dominicaine ?
A l'époque, je vous parle d'il y a près de 14 ans, il n'y avait aucune procédure. On s'installait, avec l'aide d'un avocat, ou mieux, d'une personne bien introduite dans le service immigration. On faisait nos papiers et voilà ! Le tour était joué. Je suis même devenue Dominicaine en 2007 et j'ai donc la double nationalité. Aujourd'hui, il me semble que c'est un peu plus compliqué et que les démarches doivent être effectuées en amont, en France, avant de s'installer dans le pays.
As-tu éprouvé des difficultés à franchir ces étapes ?
Nous avons eu la chance d'être tombés sur la bonne personne et tout s'est déroulé à merveille, bien sûr, moyennant monnaie.
As-tu eu des difficultés d'adaptation à ton nouvel environnement ?
Oh non ! Que du positif. Et même si au début, on ne trouvait pas tout ce que l'on trouve actuellement, genre des produits européens tout simples, cela n'a jamais été un frein à ma joie de vivre ici.
Quelles sont les particularités du marché de l'emploi ? Est-il facile pour un expatrié d'y être embauché ?
Ce qui m'a le plus surpris, c'est encore une fois, la liberté de pouvoir agir à sa guise sans les carcans administratifs français. Je dirais presque qu'ici tout se règle, parfois bien lentement, mais on y arrive. Par contre, c'est vrai, côté boulot, ce n'est pas la joie pour les gringos. J'ai eu la chance de pouvoir me dispenser de travailler, et c'est le cas le plus facile pour s'intégrer. Ici, la vie est chère si l'on veut vivre à l'européenne et les salaires sont loin de suivre. Ce qui explique pourquoi tant de personnes repartent complètement découragées.
As-tu eu eu des difficultés à y trouver un logement ?
Je suis mal placée et en même temps je représente le cas le plus évident pour bien s'intégrer en Republique dominicaine. Avant de quitter la France, nous avons vendu tous nos avoirs, l'entreprise de mon mari, la mienne, notre maison, nos studios de location, nos voitures... Et nous avons pu démarrer notre nouvelle vie avec aisance. Donc, non, pas de difficulté pour dénicher un logement. Aujourd'hui, plus qu'à l'époque, de nombreux appartements ou petites maisons sont accessibles aux nouveaux venus, souvent à des prix corrects, genre 300 – 400 dollars.
Que penses-tu du mode de vie des Dominicains ?
Les Dominicains vivent d'une façon totalement différente. Leurs priorités sont à des siècles des nôtres. Ils vivent au jour le jour, sans se préoccuper du lendemain, hélas ! Ils sont la joie de vivre incarnée, malgré leur pauvreté, pour la plupart. J'ai toujours eu un excellent contact avec les Dominicains que je respecte au plus haut point. Un exemple touchant, mon mari est décédé d'un cancer en octobre 2007. Je me suis retrouvée seule dans ma grande maison et j'ai appris bien longtemps plus tard que chaque nuit, les Dominicains de mon entourage organisaient des rondes autour de chez moi, la nuit, pour être sûr qu'il ne m'arriverait rien. Ce n'est pas beau ça !
Une idée reçue qui s'est avérée fausse ?
Pas vraiment d'idée préconcue, donc pas de déception.
A quoi ressemble ton quotidien à Las Terrenas ?
La vie, ici, ressemble à un long fleuve tranquille. Avec le temps, je n'ai plus 3 mais 10 chiens qui m'occupent beaucoup. Je n'ai pas non plus d'employé de maison comme il est de coutume ici. Le matin, je m'occupe donc de ma maison et de mes chiens. Mon nouveau mari est chargé des courses. Après le déjeuner, c'est repos, lecture ou télé, puis 3/4 heure de natation dans ma piscine ou dans l'océan à 150 m de chez moi. C'est l'heure de faire à manger aux toutous. La nuit tombe tôt et la soirée se passe en lecture ou télé. Bien sûr, je consacre aussi du temps à mon blog.
Quels sont les loisirs les plus accessibles dans la région ?
La mer est omniprésente : kitesurf, padding, surf... Mais il y a aussi l'équitation (au moins 3 ranchs), de merveilleuses balades en quad ou à cheval à la découverte des environs, des balades en bateau, la pêche, mais aussi la pétanque (hé oui, il y a quand même environ 3 000 « frenchies » ici). Pour ma part, j'adore peindre, restaurer des meubles, des bibelots que je transforme et revisite.
Tes spécialités culinaires locales préférées ?
A Las Terrenas, il y a pas moins de 103 restaurants. Donc, c'est vrai, à l'heure du déjeuner nous n'avons que l'embarras du choix. Question cuisine : pollo guisado, habichuela/arroz, tostones, le grand classique, traduisez par poulet en sauce, riz/haricots et bananes. J'adore le sancocho, une sorte de ragoût longuement mijoté ou le chivo guisado (ragoût de chèvre).
Qu'est-ce qui te plait le plus en République Dominicaine ?
Tout ou presque. J'aime l'idée de ma liberté de vivre comme j'en ai envie.
Qu'est-ce qui te manque le plus par rapport à la France ?
Rien de matériel. Ce qui me manque, c'est ma famille et les petits moments que je ne passe pas avec elle.
Quel est ton avis sur le coût de la vie à Las Terrenas et en République dominicaine en général ?
Las Terrenas est à part. Je pense que c'est l'endroit le plus cher de la Republique dominicaine. Cela provient du fait que l'on y trouve à peu près tous les produits européens. Il y a, par exemple, ici une boutique de produits italiens qui n'a pas à rougir de celles que l'on a en France. Le supermarché est super bien achalandé, un second s'est ouvert depuis peu. Nous avons une pâtissière française hors pair, un fleuriste espagnol d'exception et un coiffeur de star.
Un événement particulier que tu as vécu en République dominicaine et que tu voudrais partager ?
Je voudrais revenir sur les soins médicaux. Il y a 9 ans, je me suis faite opérer d'une hysterectomie totale. Opération pas anodine. Ici, tout se sait et en apprenant que j'allais me faire opérer à Nagua, petite ville proche de Las Terrenas, des Françaises m'ont traitées de folle. Et bien, je suis allée me faire opérer à Nagua et durant l'opération faite sous péridurale, j'ai vécu une expérience unique de douceur, de gentillesse de joie de vivre. L'anesthésiste m'a caressé, chouchouté, rassuré durant toute l'opération menée de main de maître par Véronica, une jolie chirurgienne talentueuse et son assistante. Durant toute l'opération, une radio égrainait des chansons dominicaines et le choeur entier des médecins et infirmières, reprenaient tous les morceaux de plus belle. Une belle expérience, une opération 100% réussie dans la bonne humeur.
Qu'est-ce qui t'as motivée à écrire ton blog « En Aparté » ?
J'ai eu envie de créer « En Aparté » pour transmettre un peu de ma passion au plus grand nombre, faire découvrir sans chichi, sans mensonge, un endroit que j'adore et que je défendrai toujours becs et ongles. Je voulais offrir à tous la possibilité de s'évader un peu en parcourant mes lignes et le village que j'y dépeins.
Des conseils à donner aux personnes qui souhaiteraient s'expatrier en République dominicaine ?
Bien réfléchir et surtout passer quelque temps sur place : deux, trois mois, avant de prendre la décision finale. Parce que, je le répète, la République dominicaine n'est pas à la portée de tous. Beaucoup se sont brûlés les ailes et sont repartis dépités.
Tes projets d'avenir ?
Mon Dieu, j'ai 61 ans et l'avenir... Continuer ma petite vie sans vague et bien tranquille en compagnie, le plus longtemps possible, de mes chiens que j'adore.