Retraite à l'étranger : quelles sont les nouvelles tendances ?

Vie pratique
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Publié le 2024-06-28 à 14:00 par Asaël Häzaq
Passer sa retraite à l'étranger. Un rêve pour beaucoup. Une réalité pour ceux qui ont sauté le pas. La crise sanitaire et la crise économique ont néanmoins remis les compteurs à zéro ou presque. Coût de la vie, inflation, avantages fiscaux, législations… Comment envisager la retraite à l'étranger dans ces nouveaux contextes ?

Inflation : les « bons élèves » attirent les retraités à l'étranger

D'après l'Indice mondial des retraites (Global Retirment Index – GRI) publié par la société de gestion d'actifs Natixis Investment Managers en 2023, le Costa Rica (1e), le Portugal, le Mexique, le Panama, l'Espagne, l'Équateur, la Grèce, la Malaisie, la France et la Colombie (10e) sont les 10 meilleurs pays dans lesquels immigrer pour sa retraite. Outre les jolis paysages et le climat favorable, l'atout majeur de ces États est leur coût de la vie généralement inférieur à celui d'autres pays.

Depuis que l'inflation est revenue dans le vocabulaire courant, les projets d'expatriation doivent tenir compte des conséquences de cette hausse générale de prix. Or, les pays du GRI parviennent à contenir l'inflation (en comparaison avec d'autres terres d'expatriation). Au Costa Rica, premier pays du classement, elle n'est que de 0,6 % en 2023 (d'après les prévisions de l'OCDE). Les taux oscillent entre 3,5 % (Espagne, Panama, Équateur) et 5,7 % (France) pour la plupart des autres pays. Seule la Colombie affiche un taux supérieur à 10 %, avec 11,7 %. Un taux qui augmente légèrement par rapport à 2022 (10,2 %) alors qu'il baisse nettement dans les autres pays. Preuve, selon les observateurs, de l'efficacité des politiques mises en place dans les États affichant un faible taux d'inflation.

D'autres pays plébiscités par les expatriés ont serré la ceinture. Aux États-Unis, l'inflation 2023 tombe à 4,17 % après avoir frôlé les 8 % en 2022. Baisse tout aussi importante au Canada, qui passe d'un taux de 6,80 % à 3,96 %. Mais la prudence reste de mise. Contre toute attente, la Réserve fédérale américaine (la Fed) n'a pas baissé son taux directeur. Pour endiguer l'inflation, elle l'a déjà relevé 11 fois entre mars 2022 et juillet 2023. Wall Street et les investisseurs grincent des dents, mais les effets sont là : reprise de la croissance et baisse de l'inflation.

Fiscalité, coût de la vie et retraite à l'étranger 

Les États-Unis restent néanmoins une destination chère pour nombre de candidats à la retraite à l'étranger. Ils préfèrent se reporter sur le Portugal ou l'Espagne. Mais la récente fin des avantages fiscaux au Portugal amorcera-t-elle une autre tendance ? Au Portugal, les retraités étrangers (résidents non habituels) qui s'installent ne bénéficient plus de l'exonération d'impôts. Le cadeau fiscal, critiqué depuis longtemps par les habitants, a refait surface début 2020. Pour attirer les riches étrangers, le Portugal lance, en 2009, une exonération d'impôts de 10 ans sur les pensions. Elle passe à 10 % en 2020. L'exonération prend fin cette année. Une mesure de « justice sociale » pour le Premier ministre António Costa. En 2021, les expatriés vivant au moins 6 mois au Portugal perdaient déjà leur avantage fiscal. Avec la révision du Golden visa et des cadeaux fiscaux, le Portugal entend répondre à la crise du logement et contrer l'explosion des prix.

En revanche, la Grèce maintient ses avantages fiscaux pour les retraités étrangers, avec un taux d'imposition à 7 % pendant 15 ans sur tous les revenus. Au Maroc et en Tunisie, les retraités étrangers percevant une pension de source étrangère peuvent bénéficier de 80 % de réduction d'impôt. L'Espagne s'interroge toujours sur le maintien ou non du Golden Visa et bataille pour redéfinir sa politique touristique. En jeu : une pénurie d'eau sans précédent, qui exaspère les locaux. Pas question, pour certains militants, de continuer à promouvoir le tourisme de masse et les cadeaux fiscaux pour les riches étrangers. Des étrangers qui pousseraient les prix vers le haut. Les villes touristiques comme Madrid sont devenues hors de prix, avec un coût de la vie mensuel pouvant friser les 2000 euros pour une personne seule.

Retraite et expatriation : que dit la loi ?

Gare à la législation, et dans son pays d'origine, et dans le pays d'expatriation. Les retraités résidant en Thaïlande s'inquiètent. Le 1er janvier 2024, l'État thaïlandais a promulgué une réforme de l'impôt sur les revenus étrangers. Désormais, les revenus de source étrangère des Thaïlandais et des expatriés seront imposables. Le pouvoir n'a pas encore donné de détails sur cette loi, qui risquerait de modifier les projets des candidats à l'expatriation : les pensions de retraite seraient-elles considérées comme des revenus de source étrangère ? Quel serait le taux d'imposition appliqué ?

S'expatrier pour sa retraite impose de respecter certaines règles du pays d'origine : communiquer à sa caisse de retraite son projet de départ, lui délivrer régulièrement un certificat de vie, vérifier la présence de conventions fiscales entre le pays d'expatriation et le pays d'origine, faire le point avec sa banque sur les comptes à conserver et ceux à clôturer, les éventuels prêts en cours, les revenus perçus (pension, loyers), etc. Attention : certaines allocations sont liées à la résidence. En France, par exemple, impossible de toucher l'allocation de solidarité aux personnes âgées (ASPA) si l'on ne réside pas sur le territoire français. La résidence suppose de rester une certaine durée sur le même territoire. Toujours en France, le retraité restera considéré comme un résident fiscal s'il passe plus de 183 jours par an en France.

Retraite à l'étranger : est-ce le bon moment ?

Et si la retraite à l'étranger devait attendre ? En Chine, la question ne se pose plus pour nombre de « jeunes personnes âgées » toujours en activité. Ils ont entre 60 et 69 ans et travaillent. L'âge de la retraite oscille entre 50 ou 60 ans, selon les sexes et les métiers. Pékin envisage de l'allonger à 65 ans ; la question a été à l'ordre du jour de la Conférence consultative politique du peuple chinois à Pékin (le 4 mars). Le pays avance à marche forcée vers une réforme des retraites qui provoque l'ire des premiers concernés.

Tout comme les locaux, de nombreux expatriés continuent déjà de travailler après l'âge légal de la retraite. Ils occupent des postes précaires et font face à des conditions de travail difficiles, bien loin des « facilités du travail de bureau ». Ils s'unissent aux locaux contre la réforme. Le 8 février, plusieurs milliers de retraités de Wuhan manifestent contre la division par 3 de leur prime d'assurance-maladie. La Chine ne s'est toujours pas remise des conséquences de sa politique zéro Covid. Une politique qui a aggravé la précarité des personnes âgées. En 2024, les plus de 60 % devraient représenter près de 30 % de la population.

Faut-il être riche pour partir en retraite à l'étranger ? Face à l'inflation et aux soubresauts économiques, difficile de ne regarder qu'aux avantages fiscaux et aux coûts de la vie moins élevés de certains États. Repousser le départ à l'étranger semble être la nouvelle tendance 2024. Pour parer aux aléas de la vie (et dans un contexte post-COVID qui continue de marquer les esprits), les candidats à l'expatriation jouent la prudence. Surtout ceux ayant travaillé dans les secteurs les moins exposés à la pénibilité du travail. Ils n'ont pas forcément gagné des fortunes, mais ont épargné sur le long terme. C'est l'une des clés, selon eux, pour une retraite à l'étranger réussie.