Expatriation : faut-il rentrer chez soi en fin de vie ?

Vie pratique
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Écrit par Helena Delbecq le 02 septembre, 2024
Si l'expatriation rime souvent avec enrichissement personnel et découverte d'une autre culture, il faut aussi envisager le cadre très pragmatique d'une fin de vie à l'étranger lorsqu'on s'est installé pour de bon dans un pays différent du sien. Faut-il à ce moment-là envisager un retour vers sa partie d'origine? Outre l'aspect affectif - être entouré de ses proches - il convient aussi de considérer les points pratiques d'une fin de vie à l'étranger : démarches administratives et questions liées à une succession internationale. Le point pour vous aider à prendre une décision éclairée.

Perte d'autonomie à l'étranger : les aspects à considérer

La décision de rentrer dans son pays d'origine appartient à chacun, en fonction notamment de son état de santé et du besoin d'être près de ses proches. La question se pose avec d'autant plus d'acuité quand on est confronté à une perte d'autonomie, partielle ou totale. 

Sachez tout d'abord que votre famille ne pourra pas forcément venir vous assister sur le long terme si le pays dans lequel vous êtes installé requiert un titre de séjour comme cela est souvent le cas, au-delà de 90 jours de présence sur le territoire. Si des procédures de regroupement familial existent couramment pour faire venir auprès de soi ses parents âgés quand on est expatrié, l'inverse est beaucoup moins fréquent. Rares sont en effet les pays comme l'Allemagne (§ 36 German Residence Act) permettant de rejoindre ses parents immigrés sur un titre de séjour temporaire. Il s'agit dans ce dernier cas de prouver que les parents ont un besoin urgent d'une assistance, notamment dans le cadre d'une maladie grave ou d'une perte d'autonomie. Vérifiez donc auprès des bureaux de l'immigration s'il existe une telle possibilité pour vos proches de vous retrouver, pour une plus moins longue durée. 

Les finances en cas de perte d'autonomie constituent aussi un point clé pouvant vous faire opter ou pas pour un retour dans votre pays d'origine. Comment faire face aux coûts quand on est dans cette situation ? 

Votre pension de retraite seule peut en effet ne pas suffire pour couvrir le besoin d'aide à domicile ou le séjour dans des établissements de type « maison de retraite ». Il existe des assurances dépendance que vous pouvez souscrire mais il conviendra de vérifier spécifiquement que les prestations ne sont pas limitées à un pays précis (en général celui où vous avez souscrit l'assurance). 

En dehors de l'assurance dépendance, plusieurs pays proposent des aides spécifiques. En France, par exemple, l'allocation personnalisée d'autonomie (APA) est attribuée à des personnes en situation de dépendance, sans condition de ressources (montant dépendant des revenus). Même si vous êtes retraité français, vous ne pourrez en bénéficier que si vous résidez en France. Si vous choisissez de demeurer dans un pays étranger, il convient donc en priorité de voir s'il existe des aides proposées par le gouvernement de votre lieu de résidence et si vous y êtes éligible en tant que citoyen étranger.   

Fin de vie à l'étranger et démarches administratives 

Si la décision de rentrer ou de rester en expatriation n'appartient qu'à vous, il est bon de savoir qu'un décès à l'étranger implique un certain nombre de démarches pour vos proches. Il leur faudra faire déclarer le décès par les autorités locales puis se rapprocher du consulat de votre pays de résidence pour obtenir un acte officiel et sa copie intégrale. Autant dire que les démarches sont quelque peu difficiles à réaliser à distance.   

Vient aussi la question du rapatriement du corps vers le pays d'origine. Si telle est votre volonté, les procédures sont évidemment très réglementées. Il convient tout d'abord d'obtenir un accord de transport ainsi que de rapatriement délivré par la commune où se dérouleront les funérailles. Le Consulat est là encore l'interlocuteur privilégié vers lequel se tourner. Il faudra ensuite organiser les conditions de transport du corps par une entreprise spécialisée dans ce domaine, le tout pour une somme pouvant fluctuer entre 2000 et 6000 euros, en fonction de la distance, du mode de transport et d'autres contraintes techniques. 

Il est donc recommandé de souscrire une assurance rapatriement qui peut aussi vous être utile en d'autres circonstances, pour des soins spécialisés, par exemple. Elle est en général proposée à titre complémentaire par les assurances santé ou par des garanties spécifiques auprès d'autres assureurs. Le transport du corps peut être aussi une condition incluse dans un contrat d'assurance obsèques.

Quelle que soit votre décision, les démarches pour vos proches seront grandement facilitées si vous laissez un document consignant vos volontés. Selon le droit de certains pays, ce dernier peut généralement être rédigé de votre main, sur papier libre, sans enregistrement officiel. Si vous choisissez de demeurer à l'étranger il est plutôt recommandé d'effectuer un testament international qui nécessite pour sa part la présence d'un notaire. 

La succession internationale : les points à connaître

On le sait, les démarches administratives et successorales sont en général laborieuses et complexes. Ce sera d'autant plus le cas si vous avez fait le choix de demeurer jusqu'au bout à l'étranger. Dans ce cas, votre famille sera vraisemblablement confrontée à une succession dit internationale. Ce cas de figure s'applique en effet à une personne qui décède dans un pays différent de celui de sa nationalité ou laissant des biens dans un pays différent de celui de sa nationalité ou de son lieu de résidence.  

L'exemple d'une succession internationale au sein de l'Union européenne (UE)

Au sein de l'UE, on applique en matière de succession la réglementation de l'État de dernière résidence du défunt (Règlement Européen sur les successions internationales de 2015). Il convient donc de déterminer quelle est cette dernière résidence habituelle au moment du décès (cas parfois complexe de personnes vivant dans deux pays). Si vous souhaitez que la loi applicable soit celle du pays de votre nationalité, vous devez explicitement le mentionner avant votre décès, dans votre testament. 

L'exemple d'une succession internationale dans des pays tiers

Si vous résidez dans un pays autre que membre de l'UE, il convient de se référer aux principes et conventions des législations d'États dont vous dépendez. Existe-t-il une convention internationale spécifiant la loi applicable en matière de succession à un résident étranger sur le territoire? C'est ce qu'il faut déterminer, parfois avec l'aide d'un avocat spécialisé, ce qui rend les choses bien plus complexes. 

Comme on peut le constater, le choix de demeurer à l'étranger ou de rentrer dans son pays d'origine dépend d'un ensemble de facteurs tant émotionnels que financiers et administratifs. Il est recommandé d'envisager la situation en amont afin de regrouper toutes les informations nécessaires, spécifiques à votre lieu de résidence, et d'aborder la question ouvertement avec votre famille.