Se préparer dès le départ à l'éventualité d'un retour
Il est important de se préparer dès le départ, surtout si votre expatriation est prévue pour une durée déterminée, comme dans le cadre d'un contrat de travail fixe.
Même en l'absence de projet de retour précis, un plan d'urgence est indispensable. La pandémie, avec ses nombreux rapatriements imprévus, en est un parfait exemple. D'autres situations peuvent également précipiter un retour : une maladie grave d'un proche, des changements soudains dans les lois migratoires, des difficultés financières, ou encore le désir de fonder une famille.
Le logement constitue l'un des aspects clés à inclure dans votre plan de rapatriement. Si vous êtes propriétaire d'un bien immobilier dans votre pays d'origine, envisager de le conserver plutôt que de le vendre peut s'avérer judicieux. En effet, la location de ce bien peut générer des revenus passifs tout au long de votre expatriation, à condition que les taux de change et les impôts locaux ne s'avèrent pas défavorables. Ainsi, lors de votre retour, vous aurez la possibilité d'y réintégrer votre logement sans difficulté.
Sur le forum d'Expat.com, de nombreux Français expatriés se sont interrogés sur les démarches à suivre pour un retour en France. Face à ces requêtes, des membres du forum ont unanimement conseillé de simplifier au maximum les aspects administratifs liés au retour. En effet, conserver un logement en France facilite grandement la conservation d'un justificatif de domicile, indispensable pour des démarches ultérieures telles que la demande de carte vitale.
Faute de logement personnel dans leur pays d'origine, certains expatriés se voient contraints de retourner vivre chez leur famille, souvent pour plusieurs mois, en attendant de trouver un logement à louer. Cette situation peut s'avérer délicate à plusieurs égards : perte d'indépendance, ingérence ou curiosité excessive des proches, tensions interpersonnelles, et manque d'espace calme pour le travail à domicile. Ces difficultés peuvent considérablement ralentir et compliquer le processus de réadaptation à la vie dans le pays d'origine.
Anticipez également votre retour en élaborant des plans provisoires pour l'emploi, l'éducation des enfants (si vous en avez), la santé et les loisirs. Ces dispositions pourraient vous épargner une phase de réadaptation compliquée et stressante.
La « courbe en W » du choc culturel et du choc culturel inverse
Le modèle de la courbe en W, une variante de la courbe en U, a été introduit pour la première fois en 1963 par les sociologues américains John et Jeanne Gullahorn. Ils l'ont utilisé pour décrire le choc culturel vécu par les étudiants de première année d'université quittant leur domicile pour la première fois. Depuis lors, ce modèle a été appliqué à une compréhension plus large du choc culturel en général.
Dans ce modèle, le premier U de la forme en W représente l'expatriation et le second U le rapatriement. Lorsque les expatriés arrivent dans un pays étranger, ils subissent un choc culturel (représenté par un creux) avant de commencer à s'adapter (une phase de hausse). Lors de la première phase du retour, tout se passe bien, car les expatriés ont le plaisir de retrouver leur famille et de savourer la nourriture locale (à laquelle ils sont probablement attachés depuis leur enfance).
Toutefois, cette phase d'euphorie est malheureusement souvent suivie d'une chute brutale. Cette chute peut survenir lorsque les proches des expatriés remarquent qu'ils ont changé ou lorsqu'ils réalisent que leur pays d'origine a évolué (ou, au contraire, qu'il est resté trop semblable à ce qu'ils avaient connu). Heureusement, une période de récupération et de réacclimatation s'ensuit, même si ce processus peut prendre des mois, voire des années pour certains rapatriés.
Le rétablissement peut être plus difficile pour certains expatriés de retour en raison d'une combinaison de facteurs culturels et émotionnels. Parmi ces facteurs, on peut citer les différences culturelles entre le pays d'origine et le pays d'expatriation, la durée du séjour à l'étranger, le genre, l'orientation sexuelle, le niveau d'éducation et les convictions politiques.
Par exemple, une femme ayant vécu dans un pays étranger aux normes de genre plus progressistes que son pays d'origine peut rencontrer des difficultés à se réadapter aux normes conservatrices de ce dernier. Lors d'un entretien, une expatriée mauricienne de retour dans son pays après un séjour en Chine a évoqué les défis liés à la réadaptation à un niveau de sécurité moindre pour les femmes dans les rues de son pays. L'incapacité à se promener seule la nuit après la tombée de la nuit constituait pour elle un choc culturel inverse. Il lui a fallu plusieurs mois pour considérer comme « normal » le fait de rester chez elle ou de ne conduire qu'en journée. Au début, elle se sentait oppressée.
Sur le forum d'Expat.com, un autre expatrié évoque un « blues du rapatriement » inattendu : celui de se sentir comme un « monsieur tout le monde » chez lui, après avoir été perçu comme quelqu'un d'exceptionnel à l'étranger. Cet expatrié, de retour en France après plusieurs années passées au Royaume-Uni et en Espagne, avait imaginé que la vie serait meilleure dans son pays d'origine. Il n'était donc pas préparé au sentiment de perte d'importance qu'il ressentait à l'idée de se fondre dans la masse en tant qu'employé lambda, plutôt que de se démarquer en tant qu'expatrié.
Sur le forum d'Expat.com, un autre expatrié suggère que les rapatriés pourraient envisager de travailler pour des multinationales dans leur pays d'origine plutôt que pour des entreprises locales ou des administrations publiques. Cette option pourrait faciliter leur transition, car ils sont déjà habitués à évoluer dans un environnement international. L'adaptation à une culture d'entreprise plus locale peut s'avérer délicate pour eux, du moins au début.
Une expatriée britannique ayant vécu auparavant en Argentine confie que l'aspect le plus ardu et inattendu du syndrome du retour pour elle était la nostalgie des amitiés tissées en Amérique du Sud. La distance géographique entre les deux continents compliquant les visites mutuelles, les appels téléphoniques spontanés sont également rendus difficiles par le décalage horaire. Ayant passé ses jeunes années d'adulte en Argentine, elle éprouve toujours de la peine à quitter ces amitiés, même cinq ans après son retour au Royaume-Uni. Si la situation s'est améliorée au fil du temps, elle n'a pas encore complètement surmonté son mal du pays.
Conseils pour faire face au blues du retour d'expatriation
Dès le départ, il est important de se préparer à un retour éventuel, comme indiqué précédemment.
Considérez votre retour comme une nouvelle expatriation, cette fois dans un pays qui vous est devenu familier. Appliquez les mêmes techniques d'adaptation qu'à votre premier départ à l'étranger, mais en les dirigeant vers votre pays d'origine. Gérez vos attentes : la phase d'euphorie ne durera probablement pas et vos souvenirs idéalisés du pays risquent de ne pas correspondre à la réalité. Soyez également prêt à accepter que vous avez manqué des événements importants pendant votre absence à l'étranger, comme des mariages d'amis ou des changements dans la politique locale.
Partagez avec vos proches les expériences, les valeurs et les opinions que vous avez acquises pendant votre séjour à l'étranger pour les aider à comprendre votre évolution.
Trouvez des moyens concrets de rester en contact avec vos amis étrangers. Planifiez, par exemple, des appels vidéo hebdomadaires, utilisez les mêmes réseaux sociaux qu'eux, envoyez-leur des petits cadeaux ou jouez à des jeux vidéo en ligne ensemble.
Poursuivez les loisirs que vous avez adoptés à l'étranger afin de briser l'isolement et de préserver les aspects de votre personnalité façonnés par votre expérience internationale. Si, par exemple, vous avez commencé à jouer au football pendant votre expatriation au Royaume-Uni, rejoignez des groupes de football dans votre pays d'origine.
Rejoignez des communautés d'expatriés et d'anciens expatriés dans votre pays d'origine. Vous y découvrirez peut-être des affinités plus profondes qu'avec vos compatriotes n'ayant jamais vécu à l'étranger.
Liens utiles :
Le Département d'État américain sur le choc culturel inversé
Université du Pacifique, la « courbe en W » du départ à l'étranger et du retour au pays