Immigration : le président Trump tiendra-t-il son programme ?
Sans surprise, l'immigration a été l'un des grands thèmes de campagne du candidat Trump. Durant la campagne, de nombreux immigrés ne cachaient pas leur inquiétude devant une possible victoire du candidat républicain. Dans leur viseur, certaines dispositions du « Projet 2025 » qui limiteraient l'immigration. La Présidente du Mexique Claudia Sheinbaum joue néanmoins la carte de l'apaisement. Elle croit au « bon maintien » des relations avec les États-Unis, surtout au niveau économique. Mais Trump a plus d'une fois déclaré vouloir combattre la « vague d'immigration » mexicaine.
Le député des Français en Amérique du Nord Roland Lescure n'est guère optimiste. Interrogé le 6 novembre 2024 sur la télévision publique française (France 2), il souligne que « Donald Trump a déjà indiqué que s'il était élu, il resserrerait très fort la ceinture sur l'immigration ». Pour lui, l'élection du Républicain aura une incidence sur tous les expatriés. Le député rappelle que : « Tous les Français qui vivent ici sont immigrés ».
La politique de Trump sera-t-elle aussi « anti-immigration » que sa campagne ? Une mesure controversée pourrait revoir le jour : le « Muslim ban ». Voté en 2017, le décret interdisait l'accès au territoire américain aux ressortissants de 7 pays, dont une majorité de pays musulmans. À l'époque, la mesure disait répondre au contexte de menace terroriste. Le programme « Remain in Mexico » pourrait aussi faire son retour. Ce plan contraint les demandeurs d'asile mexicains à rester au Mexique jusqu'au jour de leur audience sur le sol américain.
Renforcement du plan de lutte contre l'immigration illégale
Concernant l'immigration illégale, Trump a affirmé, quand il était candidat, qu'il entreprendrait « la plus grande opération d'expulsions de l'histoire des États-Unis ». Marqueur de son premier mandat, la construction du mur entre les États-Unis et le Mexique a de grandes chances de reprendre. Le candidat avait déjà annoncé qu'il augmenterait le budget de l'agence de police de contrôle aux frontières.
Le Président entend réviser le droit du sol. Une mesure pourrait supprimer l'octroi automatique de la citoyenneté américaine aux enfants nés sur le sol américain de parents en situation irrégulière. Mais si elle était votée, cette disposition serait contraire au 14e amendement de la Constitution américaine.
Quel impact l'élection de Trump aura-t-elle sur les visas ?
Les détenteurs du populaire visa H-1B ont-ils du souci à se faire ? Le précédent mandat de Trump avait été marqué par un tour de vis sur les visas H-1B (visa temporaire pour les travailleurs qualifiés), F-1 (visa étudiant) et H-4 (visa de travail pour les personnes à charge). Les taux de refus étaient passés de 4 % à 17 % pour les visas H-1B et de 12 % à 28 % pour les visas L-1 (visa de transfert inter-entreprise). À l'époque, le président entendait instaurer un système de visa à point similaire à ceux développés en Australie et au Canada. Trump pourrait profiter de son nouveau mandat pour mettre en place cette nouvelle politique. Certains observateurs y voient un avantage. Car le système de visa à point favorise les immigrants qualifiés. Les talents étrangers pourraient bénéficier d'une politique plus favorable. D'autres analystes soulignent que pour l'instant, le président cible avant tout les étrangers en situation irrégulière. Ils y voient là encore un avantage pour les immigrants légaux.
Mais tous ne partagent pas cet optimisme. Le décret du précédent mandat Trump « Buy American and Hire American » (achetez américain, embauchez des Américains) a de grandes chances d'être réadopté. Les restrictions sur les visas adoptées en 2016 pourraient être renforcées. On évoque un visa H-1B plus strict, une diminution du quota de visas temporaires et une hausse des inégalités entre les immigrants. En effet, les restrictions imposées aux visas compliquent l'obtention de la Green Card. Une carte déjà très difficile à obtenir, avec des délais d'attente longs de plusieurs années.
Éducation, emploi : à quoi doivent s'attendre les expatriés ?
La principale crainte des étrangers concerne les titres de séjour et leur renouvellement. Les conjoints d'expatriés détenteurs du visa H-4 s'inquiètent pour leur statut. Car le Président américain privilégie l'immigration professionnelle, au détriment du regroupement familial. Lors de son précédent mandat, Trump entendait supprimer l'autorisation de travail pour les conjoints titulaires du visa H-4. Côté entreprises, les conditions de recrutement des étrangers pourraient être durcies.
L'inquiétude a aussi gagné les étudiants étrangers. Car la nouvelle politique migratoire pourrait se traduire par une hausse des frais de scolarité pour les étrangers et une baisse du nombre de visas étudiants. L'inquiétude monte d'un cran chez les expatriés indiens. Selon les chiffres du gouvernement américain, plus de 140 000 visas leur ont été délivrés en 2023. Les étudiants indiens constituent le premier groupe d'étudiants étrangers aux États-Unis.
La politique « America first » s'étend aussi à l'emploi. Les entreprises pourraient avoir plus de mal à recruter des étrangers. Mais si les détenteurs d'un permis de travail temporaire pensent à quitter le pays, ils n'envisagent pas de le faire dans l'immédiat. Car pour l'instant, aucune mesure restrictive n'a concrètement été prise. Ils préfèrent attendre d'éventuelles réformes de la politique d'immigration (visas, permis de séjour, regroupement familial, etc.) pour décider de rester ou non aux États-Unis.
Parents expatriés : quels programmes scolaires pour les enfants ?
Pour faire des économies, le candidat Trump affirmait qu'il supprimerait le ministère de l'Éducation une fois élu. Le portefeuille serait directement géré par les États. Problème : la mesure ferait exploser le budget des États. Or, le même candidat Trump annonçait des coupes budgétaires chez les établissements promouvant « l'endoctrinement de la jeunesse américaine ». Dans son viseur : les enseignements sur le racisme, l'histoire des États-Unis et la théorie du genre.
Entrepreneurs étrangers : l'élection de Trump est-elle une bonne ou une mauvaise affaire ?
Ouvertement protectionniste, le nouveau président américain résume sa politique économique en deux mots : « America first ». Trump entend renégocier les accords commerciaux conclus avec le Canada, le Mexique (accords ACEUM), l'Europe et la Chine. Objectif : relancer l'économie américaine et éteindre l'inflation. Le Président Trump, qui s'est engagé à baisser les impôts, compte également sur ces augmentations pour financer sa politique intérieure.
Les entrepreneurs étrangers doivent s'attendre à une hausse de 10 % à 20 % des droits de douane sur toutes les importations, et même une hausse de 25 % sur les importations mexicaines et de 60 % sur les importations chinoises. Les entreprises américaines sont rappelées à l'ordre : les constructeurs automobiles qui déplaceraient leur centre de production au Mexique seraient taxés à 200 %. Mais pour les économistes, cette hausse des tarifs douaniers aura l'effet contraire, car les autres pays riposteront.
Quelques entrepreneurs au moins se félicitent du retour de Trump au pouvoir : ceux de l'intelligence artificielle (IA), du moins, les partisans de la dérégulation du système. Au nom de la liberté d'expression et de l'épanouissement, Trump pourrait revenir sur les restrictions imposées par l'administration Biden. Objectif : accorder une plus grande liberté aux entrepreneurs. Les États-Unis, premiers investisseurs dans l'IA, entendent conserver leur longueur d'avance.