Bien-être des salariés : le télétravail à l'étranger est-il la solution ?

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Écrit par Asaël Häzaq le 12 novembre, 2024
Popularisé depuis les confinements, le télétravail s'est depuis imposé comme une nouvelle organisation du travail. Les entreprises l'ont bien compris (même si certaines appellent au retour à 100 % au bureau). Pour le bien-être de leurs salariés, de plus en plus de sociétés vont plus loin, en organisant le télétravail à l'étranger. Mais télétravailler à l'étranger est-il systématiquement synonyme de bien-être au travail ?

Le travail hybride : la bonne formule pour le bien-être des expats ?

Travailler à temps plein au bureau, en 100 % télétravail ou en combinant télétravail et présentiel ? Nombre d'expatriés regardent avec attention les offres d'emploi et n'hésitent plus à exposer leur vision en entretien d'embauche. La majorité opte pour une formule hybride, avec quelques jours de télétravail dans la semaine. Une récente étude du consultant américain Gallup (spécialisé dans les statistiques, le management et les ressources humaines) confirme cette tendance.

Le télétravail partiel est entré dans les mœurs

Selon l'étude (concentrée sur les États-Unis), le travail hybride est l'organisation professionnelle la plus répandue chez les entreprises pouvant la mettre en place. En 2024, 53 % des salariés sont en télétravail partiel. 27 % sont en 100 % télétravail. 21 % sont exclusivement au bureau. Pandémie oblige, la part des travailleurs hybrides a explosé entre 2020 et 2022 (de 18 à 49 %) avant de connaître une progression plus lente, depuis 2023. En 2019, on ne comptait que 32 % de travailleurs hybrides.

À contrario, le 100 % présentiel n'attire plus. 60 % des salariés restaient exclusivement au bureau en 2019. Le chiffre a plongé à 12 % en 2020. Malgré la levée totale des mesures barrières, il stagne à environ 20 % depuis 2021. Le full remote connaît une évolution inverse. Quasi-inconnu avant la COVID (8 % de télétravailleurs à 100 % en 2019), il explose avec la pandémie (70 % en 2020), mais s'effondre à la réouverture des frontières (26 % en 2022). Depuis, il plafonne à 27 %.

Comment le télétravail impacte-t-il l'engagement et le bien-être des salariés ?

Selon les études, le télétravail améliore l'engagement et le bien-être des salariés ou, au contraire, augmente le stress et joue sur la santé mentale. L'étude Gallup note un engagement plus faible (28 %) chez les salariés dont le travail ne peut être effectué à distance. L'engagement est à peine plus fort chez les travailleurs en présentiel, donc le poste est compatible avec le télétravail (30 %). En revanche, les full remote et les télétravailleurs partiels se sentent plus impliqués dans leur entreprise (respectivement 37 % et 36 %). Inversement, ils sont plus nombreux à envisager de quitter l'entreprise s'ils ne peuvent plus travailler totalement ou partiellement à distance (respectivement 64 % et 39 %).

Les résultats de l'étude restent néanmoins à nuancer. Pour les expatriés comme pour les locaux, tout dépend du secteur d'activité, de l'organisation du télétravail et de leur responsabilisation dans la gestion de leur planning. Plusieurs autres rapports révèlent que le télétravail à lui seul n'améliore pas systématiquement le bien-être des salariés. Entrent aussi en compte l'aménagement du poste de travail et du planning (en présentiel comme à distance), la participation active du salarié aux prises de décisions, l'autonomie laissée au salarié, ou encore, le respect de ses temps de travail et de repos.

Or, il a déjà été démontré que le télétravail mal géré peut être source de stress. « Flicage » des salariés par des entreprises suspicieuses, travail imposé sur les temps de repos, déconnexion impossible du salarié (qu'on appelle même en dehors des heures de travail), etc. Les expatriés voulant faire leurs preuves peuvent être particulièrement exposés en acceptant des conditions de télétravail qui ne respectent ni leur contrat ni la loi.

Faut-il promouvoir le travail hybride pour fidéliser les expatriés ?

Qu'en est-il dans les autres pays ? En 2024, la Nouvelle-Zélande, l'Irlande, la Belgique, le Danemark, le Canada, l'Allemagne, la Finlande, l'Australie, la Norvège et l'Espagne sont les 10 pays présentant le meilleur rapport entre organisation du travail et vie personnelle. Point commun entre ces États : la démocratisation du télétravail. Entre 2018 et 2023, la Nouvelle-Zélande connaît une augmentation de près de 60 % du nombre de télétravailleurs. En 2023, plus de 460 000 salariés sont en télétravail (17,7 % de la population active). C'est le plus haut taux jamais atteint depuis 2018.

En Irlande aussi, les salariés recherchent plus de flexibilité. 60 % d'entre eux estiment que le travail hybride est la meilleure forme de flexibilité. Moins de stress, plus de productivité et d'efficacité : le travail hybride serait la meilleure solution pour l'entreprise comme pour les salariés expatriés ou non. D'après Eurostat, le télétravail total ou partiel est plus important en Europe du Nord (51 % de télétravailleurs partiels ou totaux aux Pays-Bas, 45,3 % en Suède, 42,6 % en Islande, 42 % en Finlande et en Norvège). Parmi eux, de nombreux expats qui ne voient que des avantages dans cette forme de travail.

Bien-être des salariés : les limites du télétravail

La meilleure gestion de la balance vie professionnelle/vie privée permise par le travail hybride est l'argument le plus cité par les expats. L'étude Gallup le confirme, avec 76 % des télétravailleurs aux États-Unis pour qui le télétravail hybride améliore la balance vie professionnelle/vie privée. Cette notion de bien-être a fait une entrée remarquée dans le monde de l'entreprise, et pas seulement dans le secteur des services. L'industrie a compris qu'une bonne organisation du travail prévient les risques d'accident et fidélise les travailleurs. Mais tous les secteurs ne sont pas compatibles avec le télétravail. Pourtant, la préservation du bien-être des salariés reste possible.

Si le travail hybride a le vent en poupe, il reste décrié pour ses effets négatifs (lorsqu'il est mal géré) : hausse du temps de travail, perte du lien avec les collègues, manque d'interactions sociales, pression, réunions interminables, e-mails intempestifs, balance en défaveur de la vie privée… Si l'engagement à l'entreprise reste bien présent, un certain nombre d'employeurs et de salariés plaident pour le retour au bureau. Les géants de la Tech rétropédalent, parfois avec virulence.

Aux États-Unis, certains parlent même d'une nouvelle forme de plan social déguisé : les géants de la Tech (qui poursuivent de vastes plans de licenciements) licencieraient plus facilement les salariés qui refusent de retourner au bureau. Une verticalisation des échanges et un rapport de force combattu par les salariés. Pas question pour eux de retourner en arrière. En pratique, la fin du 100 % télétravail va surtout de pair avec l'organisation du travail hybride. Selon Gallup, la meilleure formule serait de travailler 3 jours dans l'entreprise et le reste du temps en télétravail.

Télétravailler à l'étranger : quelles options pour 2025 ?

Le télétravail ne risque pas de disparaître. Certains estiment même que cette forme de travail va avec une plus grande prise en compte du bien-être. Ils alertent néanmoins sur la nécessité de combattre les effets pervers du télétravail. Loin de contribuer au bien-être, le télétravail mal organisé peut au contraire nuire à la santé mentale du travailleur. Les travailleurs s'expatrient justement pour améliorer leurs conditions de vie. La démocratisation du visa nomade numérique leur permet de télétravailler à l'étranger tout en découvrant un nouveau pays. Voilà l'autre défi des entreprises. Organiser le travail et préserver le lien au-delà des frontières.

A propos de Asaël Häzaq

Titulaire d'un Master II en Droit - Sciences politiques ainsi que du diplôme de réussite au Japanese Language Proficiency Test (JLPT) N2, j'ai été chargée de communication. J'ai plus de 10 ans d'expérience en tant que rédactrice web.