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Les Russes face au dilemme de la guerre et des sanctions internationales

personnes qui marchent dans les rues en Russie
YuryKara / Shutterstock.com
Écrit parEster Rodriguesle 01 Juin 2022

La guerre russo-ukrainienne a eu un impact considérable non seulement sur la politique et l'économie, mais aussi sur les droits de l'homme, entre autres. En Russie, tous ne partagent pas le même avis au sujet de la guerre, et nombre de Russes sont pris au piège des sanctions internationales.

La guerre russo-ukrainienne a poussé de nombreux pays à imposer des sanctions internationales à la Russie. Parmi ces pays, ont compte les États-Unis, le Canada, ainsi que l'ensemble de l'Union européenne. Ces sanctions de plus en plus généralisées, ciblent notamment les particuliers, les banques, les entreprises privées, les grandes entreprises publiques et les exportations, entre autres.

Pour les Russes, les conditions de voyage sont de plus en plus complexes depuis le début de la guerre. Alors que les plus riches peuvent encore se permettre de s'envoler vers Dubaï ou encore les Maldives, le reste de la population fait face à des restrictions strictes, particulièrement en Europe. L'espace aérien de l'UE a été interdit d'accès aux compagnies aériennes russes. La Serbie s'est néanmoins transformée en porte de sortie vers l'Occident. D'ailleurs, la compagnie aérienne nationale Air Serbia, a augmenté le nombre de vols entre Belgrade et Moscou. Même si les prix des billets d'avion ont grimpé, ceux-ci se vendent toujours rapidement.

Olivier Ponti, vice-président des analyses de ForwardKeys, dit avoir constaté une hausse substantielle du trafic aérien de et vers la Russie via Belgrade depuis le début de l'invasion de l'Ukraine par la Russie. Cependant, tous n'ont pas la possibilité de partir. Matvey, expatrié russe en Espagne, estime que les Russes qui essayent de quitter le pays n'ont pas la tâche facile. « Je pense que même si de plus en plus de gens veulent partir à l'étranger, c'est devenu si difficile que la plupart n'auront pas d'autre choix que de rester ».

Les expatriés russes face aux sanctions

Matvey explique que les conséquences de la guerre et des sanctions internationales l'affectent même s'il vit actuellement l'étranger. « Comme toute personne qui touche un revenu en provenance de la Russie, il est pratiquement impossible de faire des retraits depuis un compte bancaire russe, de payer ses achats au supermarché ou encore d'acheter des billets d'avion. Il est très difficile de changer directement la devise russe en euros et il est impossible d'utiliser une carte bancaire en dehors de la Russie. Ce n'est plus qu'un morceau de plastique maintenant, rien de plus. Même si j'arrive toujours à obtenir de l'argent, cela représente énormément de démarches à faire », partage-t-il.

Les sanctions n'épargnent pas non plus les Russes qui tentent de quitter le pays en raison des sanctions internationales. « Pour les personnes qui ont quitté la Russie à cause de la guerre, l'interdiction des cartes de crédit russes a été catastrophique. Toutes vos économies sont sur votre compte bancaire, vous êtes quelque part en Europe ou en Turquie, et vous ne pouvez même pas payer votre déjeuner ou votre loyer. Je ne sais pas si cela aide à arrêter la guerre, mais cela pose certainement problème aux Russes qui vivent à l'étranger. D'autant que la majorité d'entre elles sont contre Poutine et le régime actuel. Alors oui, cette partie a eu un impact important sur ma vie », souligne Matvey.

Ces pays qui ouvrent leurs portes aux Russes

Debora Diniz, est une anthropologue d'origine brésilienne qui a demandé l'asile aux États-Unis. Elle livre son avis sur la situation des Russes à l'étranger. « La répulsion pour un dirigeant politique, à l'instar de Poutine, ne devrait pas résulter en haine pour un peuple, son histoire, sa littérature ou son art. C'est ce que fait le fanatisme : tout le monde et tout est considéré comme un ennemi. On appelle cela xénophobie ».

En plus de l'augmentation du nombre de vols entre Belgrade et Moscou, Air Serbia a commencé à vendre des billets sur une nouvelle route entre la capitale et Sotchi qui se situe sur la côte russe de la mer Noire. Dans un communiqué, le groupe a indiqué que les vols de Sotchi sont conçus pour des correspondances pratiques avec des vols de Belgrade à Berlin, Vienne, Zurich, Düsseldorf, Londres, Ljubljana, Milan, Paris, Prague, Podgorica, Rome, Tivat, Venise et Zagreb. Air Serbia s'est toutefois retenu de faire des commentaires.

D'autre part, l'Allemagne a annoncé son intention d'assouplir les exigences de visa pour les professionnels qualifiés russes qui envisagent de s'expatrier en raison de la guerre. Il n'empêche que l'Office fédéral pour la protection de la Constitution, c'est-à-dire, l'agence de renseignement intérieure du pays, prévient qu'il existe des risques que les travailleurs russes en Allemagne soient recrutés pour l'espionnage industriel.

L'Agence fédérale pour l'emploi, en coordination avec le gouvernement fédéral, a délivré une sorte d'« approbation globale pour l'accès au marché du travail » destinée aux employés russes. Les entreprises internationales allemandes pourront ainsi recruter des professionnels russes, à condition de leur offrir un salaire d'au moins 43 992 euros par an.

Ce statut spécial, provisoirement en place jusqu'à fin septembre, accorde automatiquement aux travailleurs russes qualifiés un visa de longue durée (au lieu d'un visa Schengen de 90 jours). À savoir qu'ils ne sont pas tenus d'obtenir l'approbation de l'Agence fédérale pour l'emploi sur un au cas par cas.

Qui fuit la Russie ?

En outre, le groupe VEDI propose désormais des forfaits à l'Ouzbékistan afin de permettre aux Russes d'ouvrir des comptes et d'obtenir des cartes qui fonctionnent à l'étranger. Plusieurs agences russes ont mis en place des offres similaires en raison d'une forte demande depuis le début de la guerre.

Mais les touristes ne sont pas les seuls à vouloir fuir la Russie. L'organisation caritative Kovcheg ( L'Arche), créée par le dissident en exil Mikhail Khodorkovsky, facilite la sortie des réfugiés qui s'opposent à la guerre et au régime de Vladimir Poutine. Le groupe estime qu'environ 700 000 Russes ont fui depuis l'invasion.

Matvey estime qu'en effet la majorité des Russes qui partent sont opposés à la guerre. « Je ne sais pas si partir aide à arrêter la guerre directement ou indirectement. Je ne suis pas expert en la matière, mais je suis convaincu que la plupart de ces gens sont contre Poutine et sa bande. À mon avis, ceux qui sont responsables de cette situation sont en Russie et ne sont même pas affectés par certaines de ces sanctions ». Pour lui, la situation ne s'améliorera que lorsque la Russie retirera ses troupes d'Ukraine et cessera de bombarder leurs villes. « Personne ne sait quand et si cela arrivera. Je ne pense pas que cela se fera de sitôt, mais le plus tôt possible serait le mieux. »

Kovcheg a mis en place un réseau de soutien opérant dans plusieurs États d'Europe centrale, dont l'Arménie et le Kazakhstan afin d'aider les réfugiés à se réinstaller et à obtenir des visas, ainsi qu'à trouver hébergement temporaire à Istanbul. Anastasiya Burakova, la porte-parole a déclaré à la chaîne de télévision lituanienne Delfi, que le groupe a soutenu divers types de profils, y compris des médecins, des ingénieurs et des informaticiens.

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A propos de

Ester Pinheiro est une journaliste brésilienne qui œuvre pour une plus grande diversité grâce au pouvoir de la communication. Elle vit actuellement à Madrid et étudie un master en études de genre.

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