Politiques de visas en Australie : qu'est-ce qui change ?

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Écrit par Asaël Häzaq le 09 mai, 2023
L'État australien révise ses politiques de visas. Annonce faite par Clare O'Neil, ministre de l'Intérieur, alors que l'exécutif s'apprête à boucler le budget fédéral. Les changements devraient être effectifs le premier juillet (début de l'exercice financier en Australie). Au cœur de la révision : l'ajustement des politiques de visas aux objectifs du pays et la lutte contre l'exploitation des travailleurs temporaires. Car pour le pouvoir, le système actuel est « cassé », et ne colle plus avec la réalité du marché. Quelles implications pour les expatriés ?

Attirer et retenir plus de talents internationaux

L'Australie cherche des talents étrangers et le fait savoir. L'État s'attend à accueillir près de 400 000 immigrants cette année et 315 000 l'an prochain. Il s'agit non seulement de rattraper le vide laissé par le manque de talents étrangers durant la crise sanitaire, mais aussi de proposer une nouvelle vision, prompte à attirer et faire rester davantage de talents internationaux. Si la ministre de l'Intérieur insiste pour dire que la politique du gouvernement n'est pas d'accueillir « plus de personnes », il s'agit bien d'attirer davantage de talents étrangers. C'est dans cette optique que le gouvernement révise sa politique de visas.

Car le gouvernement australien part d'un constat : il n'arrive pas à capter les étrangers qualifiés et très qualifiés. Un manque qui s'observe dans les entreprises, en recherche constante de personnel qualifié. Dans le même temps, le nombre de travailleurs temporaires (occupant des postes peu qualifiés) constitue une part importante de la main-d'œuvre étrangère. Une part trop importante pour le gouvernement, qui fait état de dérives et parle « d'exploitation systémique et de risque d'émergence d'une sous-classe temporaire permanente ». La révision des politiques de visas est censée rééquilibrer le système.

Immigration à trois niveaux

Pour le gouvernement, il faut simplifier et clarifier les procédures de demandes de visas. Il y a actuellement 100 types de visas. L'exécutif veut en diminuer le nombre. Certains visas n'ont jamais servi et ne cadrent pas avec la réalité du marché. Une immigration à trois niveaux est également pensée pour fluidifier les procédures. Le premier niveau concerne les hauts revenus. Pour eux, les démarches seront allégées, la procédure, simplifiée. Le deuxième niveau concerne les étrangers aux revenus moyens. Il constituera le « cadre général » d'entrée sur le territoire. Le troisième niveau est réservé aux étrangers à faible revenu. La révision des politiques de visas prévoit d'adapter leur venue en fonction des besoins des industries essentielles. Le plan de gouvernement étudie également une possible révision du système de visa à points.

Hausse des salaires pour les travailleurs étrangers

Pour l'exécutif, le salaire minimum des travailleurs étrangers est en deçà de ce qu'ils devraient gagner. Le gouvernement reconnaît que le seuil de revenu de la migration temporaire qualifiée a été gelé il y a 10 ans. Il reste bloqué à 53 000 dollars, et n'a donc pas tenu compte de l'évolution du marché et des réalités économiques et sociales. Le seuil augmentera à 70 000 dollars. Une avancée majeure pour une meilleure reconnaissance du travail des talents étranger.

Travailleurs qualifiés : la voie vers la résidence permanente

Tout comme les autres puissances, l'Australie reste impactée par la pénurie de main-d'œuvre. Elle aussi révise sa politique de visas pour attirer davantage de travailleurs qualifiés. Le gouvernement annonce que les talents étrangers pourront demander la résidence permanente dès la fin de l'année. Avec la hausse des salaires, c'est la deuxième annonce majeure du gouvernement australien en faveur des talents internationaux. Abul Rizvi, ancien secrétaire adjoint du département australien de l'immigration, s'en félicite. Selon lui, le gel des salaires a eu un impact négatif sur l'immigration des talents étrangers. En augmentant les salaires et en simplifiant l'accès à la résidence permanente, l'Australie entend attirer et surtout faire rester les talents étrangers.

Du nouveau pour les visas étudiants

Pour pallier les pénuries de main-d'œuvre, l'Australie avait temporairement permis aux étudiants étrangers de dépasser la limite des 40 heures de travail par semaine. Le gouvernement australien avait prévenu qu'il réinstaurerait les restrictions d'heures de travail, pour ne pas nuire à la scolarité des étudiants. À partir du 1er juillet, les limitations seront donc remises en place, avec plafond à un taux majorité de 48 heures par semaine. Car le constat est là : certains visas étudiants seraient détournés de leur but premier. Des étudiants passeraient plus de temps au travail qu'à l'université. La révision du visa est censée ouvrir une nouvelle voie pour mettre en valeur les filières étudiantes et soutenir les diplômés. Les détenteurs de Temporary graduates visas (sous-classe 485) pourront rester plus longtemps sur le territoire. Cet allongement concerne les diplômés (Licence, Master, Doctorat). Les détenteurs d'une Licence pourront rester 4 ans après l'obtention de leur diplôme, soit 2 ans de plus qu'actuellement. C'est 5 ans pour les Master (allongement de 3 ans) et 6 ans pour les titulaires d'un Doctorat (allongement de 4 ans).

Du nouveau pour le Working Holiday Makers

Équivalent du « Working Holiday Visa » ou du « Permis Vacances Travail », le Working Holiday Makers (WHM) retrouve lui aussi ses restrictions initiales. Tout comme le visa étudiant, les règles du WHM avaient été assouplies pendant la Covid. Pour faire face aux pénuries de main-d'œuvre, les détenteurs d'un WHM pouvaient travailler plus de 6 mois sans demander de permission spéciale. Retour à la normale prévu à partir du 1er juillet. Les étrangers ne pourront travailler que 6 mois pour le même employeur (la mesure est prévue pour lutter contre l'exploitation des travailleurs ; le WHM n'est pas un visa de travail, mais un visa permettant le voyage, avec quelques périodes de travail pour financer le séjour). Mais tout travail commencé avant le 1er juillet pourra se poursuivre après la remise en place des restrictions, et ce, même s'il dépasse les 6 mois.

Un nouveau visa pour les migrants du Pacifique

Le Visa Pacific Engagement (PEV) fait son entrée dans l'arborescence des visas délivrés par l'Australie. Il prévoit 3000 places pour les personnes originaires des pays du Pacifique et du Timor Leste (ou Timor oriental, pays d'Asie du Sud-Est). Les places seront attribuées selon un système de vote. Les candidats retenus pourront demander la résidence permanente. Ouverture des candidatures (en ligne) prévue pour juillet.

Simplification de l'accession à la citoyenneté australienne pour les Néo-Zélandais

Dès le 1er juillet, les Néo-Zélandais résidant depuis 4 ans ou plus en Australie pourront présenter leur demande pour accéder à la nationalité australienne. Exit donc l'ancien système, qui obligeait à détenir au préalable un visa permanent pour pouvoir faire sa demande. Mais attention : cette simplification ne concerne que les Néo-Zélandais titulaires d'un visa de catégorie spéciale (sous-classe 444), arrivés sur le territoire australien après le 26 février 2001. La période de séjour des résidents de très longue durée pourra être d'être antidatée. Changement aussi pour le Skilled Independent visa (sous-classe 189) : sa partie faisant référence à la situation des Néo-Zélandais est actuellement fermée. Elle fermera définitivement le 1er juillet.

Déjà en 2022, l'Australie se tournait vers l'immigration pour pallier les pénuries de main-d'œuvre. Les changements annoncés s'inscrivent dans cette politique. Mais plus qu'un engagement à court terme, il s'agit bien d'une stratégie pensée pour le long terme. En 2022, le gouvernement prévoyait déjà d'augmenter de 25 % les quotas d'immigration qualifiée (à partir de 2023). Des immigrés qualifiés parfois déjà diplômés, mais dont les diplômes ne sont pas toujours reconnus sur le territoire australien. Là aussi, l'État a prévu d'agir. Car la bataille pour attirer les talents étrangers est rude. Les autres puissances aussi recrutent. L'Australie compte sur sa réforme pour attirer et surtout retenir les talents étrangers.

A propos de Asaël Häzaq

Titulaire d'un Master II en Droit - Sciences politiques ainsi que du diplôme de réussite au Japanese Language Proficiency Test (JLPT) N2, j'ai été chargée de communication. J'ai plus de 10 ans d'expérience en tant que rédactrice web.