Décès d'un expatrié : quelles démarches pour les personnes à charge ?

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Écris par Asaël Häzaq le 09 juillet, 2024
Au drame de la perte de l'être cher s'ajoutent toutes les complications découlant du décès. Le décès de l'expatrié sur qui reposait le visa laisse la famille survivante dans une grande incertitude juridique. Que devient le statut des personnes à charge ? Quelles solutions s'offrent à elles ?

Quelles solutions de séjour pour le conjoint survivant ?

Difficile de se pencher sur les formalités de visa lorsqu'on est en période de deuil. Le décès survenu en expatriation est une épreuve supplémentaire. S'ajoutent, pour le partenaire survivant, les procédures administratives du pays d'accueil. Les règles détaillées ci-dessous sont données à titre général. Il est fortement conseillé de se rapprocher des services de l'immigration du pays d'accueil et de son ambassade/consulat dans les plus brefs délais.

Visa de personne à charge

Les personnes titulaires d'un visa de personne à charge (dependent visa) ou d'un visa familial émanant de l'expatrié décédé peuvent perdre leur droit de résider sur leur territoire. Leur visa sera annulé. L'annulation du visa est automatique et concerne aussi bien les adultes que les mineurs. Les personnes à charge seraient donc contraintes de quitter le territoire. Il peut cependant exister des exceptions pour les détenteurs d'un Golden Visa.

Prolongation du séjour pour les détenteurs du Golden Visa

Les membres de la famille arrivée dans le pays d'accueil grâce au Golden visa du défunt (parrain) ont la possibilité de rester sur le territoire même après le décès du parrain. Tout dépend des dispositions du visa. Ainsi, le Golden Visa grec permet à la famille de conserver leur droit de résidence. Pour savoir s'il conserve le logement familial, le conjoint survivant veillera à vérifier que le défunt a laissé un testament dans lequel il le désigne comme héritier. Dans tous les cas, il devra faire appel à un avocat pour régler la succession. Concernant le Golden Visa des Émirats arabes unis (EAU), une récente réforme permet à la famille de conserver son visa, même après la mort de l'expatrié sponsor. L'extension du visa court à partir du décès du partenaire. Le visa sera renouvelable une fois, sans besoin de sponsor.

Visa d'époux

Les expatriés mariés à un citoyen du pays d'accueil ou à un résident permanent sont généralement davantage protégés. Leur visa continuera de courir même après le décès de leur conjoint. Ainsi, les droits britanniques et français protègent le partenaire détenteur d'un visa d'époux. En France, ce dernier pourra demander le renouvellement de son visa même après le décès du conjoint. En revanche, si le décès est survenu alors que la première demande de visa d'époux n'avait pas été validée, l'expatrié ne pourra pas prétendre au visa.

Le droit britannique rappelle qu'il est possible d'obtenir le visa d'époux en cas d'union avec un partenaire britannique ou en cas d'union avec un résident permanent. La notion de « partenaire » est comprise au sens large : époux, épouse, union civile, relation de longue durée similaire à un mariage ou une union civile. Le partenaire survivant pourra postuler pour obtenir le droit de séjour indéfini (indefinite leave to remain). Le permis coûte 4778 livres sterling par personne.

Que faire en matière de succession ?

On ne pense bien sûr pas à ces considérations lorsqu'on prépare son expatriation. Il est néanmoins utile de connaître les grandes règles de protection de la famille en cas de décès du porteur du visa (décès de l'expatrié parrain, sponsor). Les États sont loin de partager la même vision, en matière de visa comme en matière de succession internationale.

En matière de succession, la législation applicable a de fortes chances d'être celle du pays d'accueil, sauf en cas de disposition testamentaire contraire. Mais peu de personnes (qu'elles soient expatriées ou non) pensent à établir leur testament, surtout si elles sont encore dans la vie active.

Exemple des Émirats arabes unis

Aux EAU, c'est la charia (la loi islamique) qui s'applique. Or, l'article 17 du Code civil des EAU précise que la succession sera effectuée en vertu de la loi du pays dont l'expatrié avait la nationalité au moment du décès. Encore faut-il que cette loi se déclare compétente pour statuer. Il est en effet possible que la loi du pays dont l'expatrié avait la nationalité renvoie l'application de la succession à la législation applicable dans le dernier pays dans lequel l'expatrié a résidé. C'est notamment le cas de la loi française. C'est donc ici la loi islamique qui s'appliquerait.

D'après la loi islamique, le conjoint survivant ne pourrait obtenir que 1/8e des biens du défunt. La succession est ensuite répartie entre les membres de la famille du défunt (1/6e par personne). Les fils du défunt reçoivent deux fois plus que les filles. En raison de l'application de la loi islamique, l'épouse-personne à charge est également plus impactée par le décès de son conjoint (qui a sponsorisé son visa). Elle n'a par exemple aucun droit sur les comptes ou tout élément enregistré au nom du défunt.

Décès en expatriation : comment protéger sa famille ?

Il ne s'agit pas de penser au pire, mais plutôt d'anticiper toute situation. Tout comme il est conseillé de souscrire une assurance-vie le plus tôt possible (l'un des placements préférés des expatriés, différent de l'assurance-décès), l'expatrié porteur du visa a tout intérêt à rédiger son testament, tout d'abord, dans le pays dont il a la nationalité, puis dans son pays d'accueil. Si l'expatrié est Européen, il pourra bénéficier du règlement européen sur les successions du 17 août 2015, qui permet de ne pas appliquer le principe du dernier lieu de résidence du défunt pour déterminer la loi applicable en matière de succession. Le règlement européen permet aux ressortissants européens expatriés à l'étranger de choisir le droit de son pays pour l'application de sa succession.

Pour protéger le partenaire, il est également conseillé d'ouvrir un compte bancaire à son nom. De même, on recommande d'inscrire à son nom le patrimoine qui serait constitué dans le pays d'accueil.