Petite présentation : D'où viens-tu Patrick et que fais-tu actuellement ?
Me voilà, français, jeune (58 ans) retraité de la fonction publique et de l'ONU. Je suis né et j'ai été mal élevé à Paris. A moins de vingt ans, je me suis embarqué dans une galère qui m'a conduit en divers endroits du monde et principalement en Amérique latine.
Pourquoi as-tu choisi de t'expatrier en Espagne ?
Rentré en France pour mes dernières années de carrière, j'ai été effaré : je ne reconnaissais plus mon pays. Pour être plus précis, pour une maison, dans l'ouest parisien (pas un château), je devais payer 2 400€ de taxe foncière et 1 660€ de taxe d'habitation, Soit plus de quatre mille euros par an pour pouvoir habiter chez moi ! Et je ne vous parle pas des impôts sur mes revenus !
Par ailleurs, constatant qu'à titre individuel je ne pouvais strictement rien faire pour que la situation de mon pays s'améliore, sans sortir du cadre légal intentionnellement restreint, j'ai décidé d'aller attendre ailleurs qu'une opportunité de m'impliquer se dessine pour améliorer cet état de fait. Étant bilingue, j'ai hésité entre l'Amérique latine et l'Espagne.
Je ne connaissais absolument pas ce dernier pays, mais sa proximité avec la France a emporté ma décision.
J'ai donc pris ma brosse à dents et j'ai parcouru la côte depuis la frontière jusqu'à Malaga, notant au passage les villes qui me semblaient convenir à y établir ma tanière. Vinaros m'a plu. J'y ai trouvé une petite maison à vendre à un prix convenant à mon budget.
Depuis combien de temps y es-tu installé ?
Je m'y suis installé en juillet 2013.
Comment s'est passée ton installation ?
Je n'ai eu aucune difficulté administrative. J'avais ouvert un compte bancaire depuis l'agence BBVA de Paris et j'ai obtenu mon NIE avec le sourire. Souhaitant effectuer des travaux dans ma nouvelle maison, j'ai mis en concurrence trois entrepreneurs qui, bien entendu, se connaissaient et m'ont, dans un premier temps, présenté trois devis approximativement alignés. Est-ce le fait que je roule dans une grosse voiture américaine ? Ces devis étaient dignes d'une maison de star. J'ai donc remonté mes manches et pendant deux jours, j'ai abattu des cloisons, décollé les céramiques murales et le carrelage du sol, viré les vieilles fenêtres et évacué les gravats.
Convoqués à nouveau, mes trois entrepreneurs n'en ont pas cru leurs yeux. Mais qui a fait tout ça ? Je leur ai alors expliqué que j'avais fait seul, en deux jours, un travail que les uns et les autres avaient prévu de me facturer environ deux mille euros, et que s'ils avaient du travail à mille euros par jour, je me ferais une joie de travailler pour eux. L'un d'eux a définitivement disparu. Un second ma présenté un devis trois mois plus tard. Je n'ai pas pris la peine de le lire. Le troisième m'a établi un devis réduit d'environ soixante pour cent.
Pendant trois mois, j'ai été présent sur le chantier chaque jour, du matin au soir, travaillant moi-même, mais surtout veillant à la bonne exécution des travaux confiés aux ouvriers. J'ai ainsi évité nombre de malfaçons !
Les travaux terminés, j'ai enfin emménagé dans ma nouvelle maison. Je résidais, pendant la remise en état de ma maison, dans un appartement de vacances loué hors saison pour 240€ par mois.
Comment as-tu trouvé un emploi à Vinaròs ?
Une fois installé, je n'avais aucune intention d'exercer un emploi, mais un groupe immobilier, constructeurs vintage, ma sollicité. Suivant la méthode qui consiste à exposer un petit oiseau dans une cage pour attirer ses congénères, ils souhaitaient m'employer pour attirer des Français. La proposition, payée au lance-pierres était tout de même attrayante.
Je n'avais jamais fait cela, et ça me permettait de rencontrer des gens parfois intéressants. J'ai tenu six mois, à proposer à la vente des biens « neufs » construits quinze ans auparavant et hors de prix.
Voyant que ces biens ne correspondaient pas aux attentes des clients potentiels, et ayant succombé au virus de l'immobilier, j'ai décidé de devenir agent indépendant. C'est un métier très agréable. Je le pratique très honnêtement en évitant les biens comportant des « loups » cachés et en facilitant démarches et installation à mes clients, lesquels sont pour la plupart devenus des amis.
Satisfaits aussi, les propriétaires ayant mis leur bien en vente, me recommandent aussi auprès de leurs amis. Donc, tout va bien, sauf que cette activité ma happé les doigts et mangé tout le bras. C'est ainsi que je travaille comme un malade et que je dispose finalement de peu de temps de loisir. Bon, ce n'est tout de même pas la mine, mais quand même.
Que penses-tu du mode de vie en Espagne ? Les Espagnols sont-ils accueillants ?
Les Espagnols ? Il en est de tous types. J'en ai rencontré de vraiment formidables, foncièrement honnêtes et agréables. Toujours est-il qu'il convient de rester circonspect afin d'éviter désillusions et arnaques diverses et variées. Je reconnais que mon expérience de vingt-cinq ans en Amérique latine m'est très utile. Je me sens ici comme un poisson dans l'eau, au milieu des requins qui affluent dans le monde de l'immobilier et des avocats recommandés par les agences.
Qu'est-ce qui t'as le plus surpris à ton arrivée en Espagne ?
Au cours de mes pérégrinations, j'ai constaté que les espagnols sont capables de produire des choses de qualité, mais qu'ils ne savent pas commercialiser en dehors des circuits intérieurs. Par ailleurs, les chefs d'entreprises m'ont semblé peu motivés, voire apathiques.
Que penses-tu du coût de la vie en Espagne ?
Pour moi, c'est tout bénef, mais quand je rapporte le coût de la vie aux salaires des locaux, je compatis.
Qu'est-ce qui te plaît le plus à Vinaròs ?
La tranquillité, le niveau de délinquance au ras des pâquerettes.
Qu'est-ce qui te manque le plus par rapport à la France ?
Non, rien de rien, non je ne regrette rien ! Mais c'est peut-être dû au fait que finalement, j'ai passé plus de la moitié de ma vie hors de France.
Que fais-tu pendant ton temps libre ?
Bon, il me reste un peu de temps pour les loisirs. J'en passe une partie à Paris, une partie à Barcelone, parce qu'ici, la culture, à part les oranges et les olives... Par ailleurs, je suis inscrit dans un club de tir à Amposta, Catalogne, où j'ai été très bien accueilli, mis à part le fait que l'on m'a immédiatement dit : « Ici, on parle catalan ». Ma réponse : « Seulement catalan ? Dites-moi, vous devez avoir des soucis quand vous sortez de Catalogne ! ». Depuis tout le monde me parle en espagnol.
Sinon, je suis un grand pêcheur. Et oui, dans l'eau aussi, et je donne la moitié de ma pêche aux voisins : dorades, bars, poulpes. Je retrouve alors sur la table de ma terrasse des légumes et des fruits, parfois un morceau de gâteau. Vraiment, je n'y perds pas au change !
Une expérience particulière que tu as vécu à Vinaròs et que tu voudrais partager ?
Mes voisins ? Bruyants, avec leurs chiens qui aboient pour un oui, pour un non. Mais vraiment très gentils, de braves gens vraiment ! Des routiers, des ouvriers, des artisans. Je n'ai pas choisi un quartier de bourges et je ne le regrette pas !
Un exemple : 11 h un dimanche alors que je travaillais dans ma maison. Toc toc ! C'était un voisin, venu m'inviter à boire un verre de vin. Presque tous les copropriétaires résidant à l'année avaient dressé une table à l'extérieur et des verre de vin en tapas. Ça s'est terminé à minuit autour d'une paëlla gigantesque confectionnée à l'extérieur, et deux grammes dans chaque bras.
Bon, mes travaux n'ont pas beaucoup avancé ce jour-là, mais c'était mon test d'admission et je crois avoir réussi l'épreuve.
Des conseils aux personnes qui souhaiteraient s'expatrier en Espagne ?
A mes compatriotes expatriés en Espagne, je recommande de d'abord bien se comporter car ce n'est qu'ainsi que l'on gagne la considération des locaux. Mais aussi, de réagir s'ils font l'objet de magouilles ou autres désagréments, car c'est ainsi que l'on se fait respecter. Mis à part cela, profitez de la vie en Espagne où de nombreux avantages nous sont offerts.
Quels sont tes projets d'avenir ?
Alors, pour l'instant, je me sens bien à Vinaròs et j'y reste. Peut-être que divers évènements me conduiront à renter en France si je pense pouvoir y être utile à quelque chose. Sinon, quand je serai vraiment vieux, je partirai ailleurs, probablement au Costa Rica dont je n'ai que de bons souvenirs.
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