Le Moyen-Orient fait face à une véritable situation de crise depuis le début de la pandémie de coronavirus, et nous ne parlons pas seulement de la menace sanitaire qui pèse sur la région. Ces pays abritant d'importantes communautés d’expatriés connaissent actuellement un exode qui aura sans aucun doute un impact considérable sur leurs économies, ainsi que sur leurs marché du travail, à long terme. Comme il s'agit de quelques-unes des destinations privilégiées pour l'expatriation professionnelle, Expat.com vous propose un tour d'horizon.
Arabie saoudite
L'Arabie saoudite a annoncé, la semaine dernière, que les résidents qui se trouvent actuellement à l'étranger ne seraient pas autorisés à retourner sur son territoire avant la fin de la pandémie de COVID-19. Une mesure qui se veut préventive, compte tenu du fait qu'il s'agit de l'un des pays du Moyen-Orient les plus touchés, avec plus de 183 000 cas confirmés et 1 511 décès. Ce n'est que le week-end dernier que le déconfinement a été décrété après 3 mois d'inactivité. Ainsi, la date de retour des expatriés résidents, à condition d'avoir un visa d'entrée valide, sera annoncée une fois que la situation sera retournée à la normale. Mais ce n'est pas tout ! Selon une étude réalisée par la Jadwa Investment Company, une société basée à Riyad, l'on s'attend au départ de plus de 1,2 millions de travailleurs étrangers de l'Arabie saoudite d'ici fin 2020, des Indiens, des Égyptiens, des Philippins et des Pakistanais pour la plupart. En effet, près de 300 000 expatriés ont déjà quitté le pays, sans compter les 178 000 nouvelles demandes d'Awdah, une stratégie mise en place pour faciliter le rapatriement des expatriés vers leurs pays d'origine durant la pandémie. Il est toutefois intéressant de noter que le départ de quelque 445 000 travailleurs étrangers en 2019 a entraîné un taux de chômage de 12%. Une situation qui pourrait mener à une baisse démographique d'environ 4% d'ici la fin de l'année, puisque les expatriés comptent pour plus de 10,5 millions de la population de 34,8 millions d'habitants.
D'autre part, les mesures d'austérité mises en place par le gouvernement saoudien sont en train de décourager les travailleurs étrangers qui sont sur place. Parmi, on compte une hausse considérable de la taxe à valeur ajoutée, pouvant aller jusqu'à trois fois le taux actuel, et la suppression de l'allocation de subsistance offert aux employés du secteur public. Qui plus est, les entreprises privées ont été autorisées à réduire les salaires de leurs employés par 40% maximum et à mettre un terme aux contrats de leurs salariés étrangers afin de mitiger les effet de la pandémie sur leurs activités. N'oublions pas la menace qui pèse sur les secteurs comme l'hospitalité, l'alimentation, les services de sécurité et de gardiennage, les services d'administration et de support, dans lesquels les expatriés seront les premiers à être remerciés.
Koweït
Le Koweït n'est pas mieux loti avec une large communauté d'expatriés 3,4 millions sur une population de 4,6 millions d'habitants. Le pays souhaite toutefois réduire sa population d'expatriés à 30% dans un souci de rétablir l'équilibre au niveau national, surtout en ce qui concerne les recrutements dans le secteur privé. D'ailleurs, près de 50% des expatriés employés par les municipalités ont déjà été remerciés. En quelques jours seulement, plus de 11 921 expatriés indiens et égyptiens ont déjà été rapatriés. Les autorités ont annoncé, en juin, que le secteur pétrolier ne recruterait plus de travailleurs étrangers jusqu'à nouvel ordre. Qui plus est, un système de quota a été proposé en ce qu'il s'agit de l'embauche des expatriés dorénavant, en fonction de leur nationalité. Et comme si ça ne suffisait pas, le coût des permis de résidence, des visas, de l'assurance santé et de la scolarité devrait connaître une hausse de 100% à 200% ! De quoi décourager davantage les ressortissants étrangers de s'y rendre pour le travail. Les frais de traitement de dossier par le ministère des Affaires étrangères du Koweït devraient également connaître une hausse de 150%. Ces mesures, selon le gouvernement, devraient permettre le pays à garder la tête hors de l'eau suite à la réduction budgétaire de 20% pour l'année fiscale 2020-2021.
Qatar
Au Qatar, les coûts relatifs à l'emploi des ressortissants étrangers dans les ministères, ainsi que les institutions et autres entités financées par le gouvernement ont été réduits par 30% au 1er juin. Une décision qui s'est traduite en une baisse des salaires des expatriés et d'une rupture de contrat avec un préavis de deux mois. Aujourd'hui, ce pays comptant une population de 2,3 millions d'expatriés qui représentent 95% du marché du travail, sur une population de 2,7 millions d'habitants, peut s'attendre à une baisse démographique de 10%. Cependant, des experts sont d'avis que l'exode des expatriés pourrait avoir des implications à long terme sur la croissance économique du Qatar, que ce soit en termes de pénurie de main-d'œuvre ou de perte du pouvoir d'achat.
Bahreïn
Ce n'est un secret pour personne : le gouvernement du Bahreïn avait déjà mis en place une stratégie visant à nationaliser son marché du travail, surtout en ce qui concerne le secteur privé. Ainsi, la pandémie a entraîné la perte de près de 6 000 emplois occupés par des expatriés durant les derniers mois. A savoir que les conséquences financières de la pandémie de COVID-19 se sont déjà faits ressentir par 8 800 entreprises. Ainsi, le Bahreïn a non seulement supprimé le permis de travail flexible mais aussi alloué un budget spécial à la « bahreïnisation » du secteur public.
Quid des autres pays du Moyen-Orient ?
Les Émirats Arabes Unis, dotés d'une communauté d'expatriés de 5 095 millions en 2019, se veulent plutôt rassurants, même si ces derniers sont en train d'être rapatriés en masse. Si la tendance se maintient, on prévoit une baisse démographique de pas moins de 10%, ce qui résulterait en une perte de près de 900 000 emplois selon les autorités locales. Il n'empêche que les Émirats Arabes Unis n'ont pris aucune mesure drastique pour réduire le nombre de travailleurs étrangers dont ils disposent. A savoir qu'il s'agit du premier pays de la région à avoir enregistré des cas de COVID-19, un chiffre qui a, aujourd'hui, atteint les 47,717 cas et 313 décès.
Oman, pour sa part, profite de la situation actuelle pour tenter de booster sa main-d'œuvre. Afin de rendre le marché du travail encore plus attractif et compétitif, une nouvelle loi entre en vigueur en 2021. En effet, les travailleurs étrangers, qu'ils se trouvent en Oman ou ailleurs, n'auront plus besoin de demander un certificat de non objection pour changer d'employeur lorsque leur contrat est arrivé à terme.