Selon les études menées par différents cabinets de conseil en gestion de la mobilité internationale, les « conjoints suiveurs » en expatriation sont encore à 75 % des femmes. Si une partie d'entre elles retrouvent un emploi à l'étranger, 35 à 50 % ne reprennent pas d'activité ou entament une reconversion professionnelle. L'expatriation est en effet souvent une période propice à la réflexion sur le plan professionnel. Quelles raisons poussent les femmes à se lancer sur la voie d'une reconversion et comment s'y prendre ?
Pourquoi l'expatriation est-elle un moment opportun pour une reconversion chez les femmes?
Désirée ou subie, il va sans dire qu'il y a différentes manières de vivre l'expatriation en tant que « conjoint suiveur », en majorité des femmes. Si certaines parviennent à éviter une interruption d'emploi lors d'une expatriation, plusieurs saisissent cette opportunité pour changer de cap professionnel.
Après toutes les démarches liées au déménagement et à l'installation, la transition de l'expatriation est en effet un moment où l'on a le temps de se poser et de réfléchir à son parcours professionnel. Combien de personnes prises dans l'enchaînement d'une carrière n'ont en effet jamais pris ce temps de réflexion ? Or, le désir de reconversion habite un pourcentage non négligeable d'employés, selon différentes études d'instituts de sondage. L'expatriation offre ce temps nécessaire au retour sur soi : quel est le bilan de ma carrière passée ? Quelles sont mes forces et mes compétences ? Comment est-ce que je me projette dans dix ans ?
L'exposition à un nouvel environnement peut aussi être une puissante source de stimulation où l'on est amené à se réinventer. Nouvelles langues et cultures, cercle renouvelé de connaissances, élargissement de son réseau et nouveau contexte professionnel, autant d'opportunités pour penser à des possibilités de développement et de réorientation.
On ne mettra jamais assez en avant la force du réseau, que cela soit dans la recherche d'emploi ou la réflexion vers une réorientation. L'expatriation est précisément un moment où vous êtes amenés à fréquenter des types de profils que vous n'auriez jamais côtoyés dans votre pays d'origine. On impose en effet parfois moins de barrières à ses relations sociales du fait de notre situation commune : être expatrié dans un pays qui n'est pas le nôtre.
Côté moyens, l'expatriation est aussi un moment où l'on bénéficie de certains avantages financiers (en fonction du type de contrat) : participation à la prise en charge du loyer, compensation de vie chère, financement de l'assurance santé ou autres primes. La charge financière étant souvent moindre que dans le pays d'origine, c'est le moment pour les femmes d'investir dans une reconversion professionnelle qui nécessite peut-être une formation, en tout cas plusieurs mois de recherche et d'investissement avant de retrouver un poste.
Enfin, le temps de l'expatriation est idéal pour une reconversion, car les employeurs de la personne salariée prévoient régulièrement un accompagnement pour le “conjoint suiveur”. Il peut s'agir d'une aide à la recherche d'emploi, d'heures de coaching ou encore de formation dans un domaine de votre choix. Vous pouvez dans ce cadre choisir un coach spécialisé en reconversion professionnelle, ce que vous auriez peut-être rechigné à faire dans votre pays d'origine, par manque de temps, de moyens et de disponibilité d'esprit.
Composer avec les contraintes qui s'imposent parfois à la reconversion
Cela ne signifie pas bien entendu qu'il n'y a aucune difficulté à surmonter, à commencer par la nécessaire adaptation à son nouvel environnement. La reconversion à l'étranger peut aussi être freinée par :
La nécessité d'un permis de travail
Dans plusieurs pays, l'autorisation de travail du conjoint est soumise à une demande spécifique, indépendante du permis déjà obtenu par le salarié qui est envoyé en expatriation. Les conditions sont parfois restrictives à dessein (volonté de protéger le marché du travail local).
En Chine, par exemple, il faut satisfaire à plusieurs conditions et posséder notamment, pour une catégorie de visa, un minimum de deux années d'expérience professionnelle dans le secteur où vous souhaitez exercer. Ce dernier point peut poser problème lorsque vous êtes en période de reconversion, puisque vous n'aurez pas encore acquis l'expérience nécessaire dans votre nouveau domaine professionnel.
À cela s'ajoutent les exigences courantes telles qu'une promesse d'embauche de la part d'un employeur local, chose parfois malaisée quand on se lance dans un secteur différent de nos compétences initiales. Autant dire que la procédure est parfois longue et complexe.
La maîtrise de la langue locale
Une nouvelle langue, c'est en soi enrichissant, mais certaines reconversions professionnelles nécessitent la maîtrise de la langue locale pour se lancer. Vous étiez juriste et souhaitez vous reconvertir dans l'enseignement ? À moins de travailler dans une école internationale, il est fort probable que vous ne puissiez pas enseigner dans la langue locale si vous n'avez pas encore le niveau suffisant. Il en va de même pour de nombreuses autres professions où la maîtrise linguistique est un impératif pour exercer sur place, hors contexte expatrié. De même, la formation à une nouvelle qualification peut poser problème quand cette dernière ne se pratique pas facilement à distance dans votre langue d'origine. Beaucoup se retrouvent ainsi, par choix ou par obligation, à graviter essentiellement autour d'autres expatriés.
La reconnaissance des diplômes à l'étranger
En dehors de la langue, il faut parfois faire état de ses diplômes précédents lorsqu'on veut se lancer dans une nouvelle formation. Certains pays se contentent d'une traduction certifiée conforme de votre diplôme étranger tandis que d'autres exigent une reconnaissance officielle. Vous devez alors vous tourner vers l'organisme accrédité par l'État en question, apte à délivrer une attestation. Vous pouvez vous adresser au réseau ENIC NARIC compétent en la matière dans près de 55 pays. Mais ce processus prend parfois plusieurs semaines, voire quelques mois. Il s'agit donc de planifier suffisamment à l'avance un besoin de formation pour une reconversion et de comprendre les exigences requises en termes administratifs.
La reconversion professionnelle des femmes à l'étranger : mode d'emploi
Les contraintes levées, quelles sont les étapes pour réussir efficacement sa reconversion à l'étranger ?
Le bilan de compétences
Il est souvent partie constituante d'une reconversion professionnelle, puisqu'à moins d'avoir un projet bien défini, vous avez en général besoin de faire un état des lieux de vos forces avant de vous lancer dans un nouveau domaine.
Il existe de nombreux outils pour évaluer ces dernières : tests de personnalité tels que la méthode DISC, questionnaires et auto-évaluation divers, outils standardisés tels que celui proposé par l'institut Gallup avec la méthode du Clifton Strengths.
Vous pouvez également vous faire accompagner par un organisme spécialisé dans les bilans de compétences. Dans certains pays comme en France, il s'agit d'un suivi sur plusieurs semaines, voire mois. Vous êtes accompagné par un professionnel spécifiquement formé à cette démarche, avec lequel vous définirez vos objectifs et les outils dont vous disposez pour vous lancer sur la voie de la reconversion.
Le coaching dédié à la reconversion professionnelle
En dehors des organismes accrédités pour les reconversions professionnelles, plusieurs coachs privés se sont spécialisés dans cette thématique de la reconversion. Vous en trouverez même qui nichent encore plus leur activité et qui s'adressent exclusivement aux femmes à l'étranger, à la recherche d'une autre carrière.
Attention : les coachs ne sont pas nécessairement habilités à effectuer des bilans de compétences en bonne et due forme, bien que certains s'en prévalent. Définissez avec précision vos besoins et objectifs et tentez d'avoir une vue claire des outils qui seront utilisés.
Les réseaux d'expatriés
Ces derniers ne sont pas à sous-estimer dans l'aide qu'ils peuvent vous apporter dans votre processus de réorientation professionnelle. Constitués de personnes souvent dans le même cas que vous, les réseaux apportent conseils et soutien, par le biais d'associations ou de façon plus informelle (groupes constitués sur des réseaux sociaux).
Certaines associations promeuvent activement des ateliers, des activités de mentorat et d'aide à la reconversion. Consultez le site du consulat du pays où vous résidez. Il tient à jour une liste des associations professionnelles utiles sur place.
Envisager le statut d'entrepreneur
Songez également à la création d'entreprise, dans le cadre de votre reconversion. Vous serez peut-être surpris de découvrir que de nombreux expatriés ont “profité” de l'expatriation pour lancer une activité en indépendant. La création d'entreprise peut en effet s'adapter de manière souple à vos nouvelles aspirations professionnelles dans la mesure où vous ne dépendez pas d'un employeur qui devra “miser” sur vous alors que vous n'avez pas encore d'expérience dans le secteur cible de reconversion. Vous vous formez, construisez votre offre et vous vous lancez par vous-même. Une expérience formatrice, à n'en pas douter !
Tout dépendra ensuite du statut à l'étranger accordé à ce type d'activité en indépendant. Certains pays encouragent ces démarches tandis que d'autres y posent un certain nombre de contraintes, notamment administratives.