Joe Biden, le quarante-sixième président américain, vient de s'engager à juste titre à réformer le système d'immigration mal aimé depuis la présidence de Donald Trump et à redorer le blason des États-Unis aux yeux du monde entier et en particulier ceux des expatriés. Comment va-t-il s'y prendre ?
L'une des priorités de Biden est de réinstaurer la fierté de la diversité au sein des communautés américaines et à booster la mobilité internationale afin d'attirer les meilleures talents étrangers et, ainsi, accélérer la croissance économique du pays. Parallèlement, le nombre de cas de COVID-19 aux États-Unis a chuté de manière significative depuis octobre 2020. Une situation qui permet aux États-Unis de s'imposer à nouveau en tant que destination de premier choix pour l'expatriation, à moins que le pays soit touché par une nouvelle vague de la pandémie.
Les politiques d'immigration de Biden
Les politiques d'immigration de Joe Biden ont été décrites par de nombreux experts comme étant « les plus progressistes » que les États-Unis n'aient jamais connues. Biden est non seulement en train d'annuler en toute urgence les politiques hostiles mises en place par Trump, mais il compte également transformer la scène de l'immigration dans son ensemble. Ainsi, il ambitionne à ce que le pays puisse devenir plus accueillant envers les immigrants tout en prenant en main les causes profondes (notamment les crises humanitaires) de la migration irrégulière. Dans un premier temps, Biden a augmenté le nombre de réfugiés qui seront autorisés à entrer aux États-Unis chaque année, passant du plus bas niveau historiquement de 15 000 (sans aucune considération pour les personnes affectées par la persécution politique) sous la présidence de Trump à 125 000, le nombre le plus élevé depuis la présidence de George H. W. Bush.
Le taux d'émission des Green Cards (cartes vertes) pour les professionnels étrangers en fonction du taux de chômage aux États-Unis figurait sur la liste pré électorale des priorités de Biden. En outre, il souhaite exclure les conjoints et les enfants mineurs des titulaires de la carte verte des barèmes établis en matière du nombre de places accordé afin de faciliter le parrainage familial. Aujourd'hui, les États-Unis attribuent 140 000 Green Cards, dont plus de la moitié sont destinées aux personnes à charge. La suppression des plafonds pour les membres de la famille immédiate signifie qu'un plus grand nombre de cartes vertes sera disponible pour les professionnels étrangers et leurs enfants adultes, ainsi que les membres de la famille des citoyens américains. Biden souhaitait également mettre en place un visa temporaire permettant aux membres de la famille immédiate de vivre et travailler aux États-Unis jusqu'à ce qu'ils obtiennent leur résidence permanente. D'autre part, les titulaires d'un doctorat en sciences, en technologie, en ingénierie et en mathématiques devraient aussi être exemptés du barème afin qu'ils puissent obtenir une Green Card grâce à leurs diplômes. Ce qui leur permettrait de mettre à contribution leurs talents pour accélérer la croissance économique des États-Unis.
En ce qui concerne la citoyenneté, Biden s'est engagé à réorganiser le processus de naturalisation des détenteurs de la Green Card, dont les rêves d'obtenir la citoyenneté et le droit de vote se sont envolés sous l'administration Trump. Le nouveau président a exprimé son souhait que les délais de traitement des dossiers soient revus et que les frais prohibitifs soient supprimés de la procédure de naturalisation. Biden reconnaît également que le travail temporaire aux États-Unis encourage les entreprises à contourner la voie légale et à exploiter les travailleurs sans papiers. Il est donc en train de se pencher sur l'élargissement des opportunités et la hausse du nombre de personnes qui sont à la recherche d'un travail temporaire aux États-Unis, en particulier les plus vulnérables et les personnes défavorisées.
Ce qui a changé sous Biden
La semaine dernière, Biden a révoqué le gel sur les Green Cards et les visas de travail ordonné par son prédécesseur pendant la crise de COVID-19. En effet, le gel commandé par Trump a eu un impact néfaste sur les titulaires de visa et autres immigrants légaux. Une situation qui leur a empêché d'entrer aux États-Unis sous le prétexte que leur présence affecterait le marché du travail américain qui a déjà été durement touché par la pandémie. Biden révoque ainsi la proclamation 10014 de Trump en affirmant qu'elle « ne se situe par dans les intérêts des États-Unis ». Selon Biden, la Proclamation 10014 a empêché aux membres des familles américaines et de celles des résidents permanents de se réunir. Ce qui a aussi affecté le flux de talents étrangers vers les États-Unis, sans parler des immigrants qui attendaient d'obtenir leur Green Card. Ce revirement de situation permet ainsi aux États-Unis de rouvrir ses portes à des milliers de personnes qui, jusqu'à présent, étaient rongées par l'incertitude. D'autre part, les entreprises basées aux États-Unis peuvent désormais pousser un grand soupir de soulagement puisqu'elles pourront à nouveau compter sur les nombreux atouts de la mobilité internationale.
Le 20 janvier 2021, dans le cadre de ses réformes de l'immigration, M. Biden a envoyé au Congrès un projet de loi sur l'immigration, appelé « US Citizenship Act de 2021 ». Ce projet de loi vise à soutenir la citoyenneté d'environ 11 millions d'immigrants sans papiers résidant aux États-Unis. Décrit comme « ayant pour but de restaurer l'humanité et les valeurs américaines », il devrait permettre de redynamiser le système d'immigration américain et de garantir des opportunités aux personnes légitimes et méritantes. A savoir que ce projet de loi doit d'abord être approuvé par la Chambre des représentants et le Sénat avant d'être mis en œuvre.
Les visas affectés par les proclamations de Trump
La présidence de Trump a été accompagnée d'une vaste campagne de désinformation avec à l'appui des données biaisées. Ce qui a eu un impact catastrophique sur l'immigration, entraînant ainsi une hausse de la xénophobie. Depuis, tous les sans-papiers aux États-Unis ont été considérés comme des criminels. Les immigrants ont été perçus comme une menace pour la croissance économique et le bon fonctionnement de la société. La pression exercée par Trump a entraîné non seulement la fermeture des frontières mais aussi la séparation des enfants de leurs parents, sans oublier les politiques agressives pour suspendre l'élan de la mobilité internationale et de la liberté de mouvement. Dans un vain effort pour protéger le marché du travail américain de l'invasion extérieure pendant la pandémie, Trump a insisté dans son décret « Hire American Executive » sur l'importance de « Buy American and Hire American », c'est-à-dire, « acheter et recruter Americain ». Une démarche qui s'est avéré préjudiciable aux intérêts économiques du pays.
Les proclamations Covid-19 de Trump 10014, 10052 et 10131 ont ainsi eu un impact sur les visas suivants :
- Le visa H-1B qui permet aux employeurs américains de recruter des travailleurs internationaux sur une base temporaire pour des professions spécialisées dans des domaines comme la biotechnologie, la chimie, l'informatique, l'architecture, l'ingénierie, les statistiques, les sciences physiques, le journalisme, l'économie, l'éducation, la recherche, le droit, la comptabilité, les spécialités commerciales, la théologie, l'art et la médecine. Il faut aussi prendre en compte le fait que Trump avait proposé de restreindre les emplois, une règle à laquelle Biden a mis fin à mi-chemin. Les conjoints d'expatriés ainsi que les enfants (de moins de 21 ans) des titulaires de visas H-1B peuvent désormais demander un visa H-4.
- Le visa H-2B qui permet aux employeurs américains d'embaucher des travailleurs étrangers pour des services non agricoles temporaires ou de la main-d'œuvre saisonnière. Les employeurs sont toutefois tenus d'indiquer au secrétaire américain du département de l'Emploi qu'il y a une pénurie de travailleurs locaux et que le recrutement de travailleurs étrangers n'affectera en aucun cas les salaires et les conditions de travail des travailleurs américains déjà en poste.
- Le visa non-immigrant J-1 pour les participants aux programmes d'échange professionnels et universitaires.
- Le visa L-1 pour les employés des entreprises internationales ayant des branches aux États-Unis et à l'étranger, permettant l'affectation des employés aux États-Unis. Les conjoints des titulaires de visas L-1 sont autorisés à travailler aux États-Unis (avec un visa L-2). Le visa L-1 peut ainsi servir de tremplin vers une Green Card.
Malgré l'annulation de ces gels par Biden, il faut toutefois garder à l'esprit que les demandes de visas temporaires ne seront considérés qu'après le 31 mars 2021, date à laquelle le gel doit expirer. À moins que Biden, qui a déjà salué l'importance des travailleurs saisonniers et temporaires pour les économies locales, n'annonce d'autres changements.