Trois mois après son entrée en vigueur, le Brexit continue à faire couler beaucoup d'encre. La semaine dernière, des centaines de Britanniques se sont faits refouler à leur arrivée en Espagne. D'autres craignent une éventuelle déportation pendant que certains, en France, par exemple, craignent de perdre leur permis de conduire. Voici un aperçu de la situation.
Les médias internationaux rapportent que quelque 500 Britanniques risquent d'être refoulés de l'Espagne incessamment. Ajoutons à cela plus d'une centaine de Britanniques qui ont été forcés de rebrousser chemin peu après leur arrivée dans la ville d'Alicante la semaine dernière. Si la situation semble alarmante, les autorités espagnoles sont claires : pour entrer et séjourner légalement en Espagne pendant plus de 90 jours, les Britanniques doivent avoir le statut de résident approprié. En effet, selon les nouvelles conditions instaurées par le Brexit, les ressortissants britanniques ne sont plus dispensés de l'obligation de visa pour effectuer de courts séjours dans des pays de l'UE. Une règle qui s'applique également aux Européens qui souhaitent se rendre au Royaume-Uni.
Aussi, depuis la semaine dernière, les ressortissants britanniques sont uniquement autorisés à voyager en Espagne pour des raisons essentielles. Et c'est pareil pour les résidents légaux qui se trouvent actuellement en dehors de l'Espagne. Les autorités espagnoles ont donc lancé une sévère mise en garde contre tous les Britanniques qui séjournent actuellement de manière illégale dans le pays. Ceux qui n'ont toujours pas demandé un titre de résidence ou dont la demande a été rejetée doivent impérativement quitter le pays. Qui plus est, selon le Withdrawal Agreement, toute personne qui refuse de quitter le territoire espagnol risque une amende, voire une interdiction de réentrée.
A savoir que l'Espagne compte actuellement quelque 300 000 Britanniques titulaires du statut de résident permanent. Il n'empêche que de nouvelles conditions sont entrées en vigueur depuis peu. Ceux qui tiennent à rester en Espagne doivent attester d'un revenu mensuel d'au moins 2 000 livres sterling, c'est-à- dire, plus de 2 350 euros par mois, ainsi qu'une somme additionnelle de 500 livres sterlings, équivalent à environ 589 euros pour chacun de leurs dépendants. Cette somme peut provenir soit de contrats de travail soit d'une pension mensuelle dans le cas des retraités. La situation se corse donc pour les Britanniques qui se sont installés en Espagne soit dans le but d'y décrocher un emploi ou pour toute autre raison non justifiée.
Permis de conduire britanniques invalides
Mais le calvaire des Britanniques vivant au sein de l'Union européenne ne s'arrête pas là. L'absence d'un accord entre la France et le Royaume-Uni en matière de permis de conduire pose problème. Une situation qui concerne, à ce jour, des milliers de conducteurs britanniques qui vivent et travaillent en France, dont certains dépendent de leur permis de conduire pour gagner leur vie. C'est le 30 décembre 2020 que le Royaume-Uni a signé un accord de commerce et de coopération avec l'Union européenne. Mais cet accord est appliqué de manière provisoire depuis le 1er janvier 2021, du moins jusqu'à ce qu'il soit ratifié par le Parlement européen.
Le gouvernement français fait ressortir que le permis de conduire britannique reste valide dans le cas de courts séjours uniquement, y compris dans le cadre de voyages de tourisme et d'affaires. En revanche, les Britanniques qui vivent en France depuis un certain temps sont obligés d'échanger leur permis de conduire existant contre un permis français. Chose que Adam, un Gallois qui vit actuellement en France, qualifie d'inacceptable. « Je suis actuellement en contact avec le député britannique au Parlement français car j'ai également la nationalité française. J'ai écrit à Nantes, au ministère de l'Intérieur, et au SOLVIT de l'UE. Il ne me reste plus qu'à écrire au président », s'insurge-t-il.
Adam se base sur le fait qu'avant le 31 décembre, personne n'était au courant de cette obligation. « Personne ne nous a dit que la demande devait être faite avant le 31 décembre même pour ceux qui sont arrivés sous le Withdrawal Agreement. Je suis d'avis que la dernière date d'échange devrait être juste après le 4 juillet 2021 en vertu de la WA, qui tient compte de la règle de résidence No. 185 ». Il en profite pour lancer un appel à tous les expatriés britanniques qui se trouvent dans une situation similaire pour contacter leur député britannique. « Il faut qu'on puisse faire pression sur la DVLA pour qu'elle refuse les échanges de permis français selon le même principe. Techniquement, ces échanges sont illégaux. Le député français a appelé ces deux pays à travailler sur un accord et une solution. Je continuerai à lui écrire tous les mois pour assurer un suivi », nous dira-t-il. Et d'ajouter qu'il est hors de question, pour lui, de passer à nouveau le test de conduite pour obtenir un permis français.
A savoir que les expatriés britanniques ont jusqu'au 31 décembre 2021 pour être conformes à ces nouveaux règlements. Autre hic : le fait que les permis de conduire britanniques doivent être renouvelés chaque 10 ans. Or, avec l'entrée en vigueur de ces nouvelles conditions, les personnes concernées sont dans l'incapacité de renouveler leur permis de conduire et, donc, d'utiliser leur permis de conduire pour circuler. D'autant que l'amende fixée en cas de conduite avec un permis invalide peut aller jusqu'à 15 000 euros !
Quid des Européens au Royaume-Uni ?
Toute cette cacophonie ne laisse pas insensible les expatriés au Royaume-Uni, mais aussi ceux qui avaient prévu de s'y rendre. Comme nous le dira Sarah, une Française qui est rentrée du Royaume-Uni en 2019 pour des raisons professionnelles. « Cette situation me rend un peu triste. En effet, je suis partie m'installer dans le nord de l'Angleterre en 2018 pour apprendre l'anglais, un choix qui me trottait depuis 2015. C'était ma première expérience, bien que ça n'ait pas été simple, car j'étais serveuse. J'ai adoré, les gens, leur manière de vivre... En 2019, je suis rentrée en France pour évoluer professionnellement ».
Sarah avait prévu de retourner au Royaume-Uni, mais c'était avant que le Brexit et la crise sanitaire mondiale viennent aggraver les choses. « J'espère pouvoir y retourner avant septembre afin d'obtenir le statut de « Settled ». Je compte prochainement commencer mes recherches d'emploi, avec mon niveau d'anglais et mon diplôme. J'espère pouvoir m'installer définitivement en Angleterre selon le nouveau système à base de point ».
Ce qui est loin d'être le cas de Tifany, une Française qui est rentrée du Royaume-Uni en début d'année. « Les démarches sont clairement compliquées pour obtenir un visa au Royaume-Uni depuis 2021. Surtout, le gouvernement veut limiter les immigrations, et mène donc une politique dans ce sens ». Selon elle, les personnes qui souhaitent avoir une expatriation plus facile devraient plutôt se pencher sur un autre pays de l'Union européenne, sauf si elles ont un vrai projet professionnel avec l'appui d'un sponsor.