S'expatrier en couple ou rencontrer l'amour dans le pays étranger… Ce n'est pas toujours simple de construire la vie à deux. C'est d'autant plus vrai en expatriation, où tous les sentiments peuvent être décuplés. Le chemin à deux tourne parfois court, et le divorce devient la seule option possible. Que faire lorsque l'on réside dans un pays où il est difficile de divorcer ?
Ces pays où divorcer est interdit ou soumis à restrictions
Les Philippines reviennent souvent comme le premier État dans lequel divorcer est interdit. Si la position de l'Église catholique a évolué sur la question (en 2015, le pape François estime que le divorce est parfois « moralement nécessaire »), les Philippines, pays majoritairement catholique, maintiennent les règles de la religion catholique. La mesure touche tous les citoyens philippins, même les expatriés. Un divorce réalisé à l'étranger ne serait pas reconnu aux Philippines. En revanche, un divorce à l'étranger entre un citoyen philippin et une personne étrangère sera reconnu sur le territoire philippin. D'autres reconnaissances existent, mais sont limitées à des cas d'abus.
Le Vatican est le seul autre État à interdire le divorce. Jusqu'en 2011, il était également illégal de divorcer à Malte. Mais suite à un référendum de 2011, les Maltais se sont prononcés pour un « oui » au droit de divorcer. Au Soudan, les femmes continuent de réclamer leurs droits. Les lois du pays, patriarcales, favorisent toujours les hommes. Le divorce n'échappe pas à ce déséquilibre. Les femmes remettent notamment en cause une « loi sur le statut personnel » qui les maintient sous la tutelle du père ou du mari. Malgré des réformes en 2020, faisant suite au soulèvement populaire de 2018-2019 (ayant précipité la chute du dictateur Omal el-Béchir en avril 2019), le compte n'y est pas. Tenues loin des tables de négociation, les femmes ont manifesté le 8 avril 2021 pour protester contre des lois toujours discriminatoires.
En Haïti, il est possible de divorcer pour adultère, sévices et injures, condamnation à une « peine afflictive et infamante », séparation de corps et « incompatibilité de caractère ». D'autres motifs de divorce peuvent être recevables, sous réserve qu'ils n'aillent pas à l'encontre de l'ordre public haïtien.
Quelles options pour divorcer quand on est expatrié ?
La première mesure est de se renseigner sur la loi du pays d'accueil et celle du pays d'origine. En fonction de sa nationalité et de celle du conjoint étranger, il peut être en effet possible de demander le divorce dans le pays de l'un, de l'autre, ou dans le pays de résidence habituelle des conjoints.
Divorcer dans son pays reste un droit pour tout ressortissant marié avec un étranger, que le couple réside ou non dans le pays d'origine de celui qui souhaite divorcer. Mais attention : il faut souvent que le demandeur saisisse en premier le tribunal, pour que celui-ci soit compétent pour juger l'affaire. Si le conjoint a déjà saisi le tribunal de son pays et que celui-ci est compétent, l'autre partie risque de ne plus pouvoir faire valoir la loi de son pays.
Autre précaution à prendre : vérifier que le motif de divorce (par consentement mutuel, par exemple) est reconnu dans le pays de l'autre époux. En l'absence de reconnaissance dans l'autre État, les divorcés risqueraient d'être toujours considérés comme des époux dans cet État. Ils seraient contraints d'opter pour une autre procédure pour faire reconnaître le divorce.
Il faut également prendre en compte le coût du divorce. En France, le divorce par consentement mutuel peut coûter entre 1000 et 4000 euros (entre environ 1090 et 4370 dollars) et jusqu'à 8 000 euros (environ 8740 dollars) pour un divorce conflictuel. Aux États-Unis, le coût peut grimper à plus de 25 000 dollars. Ces prix sont bien sûr donnés à titre indicatif. Tout dépend du motif du divorce, de la présence ou non d'un avocat, de la complexité et de la lenteur de la procédure… D'où l'importance de bien se renseigner à l'avance sur la législation des différents pays. On ne conseille bien sûr pas de penser divorce en pensant mariage, mais plutôt de prendre ses précautions lorsque le divorce devient la seule issue possible.
Divorce international : ce qu'il faut prendre en compte
Le premier élément à prendre en compte est que les législations contraignant le divorce portent davantage atteinte aux droits des femmes. C'est en majorité sur elles que reposent interdictions et contraintes, même lorsqu'elles subissent des violences conjugales. Autre problème : le coût financier. Aux Philippines, par exemple, seule l'annulation du mariage est possible. Le divorce est possible dans de rares exceptions (en cas « d'incapacité psychologique » ou de « défaillance mentale »), mais la procédure judiciaire, longue et coûteuse, n'est accessible qu'aux plus riches. Même contrainte concernant la demande d'annulation du mariage. Contrainte accentuée par le fait que le parquet peut toujours contester le divorce. Des femmes témoignent ainsi avoir vu leur jugement renversé par le parquet, alors même qu'elles avaient invoqué des motifs recevables.
Les contraintes se reportent aussi sur le partage des biens, la garde des enfants, le patrimoine en commun. Là encore, les femmes sont davantage exposées. Les femmes expatriées peuvent être plus fragilisées encore, surtout si elles ne parlent pas la langue du pays et ne bénéficient d'aucun soutien.
D'où l'importance de s'entendre sur le statut matrimonial. Sous quel régime le mariage a-t-il été célébré ? Quels sont les droits des épouses et des époux ? Même prudence concernant les biens achetés après le mariage. À qui appartiendront-ils en cas de divorce ? Les noms des deux époux figurent-ils sur le contrat de logement ? La femme mariée a-t-elle accès aux documents importants (compte bancaire, livret de famille, contrat du logement, voiture, etc.) ? Le pays d'expatriation a-t-il signé la Convention de La Haye sur la protection des enfants ? À qui reviendra l'autorité parentale ?
Divorce à l'étranger : les documents essentiels à avoir
Si les autorités du pays dans lequel est prononcé le divorce sont libres d'exiger toute pièce qu'elles jugent utiles au dossier, certains documents sont indispensables. Chaque époux doit bien entendu être en possession de ses papiers d'identité ; ceux de son pays d'origine, et/ou ceux du pays d'expatriation (carte de résident). Les époux devront présenter une copie intégrale de l'acte de mariage et du contrat de mariage (au cas où un contrat a été établi). La copie intégrale de l'acte de naissance de chaque époux et de chaque enfant entre également dans la liste des documents essentiels à avoir.
La situation patrimoniale et financière des époux doit aussi être évaluée. Chaque époux doit être en possession de ses contrats de travail et bulletins de salaire. Les documents concernant les prêts en cours doivent également être conservés, de même que les contrats immobiliers. Le problème est d'avoir accès à ces documents. Comme dit plus haut, les législations qui limitent le divorce peuvent aussi limiter d'autres droits pour les femmes. D'où l'importance de s'informer en amont sur la législation du pays d'expatriation.