L'annonce a fait grand bruit : après 18 mois de « travel ban », l'Australie s'apprête à rouvrir progressivement ses frontières. Pour les candidats à l'expatriation, c'est une nouvelle opportunité qui se présente. Avec les réouvertures des frontières, l'économie mondiale renoue avec la croissance. Mais que dire de l'hôtellerie, fortement exposée à la conjoncture Covid-19, et déjà en crise avant la pandémie ? A quelles perspectives de carrière s'attendre ?
Les métiers de l'hôtellerie à l'épreuve de la crise sanitaire
Vaste et protéiforme, le secteur de l'hôtellerie regroupe plusieurs catégories : les indépendants, l'hôtellerie de luxe, les chaînes hôtelières, et leurs voisins directs : la restauration. La réouverture des frontières a remis en lumière des métiers fortement malmenés par la crise sanitaire : agent de réservation, gouvernant, réceptionniste, valet de chambre, maître d'hôtel, manager, chargé de communication événementielle, serveur, cuisinier, revenue manager (ou yield manager)... Le secteur recrute et le fait savoir. Australie, Canada, France, Royaume-Uni, États-Unis... de nombreux pays touristiques manquent de bras. Rien qu'aux États-Unis, le taux d'occupation des hôtels a bondi de 69,6% cette année (chiffre relevé en juillet ; NBC News) : c'est la plus forte hausse depuis 2019. Les zones touristiques comme Miami ou Virginia Beach ont enregistré des records de fréquentation. L'ouverture des frontières américaines en novembre prochain accélérera certainement cette progression. Une aubaine pour les candidats à l'expatriation. Mais le secteur hôtelier fait-il toujours rêver ? La crise sanitaire ne le soumet-elle pas encore un peu plus aux aléas de la conjoncture ?
L'exemple de Boston confirme des disparités entre les villes, et les secteurs : l'hôtellerie de luxe semble se remettre plus rapidement ; la situation des indépendants est critique, et les force à se fondre dans les grands groupes. Selon l'American Hotel and Lodging Association, le chiffre d'affaires du secteur hôtelier de Boston n'a atteint que le tiers du niveau de 2019. La ville a souffert de la pandémie et continue de lutter pour retrouver son attractivité. Pour l'US Travel Association, il faudra attendre 2025 pour retrouver un secteur hôtelier florissant. Même prudence concernant l'Europe. Pour RevPAR Trends, institut d'analyse de tendances et de données sur l'industrie hôtelière, la conjoncture oblige à la retenue. Si l'hôtellerie européenne a connu une forte hausse cette année (+66,7% par rapport à 2020), elle reste fragile, comparativement à 2019 (-37% de chiffre d'affaires). La Hongrie, la République tchèque ou l'Autriche accusent le plus de pertes. L'Italie, la France, le Royaume-Uni, l'Espagne ou l'Allemagne s'en sortent mieux.
Il faut rappeler que l'industrie hôtelière était déjà en tension avant la crise sanitaire. L'arrivée d'Airbnb et des maisons d'hôtes a fortement impacté le secteur, et ce, dans le monde entier. L'hôtellerie lutte et se réinvente : multiplication des apparts hôtels, organisation de séminaires et forums d'entreprise, formules spéciales business... Elle rappelle cependant que pèsent sur ses épaules de nombreuses contraintes que n'ont pas ses concurrents. Aux charges salariales s'ajoutent toutes les charges techniques et d'hygiène. La Covid-19 est une contrainte supplémentaire. Mais la réouverture des frontières fait espérer à tous une embellie sur le plan économique. Karim Djidjelli, responsable pédagogique du CMH - établissement spécialisé dans le management hôtelier international - confirme : « notre secteur reste aujourd'hui plus que jamais attractif et, malgré les apparences trompeuses, attire beaucoup de jeunes, désireux de devenir les précurseurs de ce nouveau monde et contribuer à l'essor du secteur de l'hôtellerie ». (source : studyrama)
Hôtellerie : ouverture des frontières et perspectives de carrière
Troisième destination touristique d'Afrique, le Sénégal était connu, avant la Covid-19, pour l'excellence de ses formations hôtelières. Une renommée internationale, qui lui a permis de nouer des partenariats à travers le monde. Plus largement, 2019 est une année faste pour l'hôtellerie africaine. Avec le Sénégal, l'Égypte, le Nigeria et le Maroc sont les pays les plus attractifs. La crise sanitaire impacte donc un marché en plein essor. Le Sénégal et l'Égypte ont rouvert toutes leurs frontières. Le Maroc et le Nigéria n'ont ouvert que leurs frontières aériennes. Face à la crise, ces États, qui avaient développé une stratégie d'ouverture à l'internationale (conversion de tous les diplômes et nom des métiers en anglais, partenariats avec les établissements étrangers, alternances et stages...) se recentrent sur leur main-d'œuvre locale. Même politique pour le Kenya ou le Cap Vert, autres pays touristiques. Avec un chômage en hausse - 12,8% au Maroc, 9,8% en Égypte, 13,4% au Cap Vert en 2020 - les pays misent avant tout sur la main-d'œuvre locale : accueil, entretien, restauration, marketing, développement des portefeuilles business, management, direction d'hôtels... ce sont tous les secteurs qui se remettent en marche avec l'ouverture des frontières.
Même situation en Thaïlande, où la réouverture des frontières a permis le retour de la clientèle étrangère. Mais côté emploi, le pays mise davantage sur la main-d'œuvre locale. Le tourisme a représenté près de 20% de son PIB en 2019 (chiffre Voyage d'affaires). Cela n'empêche pas la création de nouveaux projets hôteliers, avec autant de postes à la clé. La Thaïlande entend renouer avec les années fastes, et retrouver la clientèle étrangère (plus de 40 millions de touristes en 2019). Côté expatriés, le pays fait surtout appel aux fortunés : investisseurs, retraités, professionnels qualifiés... Pour eux, la Thaïlande a mis en place une série de mesures incitatives. Le défi est grand : attirer 1 million d'expatriés d'ici à 5 ans.
L'annonce des autorités australiennes a fait grand bruit. Plus de « zéro Covid », ou, du moins, un taux de vaccination à 80%. L'Australie va progressivement rouvrir ses frontières. Plébiscité par les expatriés, l'Australie est un employeur régulier de main-d'œuvre étrangère. Le secteur de l'hôtellerie est particulièrement demandeur, employant essentiellement des étrangers en permis Vacances-Travail. Ouverture des frontières progressive, et emplois ciblés. L'Australie mise sur le Royaume-Uni, et entend embaucher 500 immigrés britanniques. Pour les attirer, le pays propose notamment un chèque de 1000$ et la prise en charge des frais de quarantaine. Pas sûr que cela suffise. Le Brexit n'en finit pas de secouer le royaume britannique. Lui aussi souffre d'une pénurie de main-d'œuvre étrangère. La Covid-19 a remis en question les choix de vie et perspectives de carrière. De nombreux travailleurs se sont détournés du secteur hôtelier, sans intention d'y revenir. L'Australie se tournera-t-il vers d'autres pays ? Le pays reste confiant, certain de pouvoir attirer de nouveau la main-d'œuvre étrangère.
Pour le Canada, la question ne se pose pas. Le pays, dont les frontières sont rouvertes depuis le 7 septembre, emploie massivement et le fait savoir. Via sa plateforme « guichet emploi », le gouvernement canadien met à disposition une liste des emplois les plus demandés. Cuisinier, superviseur, serveur, réceptionniste, chargé d'accueil, directeurs marketing font partie des métiers les plus en tension. Une véritable opportunité pour les candidats à l'immigration : le Canada fait partie des plus gros pourvoyeurs d'emplois pour les expatriés, avec la possibilité de faire carrière. Covid-19 oblige, mieux vaut être vacciné avant d'entreprendre toute démarche. L'anglais est également le passeport pour une évolution de carrière plus aisée. La maîtrise du français est aussi un atout. Tout comme en Australie ou le Royaume-Uni, le Canada aussi manque de bras. Les professionnels du secteur s'alarment quant à leurs difficultés de trouver du personnel.
Quel avenir pour le secteur hôtelier ? La Covid-19 est venue secouer une industrie déjà en tension. Une opportunité pour les candidats à l'expatriation, mais aussi un risque. Les ouvertures/fermetures de frontières impactent directement le secteur. L'hôtellerie de luxe n'a pas échappé à la crise. Les fortes demandes provenant des pays recruteurs peuvent cependant laisser entrevoir une embellie. Reste à espérer une confirmation de cet essor en 2022.