S'expatrier dans une économie émergente : opportunités et défis

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Écrit par Asaël Häzaq le 15 novembre, 2023
S'expatrier dans une économie émergente est un choix audacieux pour ceux et celles qui cherchent à évoluer dans des environnements en pleine croissance, souvent marqués par une dynamique économique vigoureuse mais des évolutions sociales plus lentes. Avant de prendre le large, il est crucial de comprendre ce que signifie réellement « économie émergente » et comment ces pays en évolution rapide offrent des opportunités uniques et des défis stimulants.

Qu'appelle-t-on « économie émergente » ?

On appelle « pays émergent » un pays qui connaît une forte croissance économique, mais avec une évolution sociale plus lente. On attribue le terme à Antoine Van Agtmael, économiste néerlandais qui l'utilise pour la première fois en 1981, pour parler des pays en développement attractifs pour les investisseurs. On a tout d'abord parlé de « marchés émergents ». L'expression, définissant donc uniquement la sphère économique, s'est étendue sur les pays entiers, et a donné « pays émergent ». L'accent reste mis sur le fort progrès économique. Une forte progression économique qui va souvent de pair avec une hausse des inégalités sociales. Car les évolutions sociales ne suivent pas le rythme du boom économique.

On comprend donc que les pays émergents ne sont pas toujours les mêmes. Il n'existe aucune liste officielle de pays émergents, tant les paramètres pour définir un pays émergent sont nombreux. Les études des économistes sont tout aussi nombreuses, et ne tombent pas toujours sur les mêmes conclusions. La définition même de « pays émergent » a varié au cours du temps, et continue de changer. On peut toutefois s'accorder sur quelques « tendances ».

En 2007, la Banque mondiale répertorie la Chine, l'Inde et d'autres pays parmi les économies émergentes. En 2008, le cabinet britannique de conseil et d'audit PriceWaterhouseCoopers compte 20 pays émergents dont le Brésil, la Russie, l'Inde, la Chine (BRIC), pays qualifiés d'émergents depuis 2005, l'Argentine, l'Afrique du Sud ou les Philippines. Selon les interprétations des économistes, le Chili et la Hongrie sont qualifiés ou non de pays émergents.

Les économies émergentes en 2023

Quels sont les pays émergents en 2023 ? Les pays émergents d'il y a 20 ans le sont-ils encore aujourd'hui ? En août 2023, les conclusions du sommet des BRICS (l'Afrique du Sud a rejoint la formation initiale) annoncent un futur élargissement. L'Iran et l'Argentine, l'Égypte, l'Arabie saoudite, les Émirats arabes unis (EAU) et l'Éthiopie comptent déjà parmi les futurs membres des BRICS (dès janvier 2024), qui passeront donc de 5 à 11 États. Quelque 40 autres États ont manifesté le désir d'intégrer les BRICS ou se sont montrés intéressés par l'organisation. Parmi eux, le Nigéria et Cuba. Les BRICS incarnent toujours le noyau fort des États émergents et semblent bien déterminés à incarner l'autre voie, concurrente des Etats-Unis et du dollar. Comment aborder une expatriation dans ces pays ?

Tout d'abord, on constate que plusieurs de ces économies émergentes ont l'habitude d'accueillir des expatriés. C'est le cas pour la Chine et surtout les EAU. L'Inde attire les touristes. L'Argentine attire, et les touristes, et les nomades numériques, depuis le lancement du visa en mai 2022. L'Arabie saoudite s'ouvre à l'expatriation. En pleine bataille d'influence avec les EAU, le pays veut faire de sa capitale, Riyad, le nouvel Eldorado des expatriés, devant Dubai.

On rappelle aussi que tourisme et expatriation restent très différents. Le touriste, même s'il peut rester plusieurs mois, n'est là que provisoirement. Il ne vit pas au rythme des autres habitants, et reste davantage dans les zones touristiques. L'expatrié vit sur place. Son ressenti peut être très différent selon son lieu de résidence. Inversement, les locaux pourront avoir un ressenti différent selon qu'ils sont habitués ou non à côtoyer des étrangers. Car même dans des pays habitués à accueillir des expatriés, tout dépend de la zone d'habitation, du secteur d'activité de l'expatrié, de sa maîtrise ou non de la langue du pays…

S'expatrier dans une économie émergente : comment se préparer ?

Comme pour toute expatriation, une préparation minutieuse s'impose. Quelle est la situation au Brésil, en Éthiopie, en Égypte, en Arabie saoudite ? Le marché du travail est-il dynamique ? Quelle est la culture d'entreprise ? Les entreprises sont-elles plutôt ouvertes à l'embauche d'étrangers ; est-il facile de trouver du travail ? Mais ici, il ne faut pas seulement s'intéresser à l'aspect économique. Les considérations sociales importent tout autant. Car même si l'économie tant à vouloir faire disparaître les questions sociales, elles se manifestent au point de modifier la perception dans le monde du travail, et la perception que l'entreprise a d'elle-même. Les débats sur la préservation de la santé mentale, sur la suppression des open spaces ou le télétravail font partie de cette dimension sociale.

Or, on sait que les évolutions sociales des pays émergents sont moins rapides que les évolutions économiques. C'est encore plus vrai dans les zones rurales, éloignées des villes et ces centres de pouvoir. Certains expatriés se disent mal à l'aise avec cette ambivalence. Ils concèdent que les grandes puissances composent elles aussi avec une hausse des inégalités et une mauvaise répartition de la richesse. Ces différences leur semblent néanmoins plus flagrantes dans les économies émergentes. D'autres avancent l'argument politique. Est-il possible de travailler en Chine, en Arabie saoudite ou en Iran « malgré tout » ? Peut-on vivre en constatant que l'on bénéficie d'un meilleur traitement que les nationaux, ou que d'autres expatriés ? Oui, répondront certains, qui ne se sentent pas responsables des orientations politiques prises par ces États. Du reste, l'ouverture d'un pays comme l'Arabie saoudite pourrait « forcer » la prise en compte d'autres valeurs, et profiter aux nationaux. Les EAU ont progressivement assoupli leur politique, justement pour attirer les étrangers.

Les plus mesurés rappellent cependant que tout n'est pas rose, même aux Émirats arabes unis. L'expatrié, lui, a un choix. Il peut choisir un autre pays. Il peut aussi choisir de rester sur place tout en étant conscient des nombreux défis que l'économie émergente a à relever.

A propos de Asaël Häzaq

Titulaire d'un Master II en Droit - Sciences politiques ainsi que du diplôme de réussite au Japanese Language Proficiency Test (JLPT) N2, j'ai été chargée de communication. J'ai plus de 10 ans d'expérience en tant que rédactrice web.