Nouveaux visas en vue pour attirer les talents étrangers. Les professionnels qualifiés sont toujours aussi recherchés par des États qui, dans le même temps, durcissent leurs règles d'immigration. La priorité va très nettement vers l'immigration économique très qualifiée. Décryptage.
Canada
Les étudiants étrangers touchés par la hausse du chômage
Faut-il parler de la fin du « rêve canadien » ? D'après les statistiques officielles, le chômage des jeunes frise les 12 %. De l'aveu des concernés, trouver un emploi devient de plus en plus difficile. Les étudiants étrangers subissent déjà la hausse du coût de la vie, alimentée par la flambée des loyers. Faute de pouvoir travailler à plein temps, ils sont contraints d'occuper des emplois précaires. L'impossibilité de justifier d'une expérience de travail au Canada les pousse également vers les métiers les moins rémunérateurs. Autre difficulté : les secteurs d'activité, limités pour les étudiants étrangers.
Difficile d'étudier sereinement dans ces conditions, d'autant plus que les frais de scolarité explosent. Les étudiants étrangers, qui paient déjà bien plus cher que les nationaux, voient leurs frais de scolarité s'envoler.
La stratégie gouvernementale pour lutter contre la pénurie de main-d'œuvre a-t-elle atteint ses limites ? C'est ce que reconnaît le Premier ministre Justin Trudeau, qui évoque une politique ayant dépassé son objectif. Trudeau parle désormais de « reprendre le contrôle de la situation » et de « réduire ces chiffres ». Comprendre : réduire le nombre de résidents temporaires, notamment celui des étudiants étrangers. En janvier, le gouvernement annonce plafonner le nombre d'étudiants internationaux et augmenter le seuil de revenu pour candidater. En avril, il lance un nouveau plan visant à réduire le nombre de résidents temporaires. De leur côté, les universités, dont certaines institutions prestigieuses, craignent des difficultés financières, les étudiants étrangers contribuant largement à leur financement.
Retour du plafonnement des heures de travail hors campus pour les étudiants
Nouvelles restrictions en vue pour les étudiants étrangers. Le 29 avril, le ministre de l'Immigration Marc Miller met fin à la mesure autorisant les étudiants étrangers à travailler plus de 20 h par semaine. Décision effective depuis le 30 avril. La mesure, actée durant la crise sanitaire pour répondre à la baisse de revenus des étudiants, ne sera pas reconduite. Pour les détracteurs, la mesure servait surtout à lutter contre les importantes pénuries de main-d'œuvre.
En plafonnant les heures de travail des étudiants étrangers, le Canada dit s'aligner sur d'autres pays (comme l'Australie). De plus, de nombreuses études montrent l'impact négatif d'un trop grand nombre d'heures de travail sur les études. D'après les données internes du gouvernement, plus de 80 % des étudiants étrangers travaillent plus de 20 h par semaine. Marc Miller rappelle que le but du permis d'étude est d'étudier, non de travailler. Le gouvernement se dit néanmoins conscient des conséquences de la hausse du coût de la vie sur les finances des étudiants. Le nombre d'heures de travail passera à 24 h par semaine dès septembre. En revanche, les étudiants étrangers sont libres de travailler sans limites lorsqu'ils ne sont pas en période d'études (durant les vacances d'été, par exemple).
Québec : une croissance démographique portée par l'immigration
Le dernier rapport de l'Institut de la statistique du Québec relève des chiffres inédits : en 2023, 50 % des provinces québécoises ont enregistré les taux de croissance les plus élevés depuis le début des relevés statistiques (en 1986-1987). Montréal arrive largement en tête, avec une hausse de 4,3 % de sa population (+ 89 600 habitants). C'est près du double de la croissance démographique de l'ensemble de la province (+2,3%). Montréal a certes perdu un grand nombre de résidents, partis vivre dans d'autres provinces. Mais la ville a accueilli un nombre tout aussi important de nouveaux résidents étrangers. La situation de Montréal n'étonne pas les analystes ; ils rappellent que la démographie de la ville est portée par l'immigration temporaire depuis plusieurs années. Les ressortissants étrangers choisissent davantage Montréal.
Si l'immigration est moins élevée dans les autres villes, elle atteint néanmoins des records. La ville de Québec gagne 20 678 habitants en 2023, dont 18 494 nouveaux résidents expatriés. Les régions du Centre-du-Québec, de la Mauricie, de l'Estrie ou de la Montérégie enregistrent également des records. D'après les statistiques officielles, l'immigration économique représente 69 % des arrivées de 2023. Les immigrants permanents viennent majoritairement de France (13 %), du Cameroun (11,8 %) et de Chine (11,1 %).
Vers une nouvelle législation sur la citoyenneté canadienne par filiation
Le Canada réforme sa législation sur la citoyenneté pour l'étendre à davantage de personnes éligibles. Le projet de loi a été déposé le 23 mai par Marc Miller, ministre de l'Immigration. Nommé « projet de loi C-71 », il permettra aux enfants de citoyens canadiens nés à l'étranger de transmettre la citoyenneté à leurs enfants. Il permettra également aux « Canadiens perdus » de retrouver leur citoyenneté. Sont ici visés les ressortissants qui n'ont jamais pu faire valoir leur citoyenneté canadienne, à cause d'imbroglios d'ordre législatif.
Le projet de loi intervient suite à la décision de la Cour supérieure de justice de l'Ontario. En décembre 2023, la Cour juge la loi actuelle, qui limite la citoyenneté par filiation à la première génération, inconstitutionnelle. S'alignant sur cette décision, le ministre de l'Immigration estime que la loi actuelle exclut des ressortissants ayant pourtant des liens avec le Canada. Or, ces exclusions ont des conséquences concrètes et durables sur la vie des personnes concernées (lieu de résidence, études, accès à l'emploi, etc.).
Seront éligibles les parents nés à l'étranger ou ayant adopté des enfants à l'étranger qui ont vécu au moins 1095 jours cumulés (environ 3 ans) au Canada avant la naissance ou l'adoption de l'enfant. Mais pour l'instant, la loi n'en est qu'au stade de projet. Miller s'engage à délivrer plus de détails en cas d'adoption de la loi au Parlement.
Émirats arabes unis (EAU)
Lancement du visa « Blue Residency »
Les EAU ont trouvé une nouvelle manière de montrer leur engagement pour la préservation de l'environnement. Le 15 mai, l'État a lancé « Blue Residency », visa de résidence de longue durée spécialement dédié aux professionnels étrangers travaillant dans l'environnement et la durabilité. Plus précisément, le visa est destiné aux talents étrangers ayant apporté une « contribution exceptionnelle » à la préservation de l'environnement aux EAU comme à l'international. Sont concernés : les membres d'organisations internationales et d'associations non gouvernementales, les activistes, chercheurs, lauréats de prix mondiaux, etc. Les candidatures s'effectuent en ligne, auprès de l'Autorité fédérale pour l'identité, la citoyenneté, les douanes et la sécurité portuaire.
Dubai lance son Dubai Gaming Visa
C'est l'une des industries ayant le mieux résisté à la crise sanitaire. En 2024, le jeu vidéo continue son essor, avec plus de 3 milliards de joueurs dans le monde, pour une richesse supérieure à 280 milliards d'euros. L'industrie du jeu est justement en pleine expansion à Dubaï, qui entend s'imposer sur ce nouveau marché grâce à son nouveau visa : le « Dubai Gaming Visa ». Le visa fait partie du « Dubai Progam for Gaming 2033 », programme pensé pour attirer les talents étrangers de l'industrie du jeu vidéo, et asseoir Dubaï comme nouvelle capitale du gaming mondial. Le visa ne s'adresse pas seulement aux joueurs de jeu vidéo (dont les professionnels de l'e-sport), mais vise l'écosystème du gaming : développeurs, créateurs de contenus, professionnels et experts du jeu, etc. L'Émirat de Dubaï cible aussi les talents locaux, qui pourront profiter de l'émulation créée pour apprendre et travailler avec les professionnels étrangers.
Le Dubai Gaming Visa est un visa de résidence de longue durée. Le pouvoir promet des exemptions de taxes, un soutien aux startupers et investisseurs étrangers, de nombreuses opportunités professionnelles et des salaires élevés. Pour postuler, le candidat doit avoir au moins 25 ans, être expérimenté dans son domaine, preuves à l'appui (participations, victoires à des tournois de e-sport, expériences professionnelles, etc.). Des tournois d'e-sport et autres évènements mondiaux de gaming seront spécialement organisés à Dubaï. Les talents étrangers éligibles recevront un certificat d'accréditation mention « Créatif et talentueux ».
Thaïlande
Réforme fiscale : facture salée pour les expats ?
Entrée en vigueur depuis janvier 2024, la réforme fiscale thaïlandaise touchera certains expatriés, dont les retraités. Le ministère des Finances a annoncé que tous les résidents étrangers devront déclarer leurs impôts sur le revenu à partir de mars 2025. L'impôt prendra pour base le revenu de base tel que défini par le Bureau de l'immigration. Selon les premières estimations, un expatrié pourrait devoir payer 71 000 bahts, soit près de 2000 dollars d'impôts. La réforme fiscale intervient alors que le pays est confronté au vieillissement de sa population. Il s'agit pour l'exécutif d'augmenter l'assiette fiscale afin d'obtenir davantage de ressources. La réforme entend également réduire les inégalités entre les locaux et les ressortissants étrangers. En effet, depuis 1985, les expatriés profitaient d'un vide juridique leur permettant d'échapper à l'impôt. L'administration fiscale préconise aux ressortissants étrangers de solliciter un expert en matière fiscale pour vérifier si leur pays d'origine et la Thaïlande ont conclu une convention fiscale de non double imposition. La présence d'une convention pourrait alléger le montant de l'impôt. La Thaïlande a conclu des conventions fiscales avec une soixantaine d'États, dont l'Australie, la Nouvelle-Zélande, le Canada, l'Allemagne, l'Italie, la France, le Royaume-Uni, les États-Unis et les Émirats arabes unis.
Visas : assouplissements pour booster l'économie
Mardi 28 mai, le gouvernement thaïlandais a adopté une série de mesures destinées à relancer l'économie. L'exécutif a étendu les périodes de séjour pour plusieurs catégories de ressortissants étrangers :
- Les étudiants étrangers de 3e cycle pourront rester un an après l'obtention de leur diplôme.
- À partir du 1er septembre, les retraités étrangers bénéficieront d'assouplissements concernant les règles de l'assurance.
- Les nomades numériques pourront prétendre au « visa de destination en Thaïlande » (DTV). Le DTV est réservé aux travailleurs à distance, aux musiciens, aux sportifs professionnels et aux touristes voyageant pour raison médicale. Le DTV permettra de séjourner 180 jours sur le territoire, avec de possibles prolongations jusqu'à 5 ans. Le visa coûtera 10 000 bahts (environ 272 dollars) pour 180 jours de séjour. Les membres de la famille pourront également partir dans le cadre du DTV.
- Un plus grand nombre de touristes étrangers pourra profiter de l'exemption de visa (séjours de 60 jours maximum). Jusqu'alors, 57 pays bénéficiaient de l'exemption. Ils seront 93 à partir de juin 2024 (Royaume-Uni, Australie, UE, États-Unis…). Les étrangers devront toujours communiquer leur adresse thaïlandaise à leur arrivée sur le territoire, mais n'auront plus à demander de prolongation de visa s'ils souhaitent rester plus de 30 jours.
Annoncées par le porte-parole du gouvernement Chai Wacharonke, ces nouvelles mesures ciblent les grandes catégories d'expatriés et de voyageurs étrangers. D'après le ministère du Tourisme et des Sports, la Thaïlande entend accueillir 35 millions de touristes étrangers en 2024.
Visa de 10 ans pour les cadres et experts étrangers
Nouvelle réforme pour attirer les talents étrangers. En mai dernier, la Thaïlande a acté la création d'un visa spécial de 10 ans réservé aux cadres et experts étrangers travaillant dans le corridor économique oriental (Eastern Economic Corridor – EEC). Objectifs : répondre au manque de main-d'œuvre qualifiée et soutenir le développement des industries de pointe (santé, numérique, biotechnologie, véhicules électriques…). Auparavant, le visa était limité à 5 ans. Le nouveau visa de 10 ans sera à entrées multiples tout en restant lié à la durée du contrat de travail.
Le gouvernement distingue 4 types d'expatriés éligibles au visa EEC : les cadres, les spécialistes, les professionnels expérimentés, et les personnes à charge. Les détenteurs du visa bénéficient en outre d'un taux d'impôt sur le revenu abaissé à 17 %, contre 35 % maximum pour le taux progressif en vigueur. La Thaïlande entend attirer près de 3 milliards de dollars d'investissements et devenir un nouveau pôle stratégique de l'Asie du Sud-Est.
France : demande de remboursement des soins médicaux à l'étranger accessible en ligne
Depuis le mois dernier, il est possible de demander le remboursement de soins médicaux effectués à l'étranger sur Ameli.fr, la plateforme de l'assurance maladie française. Grâce à la carte européenne d'assurance maladie (CEAM), le remboursement était déjà facilité pour les usagers européens voyageant dans les pays de l'Espace économique européen (EEE), en Suisse ou au Royaume-Uni. En effet, la CEAM, qui assure une prise en charge dans les mêmes conditions que celles de son pays d'origine, reste utilisable malgré le Brexit. Les ressortissants non européens résidant en France et voyageant dans l'EEE, la Suisse ou le Royaume-Uni pourront utiliser la CEAM excepté dans les pays suivants : Danemark, Islande, Norvège, Liechtenstein, Suisse.
En revanche, pas de prise en charge simplifiée (par exemple, une avance sur les frais médicaux) pour les ressortissants européens ou non européens voyageant hors EEE. Charge à l'expatrié de régler tous ses frais de santé, puis d'en demander le remboursement à son retour en France. Jusqu'à présent, la démarche se faisait uniquement via un formulaire papier, accompagné de tous les justificatifs nécessaires (envoi postal). Engagée dans une politique de numérisation de ses services, la France rend désormais la démarche accessible en ligne. L'État promet un traitement des dossiers mieux sécurisé et plus rapide. Pour faire sa démarche, l'usager devra avoir un compte créé sur le site Ameli.fr. En cas de difficulté ou pour les dossiers complexes, il pourra se rendre au guichet de sa Caisse d'assurance-maladie.
Italie : droit d'entrée pour visiter Venise
L'une des villes les plus prisées des touristes a lancé un nouveau programme pour juguler la masse touristique. Depuis le 25 avril, impossible de visiter Venise sans s'acquitter d'une taxe symbolique de 5 euros. Les contrevenants risquent une amende pouvant aller jusqu'à 300 euros. Le paiement peut s'effectuer simplement via smartphone. Des kiosques sont également disponibles pour les visiteurs n'ayant pas de smartphone. À noter que la taxe doit être payée pour toute visite entre 8 h 30 et 16 h. Il reste donc possible d'entrer à Venise sans payer en dehors de cette plage horaire.
À Venise, la lutte contre le tourisme de masse est un enjeu majeur. Quelques semaines avant l'introduction de la taxe, l'UNESCO a recommandé d'inscrire Venise sur la liste du Patrimoine mondial en péril. L'organisation estime que le surtourisme a un impact négatif sur la ville.
La taxe visait à décourager les touristes de visiter Venise les jours de pointe. Mais après un mois de mise en service, on constate que les touristes sont toujours là, en nombre. Les 5 euros de taxe ne découragent personne, au contraire. Une semaine après la mise en vigueur de la taxe, la mairie avait déjà engrangé 700 000 euros. Soit, la recette qu'elle espérait collecter en un mois. Les locaux réprouvent la réforme, qu'ils jugent inefficace pour lutter contre le surtourisme. La mairie leur promet des retombées fiscales avantageuses. Les locaux restent sceptiques.
Union européenne : renforcement de la coopération pour lutter contre les délits routiers commis à l'étranger
Intouchables, les automobilistes étrangers ? Certains auteurs d'infractions le pensent. Ils se montrent plus laxistes avec le Code de la route du pays étranger, certains de ne pas recevoir d'infraction. Ils misent justement sur leur statut « de passage dans le pays étranger » pour commettre des infractions en toute immunité. Dans les faits, quelque 40 % des infractions de circulation transfrontalières sont impunies.
Mais l'UE sonne la fin de la partie. Le 24 avril, les députés européens renforcent les règles de coopération et d'échanges d'informations entre les États. Parmi ces règles, l'obligation de répondre aux demandes d'un pays de l'UE sans délai, ou dans les 2 mois suivants la réception d'informations au plus tard. Le pays européen dans lequel l'infraction a eu lieu pourra délivrer un avis d'infraction routière dans les 11 mois. De quoi rattraper le ressortissant étranger jusqu'à chez lui. De plus, le pays de résidence du ressortissant a 2 mois pour se manifester auprès du contrevenant.
Les nouvelles règles élargissent la liste des infractions visées par le renforcement de la coopération européenne. Au traditionnel excès de vitesse s'ajoutent le passage au feu rouge, la conduite en état d'ivresse, le délit de fuite, le franchissement d'une ligne continue, ou encore le stationnement et le dépassement dangereux. Si le Parlement a adopté la réforme, elle doit encore passer entre les mains du Conseil européen. Les pays de l'UE auront ensuite 30 mois pour l'appliquer.
Suisse
Vers un triplement des frais pour étudier dans les écoles polytechniques
Mercredi 29 mai, le Conseil national (représentant de la population suisse) décide de tripler les taxes payées par les étudiants étrangers inscrits dans les Écoles polytechniques fédérales (EPF) : l'EPF de Lausanne (EPFL), et l'EPF de Zurich (EPFZ). La décision est prise au cours du débat sur le financement de la formation et de la recherche. Elle intervient alors que le Conseil fédéral (gouvernement suisse) a envisagé de baisser le budget des EPF de 100 millions de francs suisses. Mais la coupe proposée par l'exécutif est finalement retoquée. Pour les opposants à cette mesure, baisser le budget rendrait les EPF moins compétitives, notamment dans la recherche. La mesure est jugée contre-productive, à l'heure où les États rivalisent pour attirer les meilleurs étudiants étrangers.
La décision du Conseil national divise. Actuellement, les étudiants étrangers paient les mêmes frais que les nationaux. Les partis de gauche et le Conseil fédéral se prononcent contre la mesure. Le Conseil national a néanmoins maintenu sa décision malgré les oppositions. Si la mesure était actée, les frais de scolarité pour les étudiants étrangers passeraient de 1560 à 4480 francs suisses annuels. Corinne Feuz, porte-parole de l'EPFL, refuse d'opérer une distinction entre les étudiants. Elle rappelle que « le coût annuel de la scolarité est le même pour tous, quelle que soit la nationalité ou le pays de diplôme : soit 780 francs suisses par semestre. » L'EPFZ et l'EPFL comptent un peu plus de 30 % d'étudiants internationaux.
Coupes budgétaires et pénuries de main-d'œuvre
Temps gris sur la Suisse. D'après l'OCDE, 2024 sera une année morose, avec 1,1 % de PIB estimés. L'inflation pèse toujours sur le pouvoir d'achat, et l'État se serre la ceinture. Si le chômage remonte légèrement (4,4 %), le pays est toujours en pénurie de main-d'œuvre qualifiée. L'OCDE propose de se tourner notamment vers les travailleurs étrangers. Pour l'instant, l'État taille plutôt dans les caisses : le gouvernement envisage de baisser de 1,25 milliard de francs suisses sa contribution à l'assurance chômage. La droite, opposée à l'immigration économique pour résoudre la pénurie de main-d'œuvre, presse le gouvernement de durcir les règles du droit d'asile. De son côté, le Conseil fédéral demande une rallonge de 255 millions de francs suisses pour son budget dévolu à la migration.
Allemagne
Nouvelles règles pour faciliter l'immigration économique
Nouvelles mesures pour les travailleurs qualifiés non européens. L'Allemagne vient de lancer l'Opportunity Card, permis de séjour temporaire d'un an permettant aux étrangers non européens de venir chercher un emploi en Allemagne. Opérationnelle depuis le 1er juin, l'Opportunity Card permet aux ressortissants étrangers de travailler à temps partiel (20 h maximum par semaine) ou d'effectuer des stages d'essai (2 semaines maximum). Après l'obtention de son travail, le ressortissant étranger pourra demander une carte de résident long séjour ; il bénéficiera d'une procédure simplifiée grâce à son emploi.
L'Opportunity Card est un permis à points. Il faut au moins avoir 6 points pour être éligible. Le permis est réservé aux professionnels étrangers justifiant d'au moins 2 ans de formation professionnelle ou ayant un diplôme universitaire correspondant au poste souhaité. Les candidats à l'Opportunity Card devront également maîtriser l'allemand ou l'anglais et prouver qu'ils peuvent subvenir à leurs besoins durant leur séjour (preuve de capacité financière, emploi à temps partiel en Allemagne…). On préconise de détenir un peu plus de 12 000 euros.
Les points du permis sont attribués en fonction de plusieurs critères. Par exemple, avoir moins de 40 ans au moment de la candidature ou avoir déjà séjourné en Allemagne (même en touriste) octroie 1 point. Détenir une formation professionnelle reconnue en Allemagne délivre 4 points. Avoir au moins 5 ans d'expérience dans son domaine d'activité donne 3 points. Les candidats peuvent postuler devant le consulat de leur pays d'origine ou en Allemagne, au sein d'un bureau local d'enregistrement des étrangers.
Hausse de la taxe sur les billets d'avion
Voyager depuis l'Allemagne deviendra certainement plus cher. C'est la conséquence de l'augmentation de la taxe sur les billets d'avion (taxe aviation civile - Luftverkehrsabgabe) décidée par le gouvernement en mai. La hausse devrait être contenue pour un voyage dans un autre pays de l'UE (15,53 euros contre 12,73 euros actuellement). La taxe sera plus importante pour les destinations plus lointaines (70,83 euros contre 58,06 euros actuellement). La décision allemande intervient dans un contexte de tension budgétaire. L'État cherche à renflouer ses caisses, alors que son budget 2024 a été en partie rejeté par la Cour constitutionnelle allemande. Les nouvelles taxes devraient rapporter 445 millions d'euros à l'État.
Augmentation du salaire minimum pour les infirmiers spécialisés
Le salaire minimum des infirmiers spécialisés dans les soins de longue durée et les soins aux personnes âgées devrait augmenter à 15,50 euros de l'heure pour les infirmiers sans qualification, 16,50 euros de l'heure pour les aides-soignants, et 16,50 euros de l'heure pour les infirmiers qualifiés. L'Allemagne est touchée par une vaste pénurie de main-d'œuvre, notamment dans la santé. Le pays ne compte que 5 millions de soignants. L'Office fédéral de la statistique estime que le pays aura besoin de 280 000 à 690 000 soignants supplémentaires d'ici 2049.
Royaume-Uni : des changements de règles de visa qui affectent les étudiants étrangers
Nouveau coup dur pour les étudiants étrangers. L'augmentation du seuil minimum de salaire décidée par l'exécutif refroidit les employeurs (de 26 200 à 38 700 livres sterling pour les travailleurs non qualifiés, et 30 960 pour les moins de 26 ans). Nombre d'entre eux avaient prévenu qu'ils seraient dans l'incapacité d'embaucher des professionnels étrangers, faute de pouvoir les payer aux nouveaux standards gouvernementaux.
Les grands groupes ne sont pas épargnés : plusieurs banques ont annulé plusieurs offres d'emploi destinées aux diplômés étrangers. L'un d'eux avait recruté plus de 2700 travailleurs en 2023. Pour l'instant, il a supprimé 35 offres (3 % des candidatures des diplômés de l'automne 2023). Ces annonces font craindre une accélération des annulations d'emploi pour des diplômés étrangers ayant pourtant investi plusieurs dizaines de milliers de livres sterling dans leur projet professionnel. Ils s'estiment pris en otage par le pouvoir.
Le plan drastique du gouvernement pour réduire l'immigration légale conduit les entreprises, y compris les grands groupes, à revoir à la baisse leurs plans d'embauche de professionnels étrangers. Le Comité consultatif des migrations monte au créneau et presse le gouvernement de maintenir le programme des visas pour diplômés. Ce programme permet aux diplômés de travailler au Royaume-Uni pendant les 2 années suivant l'obtention de leur diplôme. Pas sûr que les conservateurs, prêts à tout pour limiter la débâcle annoncée lors des élections générales (le 4 juillet), suivent la recommandation.
Australie
Mise à jour de la stratégie migratoire australienne
Changement en vigueur pour le programme de visa temporaire des diplômés à partir du 1er juillet. Outre des changements d'appellations, le gouvernement a réduit à 35 ans l'âge maximum pour présenter sa candidature. Des restrictions concernant la nationalité sont aussi appliquées. La liste des changements et les détails sont à retrouver sur le site du ministère de l'Immigration et de la citoyenneté.
Les étudiants étrangers et leurs tuteurs devront avoir plus d'argent pour vivre en Australie. Le gouvernement a aligné la capacité financière sur le salaire minimal national. Ces mises à jour interviennent dans le cadre de la réforme de décembre 2023 visant à réduire les chiffres de l'immigration nette.
Nouveau visa d'innovation pour les talents étrangers
Mardi 14 mai, le gouvernement a annoncé la création d'un nouveau visa. Nommé « visa d'innovation », il cible les travailleurs très qualifiés et autres talents étrangers. Le visa d'innovation vient remplacer le controversé programme pour l'innovation et l'investissement en affaires (Golden visa), lequel s'arrêtera à la fin de l'année. Ce nouveau visa vient également remplacer le visa Global Talent, qui s'arrêtera aussi en fin d'année.
Le visa d'innovation s'inscrit dans la politique australienne visant à privilégier l'immigration qualifiée tout en limitant l'immigration nette. Le gouvernement augmentera ses contrôles pour suspendre tout visa étudiant « abusif ». Il introduira un système de vote pour les demandes de permis vacances-travail émanant de Chine, d'Inde et du Vietnam à partir de l'année fiscale s'achevant en juin 2025. Le gouvernement entend réduire l'immigration nette à 260 000 pour la période 2024-2025 contre 528 000 pour la période 2022-2023.
États-Unis
Alerte à l'attention des voyageurs LGBTQIA+
Le Département d'État américain recommande aux voyageurs LGBT+ de faire preuve de prudence. Le message est adressé aux ressortissants américains en voyage à l'étranger, mais aussi à toute personne de la communauté. Cette recommandation de « prudence mondiale » a été lancée mi-mai, alors que la communauté LGBT+ se préparait à entrer dans le mois des fiertés. En effet, nombre de célébrations auront lieu dans plusieurs pays du monde durant ce mois de juin. Mais d'après les renseignements américains, des groupes terroristes étrangers pourraient infiltrer ces évènements pour cibler la communauté LGBTQIA+. Le Département d'État américain constate une recrudescence des actes de haine à l'encontre de la communauté depuis plusieurs années. La multiplication des lois anti-LGBT votées dans plusieurs États américains et les dérapages de politiques républicains ajoutent à la tension.
Nouvelles mesures pour les détenteurs du visa H-1B
2024 est-elle une nouvelle année de grands licenciements dans la Tech ? Google, Cisco, Tesla, Microsoft, Snap, Paypal, Walmart… les grandes entreprises annoncent des licenciements massifs. Un coup dur pour les expatriés détenteurs du visa H-1B, contraints de quitter le territoire s'ils ne retrouvent pas d'emploi dans les 60 jours (délai de grâce).
Pour éviter les expulsions, les services américains de citoyenneté et d'immigration (USCIS) ont annoncé plusieurs mesures de prolongation de séjour :
- demander un changement du statut de non-immigrant pendant le délai de grâce ;
- demander une rectification de son statut ;
- invoquer des « circonstances impérieuses » permettant d'avoir accès à un document d'autorisation de travail (AED) ;
- effectuer une demande « non frivole » de changement d'employeur.
USCIS rappelle que les non-immigrants éligibles peuvent effectuer une « transition douce » vers de nouvelles opportunités professionnelles. Les expatriés demandant un visa non immigrant auto-sponsorisé peuvent faire leur démarche en même temps qu'ils demandent la modification de leur statut. Les ressortissants étrangers peuvent rester aux États-Unis durant l'instruction de leur dossier. Ils pourront obtenir un document d'autorisation d'emploi (EAD). Les étrangers en situation précaire pourront obtenir un EAD d'un an.
Google appelle à une réforme de l'immigration pour attirer des talents étrangers
Le géant américain s'invite dans le débat sur l'immigration. D'après lui, la politique américaine doit se moderniser pour retenir les talents étrangers. Google pense surtout aux professionnels de la cybersécurité et de l'intelligence artificielle (IA), deux secteurs en plein essor. L'entreprise cible particulièrement la liste de l'Annexe A, liste comptabilisant les secteurs manquant de travailleurs américains. Elle n'a pas été mise à jour depuis 2005. Pour Google, il est impératif de la réviser en incluant les métiers de l'IA et de la cybersécurité. Le groupe recommande une mise à jour régulière de la liste, pour qu'elle reflète mieux l'état du marché et des besoins en main-d'œuvre. Il suggère d'ouvrir la mise à jour aux commentaires du public afin de multiplier les canaux d'information et de garantir la transparence.
Google s'attaque également à la certification permanente au travail (PERM), dont il juge le processus trop long. Google recommande d'opter pour un système plus simple et rapide. L'entreprise vise toujours les métiers de l'IA et alerte l'exécutif quant à la pénurie mondiale de talents dans ce secteur. Faciliter les procédures d'immigration permettra d'attirer davantage de professionnels qualifiés. Car la bataille de l'IA se joue déjà entre les entreprises américaines. Les GAFA s'arrachent les spécialistes étrangers de l'IA. Pour Google, réformer l'immigration rendra les États-Unis compétitifs sur le marché de l'IA comme dans les autres secteurs de pointe. En revanche, le maintien de la politique actuelle entraînerait une perte des talents étrangers préjudiciable à l'économie américaine.