Nouveaux barèmes de revenus minimums pour les travailleurs étrangers en 2024

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Écrit par Asaël Häzaq le 02 septembre, 2024
Attirer les talents étrangers, réduire l'immigration nette, favoriser l'emploi des locaux… Pour rester compétitifs sur le marché du travail international, les États réforment leurs règles d'immigration pour les professionnels étrangers. Dans leur viseur : le revenu minimum, conditions essentielles pour prétendre au visa de travail. Faut-il l'augmenter ou l'abaisser ? Comment les employeurs apprécient-ils les réformes de l'État ? Zoom sur ces pays qui ont modifié le barème de revenus minimums pour les expatriés.

Royaume-Uni

Annoncé depuis fin 2023, le relèvement du seuil minimum de salaire pour les professionnels étrangers qualifiés est entré en vigueur le 4 avril 2024. Ils doivent désormais gagner au moins 38 700 livres sterling, au lieu de 26 200 livres sterling avant la réforme (45 400 contre 30 730 euros). Soit une hausse de 48 %. La décision s'inscrit dans une série de mesures votées par le précédent gouvernement Sunak, et visant à réduire l'immigration nette. La hausse du seuil de revenu minimum est néanmoins plus contenue dans le secteur de la santé. Elle passe de 26 200 à 29 000 livres sterling. Mais de nombreux employeurs (tous secteurs confondus) affirment qu'ils ne pourront pas s'aligner sur les nouveaux barèmes du gouvernement.

À noter que depuis le 11 avril, le revenu minimum requis pour les visas familiaux est passé de 18 600 à 29 000 livres sterling (de 21 100 à 34 720 euros). Il augmentera progressivement à 34 500 puis 38 700 livres sterling courant 2025. D'après l'ancien ministre de l'Intérieur James Cleverly, le plan permettrait de faire baisser l'immigration nette d'au moins 300 000 personnes cette année. Le nouveau gouvernement n'est pas revenu sur ces mesures, mais a annoncé, le 22 juillet, le lancement de Skills England, agence visant à améliorer la formation des Britanniques pour moins dépendre des travailleurs étrangers. Le Premier ministre Keir Starmer a néanmoins rappelé que l'immigration contribue à l'économie anglaise : « L'immigration fait partie de notre histoire nationale, elle l'a toujours été, elle le sera toujours ».

Maurice

Présenté en juin, le budget 2024-2025 prévoit de nouveaux aménagements pour attirer investisseurs et professionnels étrangers qualifiés. L'un des changements notables concerne le seuil salarial : le nouveau budget annonce une baisse du seuil salarial exigé pour les Occupation permits (permis d'occupation professionnel, permettant de vivre et travailler à Maurice pendant 10 ans). Le salaire requis passe de 30 000 à 22 500 roupies mauriciennes (590 à 440 euros).

Le 1er janvier, le salaire minimum est passé de 11 800 à 15 000 roupies mauriciennes (Rs) mensuelles, pour être ensuite revue à 17 000 roupies le 1er juillet. Une hausse significative saluée par la Confédération des travailleurs du secteur privé. Mais d'autres employeurs parlent d'une annonce « politique » qui pèse sur leurs finances. D'après eux, augmenter le salaire minimum freinerait les embauches. Certaines entreprises employant des travailleurs étrangers prévoient des difficultés de recrutement. Car la hausse concerne tous les travailleurs, y compris les étrangers. Le gouvernement a annoncé débloquer une aide financière pour les entreprises. L'aide est effective de janvier à décembre 2024 ; son montant évolue en fonction des catégories d'entreprises. Certaines estiment néanmoins que la période et le montant proposés ne leur permettront pas de compenser la hausse du revenu minimum.

Australie

Depuis le 1er juillet, le seuil des revenus des travailleurs étrangers temporaires qualifiés est passé de 70 000 à 73 150 dollars australiens (42 340 à 44 250 euros). Les changements n'affectent pas les candidatures envoyées avant le 1er juillet. Elles ne concernent pas non plus les détenteurs actuels de visa temporaires. Le nouveau barème s'aligne sur le taux de salaire annuel du marché, en augmentation cette année. Des précisions seront apportées ultérieurement par le gouvernement.

Toujours au 1er juillet, le salaire minimum national est passé à 24,10 dollars australiens. Soit une hausse de 3,75 %. Malgré une inflation en baisse, la Fair Work Commission (Commission du travail équitable) a conclu, dans son rapport annuel, que la hausse du coût de la vie avait frappé plus sévèrement les faibles revenus. Organisme indépendant, la Fair Work notamment est en charge de la révision annuelle des salaires. Elle s'occupe également des litiges entre employeurs et travailleurs. La hausse du salaire minimum national concerne tous les travailleurs. À noter que le salaire minimum peut varier selon les États.

Luxembourg

Équivalent de la Carte verte américaine, la Carte bleue européenne permet de vivre et travailler dans l'UE. Le seuil minimum de salaire pour postuler est fixé librement par chaque État membre. En mars 2024, le Luxembourg a fait passer le salaire annuel minimum à 88 452 euros pour un travailleur qualifié (contre 84 780 euros annuels en 2023). L'augmentation est contenue pour les étrangers très qualifiés travaillant dans les secteurs ayant besoin de main-d'oeuvre extraeuropéenne (secteurs désignés par le gouvernement) : le seuil salarial passe à 70 762 euros par an, contre 67 824 euros en 2023. En 2023, l'Autriche avait abaissé le seuil salarial de 66 593 à 45 595 euros annuels, pour attirer plus de talents étrangers. La nouvelle loi allemande sur l'immigration a également abaissé le seuil salarial pour obtenir la Carte bleue européenne : 39 682,80 euros par an (-43,3%) pour les étrangers exerçant une profession rare ; 43 800 euros par an (-50%) pour les autres professions.

Suède

Le 15 février 2024, la ministre des Migrations, Maria Malmer Stenergard annonce durcir les règles de l'immigration économique pour décourager les expatriés peu qualifiés. Le gouvernement, soutenu depuis 2022 par l'extrême droite, compte augmenter le salaire minimum exigé pour les expatriés non européens. Ils doivent actuellement être payés au moins 27 360 couronnes (2 340 euros) pour demander un visa de travail. La réforme envisage de relever le barème minimum à plus de 34 200 couronnes (environ 2 900 euros), soit l'équivalent du salaire médian. Cette annonce fait suite à une précédente hausse actée en novembre 2023. Les seuils de revenus exigés pour les ressortissants hors espace Schengen ou Union européenne étaient passés de 13 000 à 27 360 couronnes (de 1 110 à 2 340 euros).

Les employeurs, surtout ceux de la restauration et du nettoyage, expriment leur désapprobation. Leurs secteurs d'activité sont les plus affectés par les restrictions du gouvernement. Impossible pour ces employeurs de s'aligner sur les nouveaux standards suédois. Ils estiment que la nouvelle hausse annoncée en 2024 nuira à l'économie. La ministre maintient néanmoins son projet de réforme. Elle évoque de possibles exceptions pour les professionnels de santé faiblement rémunérés dans l'attente de la reconnaissance de leur diplôme (médecins, infirmiers…). Une exception similaire pourrait être prévue pour les chercheurs. Le nouveau barème est prévu pour entrer en vigueur le 1er juin 2025.

Belgique

Depuis le 1er janvier 2024, la Belgique a acté de nouveaux seuils salariaux pour les détenteurs du permis unique. Pour rappel, le permis permet aux ressortissants non européens de travailler et séjourner plus de 90 jours en Belgique. Le 1er janvier, les régions de la Wallonie, de Bruxelles et de Flandres ont annoncé que les seuils salariaux des travailleurs hautement qualifiés sont désormais applicables aux travailleurs étrangers détendeurs d'un permis unique. Les permis délivrés avant le 1er janvier bénéficieront des nouveaux seuils. En Flandres, il s'élève à au moins 46 632 euros annuels pour les travailleurs hautement qualifiés. À Bruxelles et en Wallonie, il se fixe à un minimum de 50 310 euros.

L'indexation des salaires des talents étrangers sur les nouveaux seuils est automatique. Mais si l'indexation ne permet pas d'atteindre les nouveaux seuils, il est conseillé de contacter un Service de migration économique (Dienst Economische Migratie) muni du nouveau contrat de travail ou de l'avenant. Ces documents doivent en effet comporter les nouveaux barèmes.