
Au 18 mars 2020, le Japon compte 1 592 cas confirmés de covid-19, et 29 décès. Hokkaido, à l’extrême nord du Japon, est la région la plus touchée, avec 152 cas confirmés. Vient ensuite Aichi, au sud ouest de Tokyo (125 cas), et la très touristique Osaka (112 cas). Tokyo arrive juste derrière, avec 102 personnes contaminées par le virus.
Les 1547 cas comprennent 712 personnes contaminées à bord du Diamond Princess. Les derniers passagers du paquebot ont été évacués le 1er mars. 156 personnes sont actuellement hospitalisées. 859 ont été contrôlées positives au coronavirus.
Ces chiffres sont contestés par une partie de la population, au regard de la situation du voisin coréen. La Corée du sud compte 8 413 malades et 91 morts (18 mars). D'aucuns craignent que le gouvernement ne sous-estime volontairement ces chiffres. Au Japon, une crise politique s'ajoute à la crise sanitaire.
État d'urgence
13 mars 2020. Shinzo Abe instaure l'état d'urgence. Son gouvernement, accusé de n'avoir pas su agir rapidement, et de ne pas disposer des ressources nécessaires pour contrer efficacement la pandémie, prend des mesures radicales. Pour Shinzo Abe, la loi « état d'urgence » devrait permettre d'endiguer la crise sanitaire.
En clair, le gouvernement peut désormais mettre en quarantaine quiconque serait suspecté d'être infecté par le virus. Les autorités peuvent aussi fermer les établissements, interdire les rassemblements, annuler les évènements publics, réquisitionner des bâtiments publics et privés pour y construire des structures médicales, ainsi que des produits de première nécessité. Le premier ministre prévient également que « les droits individuels seraient rognés » (lemonde.fr).
De quoi inquiéter l'opposition, pour qui les contours du texte sont flous. Minoritaire, elle n'a pas pu peser dans le débat. Le gouvernement, lui, affirme que ces mesures resteront exceptionnelles. Le porte-parole Yoshihige Suga affirme : « Nous ne sommes pas actuellement dans une situation nécessitant de déclarer un état d'urgence ».
La vie au ralenti
Le Japon, a fermé tous ses établissements primaires et secondaires depuis le début du mois. Fermeture jusque fin mars, pour l'instant. Les crèches et les garderies restent ouvertes. Au Japon, l'année scolaire se termine en mars et la rentrée débute en avril. Le pays est actuellement censé célébrer les cérémonies de fin d'année scolaire. Les régions décident au cas par cas du maintien ou de l'annulation de ces célébrations. En Hokkaido, la tendance est à l'annulation. Les élèves reçoivent les résultats de leurs examens par mail. D'autres établissements maintiennent la cérémonie, mais à huis clos. Parents et autres élèves suivent la remise des diplômes dehors, sur un écran de télévision.
Le gouvernement recommande à toutes les entreprises qui le peuvent d'organiser le télétravail. Les transports, particulièrement dans les grandes villes comme Tokyo, sont fréquemment bondés. Le télétravail permet d'éviter les rush hour, et les risques de contamination. Certaines entreprises optent pour le télétravail complet; d'autres préfèrent le télétravail à temps partiel : matinée à domicile, après-midi à l'entreprise. D'autres encore autorisent les parents à venir travailler avec leurs enfants. Parents qui pourront prendre congé si leur enfant est malade. Des subventions sont mises en place pour pallier le manque de salaire. Côté pratique, des solutions hydroalcooliques sont installées dans les gares, les lieux publics, et les entreprises.
La psychose ne semble pas avoir atteint les jeunes, qui continuent de sortir. Les quartiers Harajuku et Shibuya - quartiers branchés et jeunes de Tokyo - sont toujours aussi fréquentés. Pas de confinement, donc, mais des appels au respect des règles et de l'hygiène. Nombre d'établissements de loisirs et de sites touristiques sont fermés : parcs d'attractions, musées, karaokés etc. Certaines structures, comme la chaîne de karaoké Joysound, restent partiellement ouverts.
Le milieu sportif est également touché. Championnats de football suspendus, compétitions de sumo et de basket maintenues, mais à huis clos, triathlon repoussé au moins d'avril... pour l'instant. Les gymnases sont fermés. La plupart des évènements sportifs et culturels sont annulés ou reportés.
La plus grande interrogation concerne les JO, censés débuter le 24 juillet. Il y a encore quelques jours, Yoshihige Suga, porte-parole du gouvernement, affirmait qu'ils se tiendraient à la date prévue. Samedi 13, le premier ministre Shinzo Abe répète le même discours. Yuriko Koike, gouverneure de Tokyo, ajoute qu'il serait « impensable » d'annuler les JO.
Changement de ton ce 17 mars. Le maintien des JO semble de plus en plus incertain. Les Japonais redoutent l'afflux massif des touristes. Le comité olympique se réorganise : annulation des festivités autour de la flamme olympique. Le relai partira toujours le 26 mars, mais sans public. Selon un sondage réalisé par la NHK, 45% des Japonais seraient contre la tenue des JO.
Quitter le Japon ?
Coronavirus oblige, la question se pose. Les États invitent leurs ressortissants à rentrer dans leur pays de résidence. Le Japon, lui, interdit sur son territoire toute personne ayant séjourné 14 jours en Corée du sud, Chine, Iran, Italie, et Saint-Marin. La France ne fait pas encore partie de cette liste. Compte tenu de la progression rapide du virus dans ce pays, il n'est pas impossible qu'elle y figure.
Les États-Unis encouragent leurs ressortissants à ne pas se rendre au Japon et à différer tout voyage non important. États-Unis qui ont restreint l'accès à leur territoire, et qui invitent leurs ressortissants présents actuellement au Japon à rentrer sur le sol américain.
Même discours du côté de la Grande-Bretagne. Tous les voyages non indispensables - y compris les programmes et autres échanges universitaires - doivent être reportés, au moins pour un mois. L'Afrique du sud montre sa fermeté et ferme toutes ses frontières. Elle déconseille à ses citoyens de se rendre dans les foyers de contamination, principalement en Asie de l'est et en Europe. La France, l'Australie ou le Maroc adoptent le même discours.
Ces encouragements au retour ne concernent pas les expatriés vivant depuis plusieurs mois/années au Japon. Les différents pays recommandent cependant d'envisager la question (pour les personnes ayant convenu de ne résider que quelques mois au Japon), étant donné la gravité de la pandémie.
Il est encore relativement facile d'obtenir un vol depuis le Japon. Les liaisons aériennes sont maintenues. Le gouvernement japonais annonce cependant diminuer progressivement la fréquence des vols - notamment vers l'étranger - voire, de suspendre les vols vers certaines destinations, sans donner plus de précisions quant aux destinations concernées. Mesure prise en parallèle d'un durcissement des conditions d'accès aux pays. États-Unis, Canada, pays d'Afrique ou de l'Union-Européenne... Tous les pays prennent des mesures similaires, et ferment progressivement leurs frontières.
Mais aucun d'entre eux ne semble avoir pris des mesures de rapatriement. Les avions dépêchés au début de la crise ne sont plus d'actualité. Raison évoquée par les différentes ambassades : les liaisons aériennes fonctionnent toujours. Elles recommandent donc aux voyageurs de se tourner vers leur compagnie aérienne pour toute question relative au départ (changement de vol, etc.) L'aéroport international de Narita a renforcé ses mesures de contrôle et de sécurité. Port du masque pour les employés, désinfection des espaces, rappel des règles d'hygiène aux voyageurs. Pas de procédure particulière à suivre, si ce n'est se conformer aux instructions des autorités japonaises, jusqu'au départ pour son pays. Depuis le 13 mars, le Japon peut placer en quarantaine toute personne suspectée d'avoir contractée le virus, y compris les étrangers.
Partir malgré tout ?
C'est la grande interrogation. Expatriation, PVT/WHV, études... Difficile de reporter ses projets, surtout s'ils sont prévus de longue date. Le gouvernement japonais appelle néanmoins à la plus grande prudence, face à un virus qui impacte le monde entier.
Il rappelle : partir malgré la pandémie, c'est s'exposer à des risques accrus de contamination, et de potentiellement contaminer les autres.
Selon le journal Asahi, tous les voyageurs en provenance d'Europe, étrangers comme Japonais, devront eux-mêmes se placer à l'isolement durant deux semaines, même en l'absence de symptômes (information du 17 mars). Le gouvernement japonais confirme, dans un article paru sur le journal NHK.
Si certaines compagnies spécialisées dans les voyages au Japon rappellent que le pays est l'un des plus sûrs au monde, le Japon adopte un tout autre discours. En durcissant les conditions d'entrée sur son territoire, il en appelle à la responsabilité de chacun. Le Japon montre ainsi sa priorité : protéger les personnes actuellement présentes sur son territoire.