Navine Eldesouki : « Je suis plus heureuse quand j'aide et soutiens les femmes expats »

Pouvez-vous vous présenter et nous parler de votre parcours ?

Je m'appelle Navine Eldesouki, et voici un aperçu de mon parcours.

À l'âge de 20 ans, j'ai pris un vol entre ma ville natale de Perth, en Australie, pour l'Égypte « pour quelques mois ». Mais je ne savais pas que ce voyage allait changer ma vie pour toujours ! 23 ans et 7 pays plus tard, mon mari et moi avons construit une vie ensemble, étant toujours en mouvement, et avons eu 4 enfants en cours de route. Cela a été un véritable voyage. Un voyage de vie qui m'a mis au défi à bien des égards, mais qui m'a profondément enrichi. J'étais jeune et assez naïve lorsque notre vie d'expatrié a commencé. J'ai grandi en tant que femme au cours de ce voyage et cela a fait de moi la personne que je suis aujourd'hui.

Quand j'étais jeune, je voulais être directrice de publicité, riche et prospère, et qui pouvait parcourir le monde. Même si je n'ai pas fait mon entrée dans la scène publicitaire, j'ai tout de même eu la chance de parcourir le monde. Ma vie s'est concentrée sur le développement de mes compétences parentales et maternelles, la gestion de plusieurs déménagements, à rétablir nos foyers et nos vies, etc. J'ai acquis tellement de compétences de vie qui ne peuvent être atteintes qu'à travers des défis.

De plus, je travaillais et faisais du bénévolat quand je le pouvais, en fonction de mon visa dans les différents pays où j'ai séjourné. Ainsi, au fil des années, j'ai travaillé dans une société de courtiers d'assurances, en tant que professeur d'anglais en maternelle, administratrice d'école, créatrice de mode et agent immobilier. J'ai eu la chance d'obtenir ma licence d'agent immobilier aux États-Unis et cela a été pour moi un accomplissement personnel dont je suis très fière ! Par la suite, je me suis profondément impliqué dans la crise des réfugiés pendant mon séjour à Genève. Ce sont les moments les plus épanouissants que j'ai vécus.

Où vivez-vous actuellement et depuis quand ?

Je me suis installée à Dubaï, aux Émirats arabes unis, en septembre 2016. C'est la plus longue période que nous avons vécue dans n'importe quel endroit depuis que nous avons commencé notre longue aventure d'expatriation.

Qu'est-ce qui vous a donné envie de quitter votre pays d'origine ?

Je dirais que c'était plus imprévu que prévu ! Après être allé en Égypte, je me suis marié et j'y ai eu mon premier enfant. Mais j'ai trouvé cela difficile de vivre en Égypte avec mon premier enfant comme je n'avais pas le soutien de mes parents et de mes frères et sœurs. Par conséquent, mon mari et moi avions prévu de déménager en Australie. Cependant, nos projets ont pris une tournure lorsque sa société lui a proposé un poste en France, et nous avons décidé de tenter le coup. Nous ne savions pas que ce serait un tremplin pour le reste de notre vie.

Vous êtes la fondatrice d'un groupe Facebook, « Coffee with Expat Women ». Qu'est-ce qui vous a motivé à créer ce groupe et quel était votre objectif ?

Le groupe Facebook « Coffee with Expat Women » a été créé sous l'égide de la plate-forme communautaire « Coffee with an Expat » que je créais en même temps à Dubaï.

J'ai réalisé que je suis plus heureuse quand j'aide et soutiens les femmes expats, alors j'ai décidé de redonner à la communauté des expatriés qui m'a tant donné. J'ai fondé une plate-forme sociale et de soutien. « Coffee with Expat Women » est un espace sûr où les expatriées peuvent tisser des liens, s'engager dans des discussions significatives, assister à des rencontres, des événements et des ateliers. Je voulais que cette plateforme sociale et de soutien soit accessible aux expatriées dans le monde, ce qui m'a amené à créer le groupe Facebook.

Quel en a été le résultat ?

Le résultat a été incroyable et le groupe grandit chaque jour. Les femmes qui sont membres du groupe sont fabuleuses et les retours que j'ai reçus ont été très positifs. Les femmes apprécient vraiment l'authenticité du groupe, ce qui me motive à le développer davantage et à offrir de meilleures opportunités aux expatriées pour qu'elles puissent s'épanouir.

Concrètement, dans quelle mesure apportez-vous du soutien aux expatriées à travers le monde ?

J'ai lancé « Coffee with Expat Women » pour créer un espace sûr où les femmes peuvent se réunir et avoir des discussions ouvertes sur tous les différents aspects de leur mode de vie d'expatriée. Ces discussions sont soutenues par un expert sur le sujet respectif afin qu'il ou elle puisse fournir son expertise, son soutien et ses conseils aux participantes. C'est une communauté croissante de femmes d'origines diverses. En raison de la pandémie, j'ai décidé d'encourager les discussions en ligne, qui ont eu lieu dans le groupe Facebook « Coffee with Expat Women » avec des membres du monde entier. Cette décision nous a permis d'avoir la participation de conférenciers de différents pays et de donner aux expatriées du monde entier la possibilité de participer et d'avoir accès à des informations et à un soutien.

Quant au groupe Facebook, il est fondé sur le soutien aux expatriées et à leurs diverses activités. Ce groupe leur offre également différentes opportunités au cours de la semaine de partager et promouvoir ce qu'elles font, y compris (mais sans s'y limiter) leurs blogs, leurs podcasts, leurs entreprises, leurs loisirs, des recettes et bien plus encore. Cela leur permet aussi d'avoir de nouvelles connexions, d'agrandir leur cercle, de trouver des clients et de créer différentes opportunités commerciales.

Selon vous, quels sont les principaux défis auxquels les expatriées font face, qu'elles aient déménagé seule, avec leur conjoint ou en famille ?

Je vais vous parler principalement des femmes qui se sont expatriées en famille car c'est non seulement mon expérience mais aussi ce à quoi j'ai principalement été exposé.

Les expatriées sont confrontées à de nombreux défis après avoir déménagé dans un nouveau pays en famille. Bien que les défis rencontrés soient communs, la façon dont chaque individu en fait l'expérience peut être très différente. S'installer dans une maison, établir une toute nouvelle vie, assurer le bien-être de vos enfants, répondre à leurs besoins mentaux, émotionnels et sociaux, soutenir votre conjoint dans leur nouveau rôle, tout en gérant en même temps vos propres besoins sur les plans mental, social et émotionnel, ainsi que l'environnement inconnu qui vous entoure, est loin d'être une chose facile..

Qui suis-je ? La perte d'identité et de but est très réelle chez les expatriées. Elles ont déraciné leur vie, laissé derrière elles famille, amis et souvent une carrière pour accompagner volontiers leur conjoint. Une fois la phase de lune de miel des expatriés terminée, la réalité s'installe et elles se retrouvent souvent sans savoir quoi faire. Quel est leur objectif et qui sont-elles vraiment ? Bien que cela soit des défis émotionnels et mentaux, sur une note positive, cela donne aussi l'occasion de se redécouvrir après avoir été exposées à de nouvelles expériences.

La solitude est un problème assez courant auquel les femmes / conjointes d'expatriés sont confrontées et j'en ai certainement eu ma part. C'est un sentiment différent de la « solitude » commune, venant par vagues à différentes étapes de votre voyage d'expatrié. Cela fait partie de l'expérience que vous devez connaître et apprendre à gérer.

Se faire de nouveaux amis dans un pays étranger. Cela peut être facile pour certains, mais pas si facile pour d'autres. De nombreux facteurs peuvent y jouer un rôle significatif, comme les barrières linguistiques, la communauté locale, les différences culturelles et les circonstances personnelles, entre autres. Au début, il est possible de rester connecté régulièrement à des amis dans votre pays d'origine, mais avec le temps, vous avez besoin de bien plus qu'un simple appel Skype. L'interaction face à face est un type de connexion différent qu'il vous manque et dont vous avez certainement besoin. Ce qui entraîne le besoin de vous faire de nouveaux amis. Cela peut nécessiter de sortir de votre zone de confort; cependant, je vous encourage à le faire. Ce moment pourrait définir le déroulement de votre aventure d'expatrié.

La perte de carrière et d'indépendance peut être pénible pour les expatriées qui se sont sacrifiées pour soutenir leur mari. Elles deviennent subitement dépendantes, souvent sans avoir le droit de travailler ou n'ont accès à aucun revenu dans leur pays d'accueil, ce qui a malheureusement des conséquences à long terme. Cela met l'expatriée dans une posture vulnérable dans un pays étranger, soulevant de nombreuses préoccupations qui doivent être résolues.

Nous nous sentons souvent coupables et avons tendance à nous interroger sur ce sentiment. Le déménagement est l'une des choses les plus stressantes et difficiles à faire. La réalité est que déménager est une montagne russe émotionnelle sur laquelle vous n'avez aucun contrôle. Attendez-vous à avoir des moments difficiles même si vous déménagez dans un endroit idéal rempli d'expériences et d'opportunités passionnantes, avec un package d'expatrié fort intéressant, sans compter la promesse de voyages et d'aventures, etc. Nous nous sentons souvent coupables d'avoir des émotions négatives lorsque tout autour de nous nous inspire à être positives. Vous venez de laisser toute votre vie derrière vous. Il est important de vous laisser le temps de faire votre deuil. La clé est d'être consciente que cela arrivera ; c'est normal. Alors permettez-moi de faire le deuil de ce sentiment de culpabilité.

Avez-vous remarqué des changements particuliers depuis le début de la pandémie, notamment avec les expatriees qui sont femmes au foyer et celles qui travaillent à distance ?

La pandémie a certainement transformé la vie des gens dans le monde entier. En tant qu'expatriées, la liberté de voyager facilement à travers le monde fait partie de nos vies, nous a été littéralement enlevée. Bien que les voyages reprennent graduellement, nous sommes toujours au cœur de la pandémie, ce qui entraîne des inquiétudes et des restrictions lors des voyages. Il est difficile d'identifier un changement particulier pour les femmes au foyer et celles qui travaillent à distance : je n'ai pas remarqué de tendance générale. Je pense que c'est tellement individualiste dans cette circonstance particulière et tellement différent à travers le monde. Cela dépend peut-être de la manière dont les pays font face à la pandémie. La pandémie s'est avérée à la fois très difficile pour certaines personnes et en même temps profitable pour d'autres. L'avantage de passer du temps en famille, de travailler sur des projets oubliés, de nouvelles opportunités d'affaires, etc. Les défis étant la santé, la perte de revenus, les fermetures d'entreprises, la séparation familiale, entre autres.

Selon vous, quels sont les éléments clés à considérer en tant que femme expat ?

Les expatriées doivent tenir compte des mêmes problèmes mondiaux que les femmes locales, mais ces problemes peuvent être plus importants en raison des différentes restrictions, cultures et lois de leur pays d'accueil, telles que la discrimination, les inégalités, le sexisme, la sécurité, la dépendance financière de leur partenaire, pour n'en citer que quelques-uns. Les expatriées doivent être conscientes des différents défis et avantages liés à leur expatriation et de la manière dont cela s'applique à leur pays d'accueil. L'information et la sensibilisation sont importantes, ainsi que la volonté d'explorer et de découvrir.

Y a-t-il des conseils que vous auriez aimé recevoir avant de vous expatrier ?

Oh oui, tellement, mais la beauté de la croissance vient à travers l'expérience et l'apprentissage. Le conseil que j'aurais aimé recevoir, que j'ai écrit et que je partage maintenant avec d'autres expatriées est : « Vivez comme si vous restiez pour toujours. Explorez comme si vous partiez demain ».

Qu'est-ce que la vie à l'étranger vous a appris jusqu'à présent ?

Cela m'a appris que le voyage d'expatrié est un voyage en nous-mêmes et que le changement nous touche profondément, modifie notre vie et crée une version enrichie de nous-mêmes. En fin de compte, cela m'a appris que tous les humains sont égaux.