Thierry à Tenerife : « On prend vite le rythme local »

Interviews d'expatriés
Écrit par Expat.com team le 17 avril, 2014
Jeune retraité de l'armée française, Thierry a décidé de changer de vie suite à un problème de santé. Il s'est ainsi installé avec sa femme à Tenerife en décembre 2012...

Pourquoi as-tu choisi de t'installer à Tenerife ?

La vie dans les îles, je connais car j'ai eu la chance au cours de ma carrière de militaire de vivre en Polynésie, Guadeloupe, Martinique. Je sais donc ce que c'est que vivre loin de sa famille, ses amis, dans un environnement différent, même s'il est français.
A titre d'image : nous avons pris un entonnoir dans lequel nous avons mis un tas de critères :
- la météo (nous voulions en finir avec la grisaille, le froid, les hivers qui n'en finissent plus)
- la cherté de la vie (pouvoir vivre correctement avec juste une pension de retraite)
- la langue (une île comme la Crète ou un pays comme la Thaïlande nous aurait bien plu mais il faut tout réapprendre, jusqu'à l'alphabet !)
- la distance avec la France (en cas de rapatriement ou déplacement urgent à effectuer : pas trop d'heures de vols, nombreuses liaisons, etc.)
- le système de santé (avoir une bonne couverture sociale quand on vieillit, c'est important)
- la gastronomie (nous aimons la chère fine et les bons vins... envie de retrouver tout cela ailleurs).
On a "secoué"... et il en est tombé les Canaries. Après, il ne restait plus qu'à choisir l'île.

Comment s'est passée ton installation ?

Nous avons fait un premier voyage de repérage de 10 jours en mars 2012 et avons visité Lanzarote, Fuerteventura et Tenerife. C'est Tenerife qui nous a plu de suite car on y trouve tout ... et l'idée d'avoir à porter de main autant de centres commerciaux (El Campo, Carrefour, Leroy Merlin, Ikea, Conforama, etc.) pour la vie de tous les jours nous plaisait bien. Nous sommes revenus une deuxième fois une semaine en septembre 2012 pour trouver une location et sommes repartis avec un contrat d'un an sous le bras.
Le temps de rentrer en France, vendre notre appartement, brader nos affaires personnelles, organiser notre déménagement (nous souhaitions emporter dans notre nouvelle vie quelques éléments personnels, nous avons donc pris un déménageur qui nous a organisé le transfert... comme si nous partions en mutation... lol).
La voiture chargée au maximum, nous avons pris la route pour Cadix en faisant le tour de la famille et des amis pour dire au revoir. Après 2 jours de traversée en ferry, nous avons débarqué à Tenerife.

Quelles ont été les formalités à accomplir pour pouvoir passer ta retraite en Espagne ?

En ce qui concerne les formalités : elles commencent en France. Pour ma part, j'ai prévenu mon centre de paiement de pension de mon changement d'adresse et mon dossier a été transféré au service qui traite les Français à l'étranger. Ce service m'a établi une attestation pour faire transférer mes droits à la sécurité sociale espagnole. Idem pour les impôts, mon dossier a été transféré au service qui gère les Français à l'étranger.
Sur place, nous avons demandé notre NIE, obtenu notre carte de résidents permanents, fait l'inscription à la sécurité sociale espagnole et à l'Hacienda (correspondant à notre trésor public), être enregistrés à la mairie de notre domicile, assurance pour le logement (afin de couvrir nos effets personnels, le logement étant assuré par le propriétaire), fait les démarches pour immatriculer notre véhicule en plaques espagnoles (ITV, immatriculation, assurance, etc.).

As-tu eu des difficultés d'adaptation (barrière de la langue, coutumes) ?

Je n'ai pas eu de difficulté d'adaptation malgré le fait que je ne parlais pas un mot d'espagnol. Mon épouse avait pris quelques cours en France et a pu se débrouiller pour les démarches administratives. Ici il est possible de prendre des cours collectifs avec des établissements spécialisés, auprès d'un "Centro Cultural" ou avec un professeur particulier (il y a de nombreuses personnes qui se proposent de donner des cours à domicile à des tarifs vraiment sympas). Si on ne parle pas espagnol, on peut aussi avoir recours à un spécialiste pour faire les différentes démarches administratives (ce que nous avons fait pour l'immatriculation de notre véhicule, c'est recommandé d'ailleurs). Et puis l'espagnol a quelques similitudes avec le français. La langue n'est vraiment pas une barrière.
Quant aux coutumes, on prend vite le rythme local.

Qu'est-ce qui t'a le plus surpris à Tenerife ?

La gentillesse des Canariens et leur accueil que ce soit dans les administrations locales ou la vie de tous les jours. Le sentiment de sérénité, tranquillité mais surtout de sécurité (on est un peu déformé quand on vient de la région parisienne!). Et puis la profusion de commerces en tout genre... il faut le voir pour le croire !

Les habitants de Tenerife sont-ils accueillants ? Est-il facile de s'intégrer et de faire de nouvelles connaissances ?

Les Canariens sont accueillants et apprécient qu'on fasse l'effort de parler espagnol. Pour s'intégrer, il faut pouvoir discuter avec les locaux et donc se mettre à l'espagnol. Si on parle anglais, ça peut aider aussi car il y a de nombreux étrangers qui passent l'hiver à Tenerife. Sinon, pour faire de nouvelles connaissances, on peut s'inscrire dans une association francophone qui vient de se monter CerFraTen et qui organise tous les mois un dîner avec animation pour réunir les francophones, les réseaux sociaux (il existe un groupe "francophones de Tenerife"), etc.
Il faut un peu de temps pour se créer un nouveau réseau de connaissances... mais quand on est à la retraite, le temps ne compte pas !

Peux-tu partager avec nous un trait caractéristique de Tenerife qui te plaît particulièrement ainsi qu'un aspect négatif ?

La douceur du climat même si cette année les locaux s'accordent à dire qu'on a un hiver "difficile"... c'est vrai qu'il y a un peu de vent, mais quand on vit dans le sud de l'île, le soleil est au RDV tous les jours ou presque alors que dans le nord, c'est plutôt la grisaille et la pluie.
Voilà un peu plus d'un an que je vis à Tenerife et franchement, j'ai beau me creuser la tête, je ne trouve pas de point négatif. Si, peut-être un, mais ça n'a rien à voir avec Tenerife : c'est le consulat français. En gros si tu n'as besoin de rien tu peux aller les voir. Je ne comprends pas pourquoi, lorsqu'on va se faire enregistrer au Consulat, on ne ressort pas avec un petit livret d'accueil avec un rappel succinct des différentes démarches à effectuer, une liste des artisans, entrepreneurs français installés dans l'île, la liste des établissements médicaux ou médecins francophones, etc. Le genre de détails qui peut grandement faciliter la vie quand on vient s'installer ici. Grâce à Internet, on a pu anticiper sur pas mal de points mais l'apprentissage se fait au quotidien et plus d'un an après notre arrivée, nous venons d'apprendre par exemple qu'il existe une taxe annuelle pour la voiture !
C'est un peu la raison pour laquelle, nous avons décidé de mettre ce type d'informations sur notre blog, que nous avons créé à l'origine pour la famille et les amis et que nous mettons maintenant à disposition de qui veut tenter l'aventure !
Après mûres réflexions... j'ai fini par trouver un point négatif : la langue française n'est pas très représentée à Tenerife. Que ce soit dans les restaurants, sur les sites touristiques, les musées etc... les explications sont traduites en anglais, allemand mais pas de français (ou rarement dans certains restaurants des centres touristiques) ! Certains restaurants affichent même des cartes en finlandais, suédois, russe mais pas en français. Il y aurait matière à monter un business de traduction ici... :)

Une idée reçue sur les Canaries qui s'est avérée totalement fausse :

Le soleil 365 jours sur 365. On a déchanté la première année : 6 jours de pluie sur un an, et encore, parce qu'on habite le sud de l'île ! Je plaisante bien sûr. Non, nous n'avions pas d'idée reçue sur les Canaries...

Qu'est-ce qui te manque le plus par rapport à la France, ton pays d'origine ?

La mayonnaise des marques françaises, le rhum blanc à + de 37,5° (rhum des Antilles), et une plus grande variété de pure malt écossais... :) Comme tu peux le constater, rien de bien vital car nous avons tout ce qu'il faut à Tenerife et la famille ou les amis qui viennent nous voir nous approvisionnent en mayonnaise !

A quoi ressemble ton quotidien à Tenerife ?

J'ai entrepris de faire le tour de l'île en courant : environ 360 kilomètres pour 33 étapes avec un dénivelé total de près de 20 000 mètres. Chaque étape fait l'objet d'un reportage photos que je poste sur un site Facebook que j'ai créé spécialement et qui s'appelle "thierry tenerife". C'est l'occasion de découvrir l'île sous un autre angle, en passant dans certains endroits, où parfois seules les chèvres passent :). Je cours en moyenne une étape tous les 3 jours. D'ailleurs mon tour se terminera le 6 avril : RDV à 17h au mirador (point de vue) de Cruz de Carmen à 990 m d'altitude dans le parc rural d'Anaga ! J'invite vos lecteurs à découvrir cette page FB ouverte au public et découvrir quelques singularités de l'île : un squelette de cachalot exposé à San José de Los Silos, les piscines naturelles, une ancienne sucrerie, les chemins royaux, des aires de battage de l'époque des Guanches, etc.
Sinon, nous faisons de la randonnée, du kayak, du snorckeling, de l'aqua-rando. On essaie de faire des activités sportives pour nous maintenir en forme et compenser les bons petits plats et les bons vins canariens que nous dégustons au quotidien. Car Tenerife a aussi cet avantage : avoir de nombreuses bodegas (caves) qui proposent d'excellents vins ! Et puis, nous jouons aux guides touristiques avec la famille ou les amis qui viennent nous rendre visite avec un incontournable : l'ascension au Teide, le plus haut sommet d'Espagne 3 718 m.

Quelles sont les activités les plus populaires à Tenerife ?

Un deuxième incontournable (après le Teide) : le carnaval de Santa Cruz de Tenerife qui est le deuxième plus beau carnaval au monde. On en prend plein les yeux !
Il y a également les fêtes religieuses comme les Corpus christi de la Orotava et San Cristobal de La Laguna (les rues sont décorées de tableaux religieux faits à base de fleurs, feuilles, sables colorés, etc.) ou les Romerias...

Depuis que tu vis à Tenerife, est-ce qu'il y a une habitude locale que tu as adoptée ?

Le décalage horaire dans les prises de repas : on déjeune vers 14h et on dîne vers 21h. Ce n'est pas tout à fait le rythme des Canariens qui, eux, mangent plus tard... et puis, il y a la "sieste" ou tout au moins un temps de repos dans l'après-midi.

Y a-t-il une spécialité culinaire locale que tu apprécies particulièrement ?

C'est difficile de s'arrêter à une spécialité car tout est bon ! Les fleurons de la cuisine canarienne : les sauces mojo, les papas arrugadas (pommes de terre), le queso asado (fromage grillé servi avec sauce mojo et miel de palme), les croquetas, le lapin sauce salmorejo, les desserts à base de gofio, etc. J'ai peut-être un petit faible pour le cerdo iberico (porc ibérique aux pattes noires : pata negra) sous toutes ses formes : la presa, le secreto ou le solomillo (filet). Les amateurs de viande et/ou poisson ne seront pas déçus car nous avons la qualité à petit prix ! Pour les touristes, on trouve aussi la paella et les tapas... qui ne sont pas des spécialités canariennes !

Quels conseils peux-tu donner à ceux qui veulent s'installer pour leur retraite à Tenerife ?

Un projet comme celui-ci se réfléchit et se prépare. On ne quitte pas tout sur un coup de tête uniquement parce qu'on recherche le soleil. Il faut savoir que 8 expatriés sur 10 ratent leur expatriation.
La position de retraité est plutôt confortable : pas besoin de travailler, juste profiter de la vie et même avec une petite retraite, on y vit beaucoup mieux qu'en France. Ce n'est pas le cas lorsqu'on vient ici pour trouver du travail... la crise est là et il est difficile de décrocher un job. Si on veut monter une affaire, il faut attendre minimum 3 ans pour qu'elle soit reconnue et devienne rentable.
Le conseil que je pourrais donner c'est de venir passer 10 à 15 jours dans un premier temps et de faire le tour de l'île pour voir dans quel coin on se sent bien. Il y a de telles différences entre le nord et le sud de l'île.
Ensuite, il y a suffisamment de sites comme celui-ci où on peut dialoguer avec des expats sur place pour récupérer un maximum d'informations. Mais, il faut quand même se donner un peu de mal et prendre la peine de lire ce qui existe déjà sur le sujet et pas débarquer la bouche en coeur en demandant ce qu'on doit faire comme démarches !
Enfin, il est conseillé si on prend une location de ne s'engager que sur 3 ou 6 mois dans un premier temps pour être certain que le lieu choisi convient bien (exposition, environnement, etc.), ce qui laisse le temps de repérer autre chose si nécessaire.
Et pour terminer... profiter pleinement de chaque jour qui passe !

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